Fontaine de Duchamps
Beaucoup direront qu'il ne mérite pas sa place, ici sur ce socle. Il le méprise, lui tourne le dos. Maltraité, renié, détruit puis remplacé, cette oeuvre dérange. Certainement par son utilité première, par le génie de son créateur, par sa simplicité. Simplicité artistique mais complexité de fabrication.
Pourquoi cet objet que l'on retrouve dans de nombreux lieux publics, ne mériterait pas sa place dans ce musée autour de peintures et sculptures classiques, banales ?
Lorsqu'il a été construit, certainement à la chaine, il n'était pas destiné à un tel avenir. Il ne devait pas être sous les projecteurs, admiré par certains et rejeté par d'autres. Sa vie devait se résumer à un lieu particulier entouré de ses semblables.
On ressent sa tristesse engendrée par tous ces regards de dégouts, la force et le courage de l'artiste, mais surtout la fierté découlant de cet acte provocateur, un urinoir dans un musée, un scandale révélateur et révolutionnaire.
Appeler une fontaine, cet objet sale, impur où l'homme se vide les reins, dans une société fermée où l'art est considéré sacré. Révolutionnaire.
Cette oeuvre provoque en moi une envie de crier au monde ses travers. J'aime qu'elle soit peu appréciée, elle n'en est que plus belle, plus symbolique. Symbole de liberté d'être ce que l'on souhaite, libre d'aimer, de choisir, libre de définir son art, libre de créer et d'imaginer. Cette liberté je m'en imprègne. Symbole de la rage, du non-conformisme, symbole du courage. Symbole que chacun peut interpréter comme il le souhaite.
Après tout cet urinoir n'est peut-être qu'un urinoir chanceux d'avoir eu une autre vie. Un urinoir déplacé par un homme un peu fou, un peu anar qui ne souhaitait que faire parler. Un objet banal sans émotion, ni message, juste un urinoir appelé "Fontaine".
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