Petit Renard prit donc la piste des trappeurs qui s'enfonçait dans la forêt. La neige ralentissait la marche, mais Petit Renard connaissait bien sa forêt, et savait à quels endroits elle pourrait trouver un peu de nourriture. Pourtant, de longues heures plus tard, elle était toujours bredouille. Elle s'apprêtait donc à prendre le chemin du lac, quand elle cru entendre une plainte. Oui, derrière ce buisson, comme des pleurs. Elle s'avança, suivant le bruit, et déboucha dans une clairière, où un étrange petit bonhomme barbu pleurait la tête dans les mains.

C'était un tomte, une créature du petit peuple qui d'habitude se cachait des humains. "Celui-ci ne m'a sans doute pas entendu venir, perdu dans sa tristesse" se dit Petit Renard.

- Qu'est ce qui te rend si triste petit homme ?

Il sursauta.

- Qui es tu toi d'abord ? Es tu venue voler mon trésor ? Ah, mon trésor, mon cher trésor, il a disparu ! Que vais-je devenir ? Le roi des Trolls me fera couper la tête si je n'ai aucun trésor à lui offrir à la grande fête de ce soir.

Soudain, il se tût, regarda longuement Petit Renard, et dit :

- Mais toi, tu en as un, de trésor... Me le donnerais-tu ? Le donnerais-tu à un pauvre vieillard pour l'aider à garder toute sa tête ?

Alors, Petit Renard sut ce qu'elle devait faire. Comme dans un rêve, elle sortit sa dernière bille, et l'offrit à l'étrange lutin barbu. C'était, elle le savait maintenant, une véritable bille magique qui permettrait au vieillard de fêter dignement noël. Et en cet instant hors du temps, elle fit simplement le souhait de retrouver son père.

Le tomte se releva, souriant, et dit simplement : "ne traînons pas, suis-moi, vite", et il partit en galopant entre les arbres. Petit Renard se mit à courir derrière lui, luttant contre la fatigue et le froid mordant. Elle le perdit cent fois de vue, cent fois il réapparut en grommelant, "plus vite, ne traîne pas". Quand enfin, épuisée, elle se retrouva à l'entrée du village, il avait disparu. Elle se traîna jusqu'à sa maison. Pourquoi la lumière était-elle allumée ? Elle ouvrit la porte, inquiète, et fut soulevée de terre.

- Petit Renard, comme je suis content de te revoir ! Comme tu as grandi !

C'était son père, qui la serra longuement dans ses bras. De la cuisine venait une bonne odeur de ragoût. Son père avait trouvé du travail sur un bateau de passage, et après une semaine de pêche était revenu à la maison, pour passer avec sa fille le plus beau des Noëls.