Thanatos 1
Né d’un amour de deux fans des Avengers et fils unique, Mjollnir a tout ce dont un adolescent pourrait rêver. L’amour de ses parents, l’acceptation de ses camarades de classe, une ambition d’acier, une QI élevé…Il n’a pas à s’en plaindre. Les jours de semaine sont pris par ses études, tandis que les jeux vidéo règnent durant les weekends, aux côtés de son grand frère et parfois, c’est piquenique en famille.
Sa vie paisible ne peut que le rendre de plus en plus épanouie.
Une figurine de Thor à la main, son pouce caresse doucement l’armure cuivrée. Il rejette sa tête contre le mur et contemple le ciel clair du mois d’avril. Mjollnir soupire.
Malgré toutes ces bénédictions en sa possession, quelque chose lui manque. Un vide à combler. Son cœur ternit au fil du temps et l’ignorer n’est plus une solution. C’est pour cette raison qu’il se retrouve, en un mercredi matin, à sécher les cours sur le toit du lycée.
Un paquet de chips au fromage à moitié rempli, une bouteille d’eau et un livre sont sa seule compagnie. Il le lit depuis plusieurs jours et pourtant les pages n’en finissent pas. Mjollnir n’aime pas la lecture, trop longue, trop compliquée, trop galère. La couverture du bouquin réussit cependant à attirer son attention. En lignes abstraites, deux mains essaient de se joindre plongées dans un fond sombre et une plume d’oiseau tombe de manière dramatique. Elle donne l’impression de regorger une histoire mystérieuse ou même tragique.
Ce n’est rien de tout ça.
Les syndromes psychologiques font l’objet de cette étude. Tantôt rares, tantôt omniprésents dans la société d’aujourd’hui. La croyance de Mjollnir s’immortalise à sa vision ; une chose ne peut exister tant qu’elle reste invisible à l’œil nu. Ainsi, il est force de constater l’ennui de sa lecture. Mais il persévère tout de même.
Un bruit le déconcentre.
Son attention se détache des mots couchés sur le papier et se penche en avant. Il aperçoit une jeune fille dont la rousseur de ses cheveux courts valse au gré de la brise. Pendant les heures de cours, aucun élève n’est autorisé à quitter la classe, pas même pour une pause pipi.
Intrigué, il se penche un peu plus. Sa silhouette bien garnie s’approche dangereusement du muret – censé protéger tout danger. Ses pas s’avancent encore, loin la peur de trop se rapprocher.
Le muret enjambé, elle se redresse et fait face au vide. La floraison du printemps l’accueille à bras ouverts. Le vent siffle sous ses pieds. Un pas en avant, elle tombe et se laisse tomber.
On la retient de justesse.
Mjollnir s’est lancé sans réfléchir et a attrapé le poigné de la jeune fille. Son regard rencontre le siens et son échine est parcourue d’un électrochoc.
- Mais t’es malade !
- Lâche-moi.
- Il n’en est pas question ! Je ne veux pas avoir ta mort sur la conscience ! Agrippe-toi à ma main !
Elle ne répond pas et l’observe de ses yeux vidés de toute vie, las et tristes. Une expression épineuse pour le cœur fragile de Mjollnir. Il tente néanmoins de calmer ses propres palpitations alors qu’il l’aide à remonter sur le toit. Une telle frayeur est tout nouveau pour lui et espère ne plus la ressentir un jour. Il en a visionné dans les films et les infos, mais jamais dans sa vie.
- Désolée, est la seule chose qu'elle réussit à prononcer.
- Je ne sais pas ce qui t’est passé par la tête, mais se jeter du dernier étage n’est une solution !
- Qu’est-ce que t’en sais ? T’as déjà essayé ?
- Bien sûr que non, sois pas bête ! Mais il est dans le bon sens de savoir que le suicide n’arrange rien !
- Si quelqu’un avait eu la gentillesse de me le dire avant, je ne l’aurais pas fait, ironise-t-elle.
- Un psycho est fait pour ça.
Soufflant bruyamment, il ne lui tourne le dos que quelques secondes que la fille s’apprête à se jeter encore une fois. La scène se reproduit, mais cette fois, il ne se gêne pas pour lui cracher des injures en la secouant dans tous les sens.
- Si tu n’as vraiment personne à qui parler, je peux t’écouter, suggère-t-il en se grattant la tête, comment tu t’appelles ?
- Thala !
Depuis ce jour, Mjollnir et Thala se retrouvent chaque mercredi sur le toit.
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