Ces 500 constellations, je les connaissais toutes, par coeur même. J'étais une exception. Il fallait se rendre à l'évidence, j'étais vraiment quelqu'un. Je me souviens de cette fois où mon père m'avait emmenée au planétarium. C'était il y a douze ans mais c'était hier. En l'espace de quelques secondes j'appris le nom des huit planètes du système solaire, en deux ou trois minutes je connaissais les principales constellations, en une heure je fus plongée dans cet univers. Transportée ailleurs, si loin de ce triste monde, je me sentais légère, importante, en sécurité. Ce n'était pas comme à l'école. L'école, c'est l'avenir, j'en ai conscience. Être bien dans son corps, dans sa tête, dans son esprit reste primordial et passe avant tout. Lors de mes treize ans, je me voyais confier cette valeur à tout le monde sauf à moi.

La colère s'empara de mes pensées. Nos chers colocataires, les fantômes, venaient une nouvelle fois de frapper. En effet, mon père s'énervait et se lamentait tout en poursuivant sa collection de gros mots. Ces insupportables énumérations n'avaient pas une réelle utilité, il devait chercher ses lunettes, son téléphone ou son magazine, rien de plus. Pourtant il gémissait comme si on l'eut frappé.

J'observais les personnages de mon entourage avec curiosité et aucun d'entre eux ne savait vraiment ce que je pensais de leur personne. Chaque jour, afin de me construire, je m'inspirais de ce que je voyais. J'étais sans cesse confrontée à différents types de comportements. Chacun m'apportait une petite touche de mon être, même ceux que je détestais. Ainsi je ne suivais jamais leur exemple.

Le soir, je n'arrivais jamais à dormir. Impossible ! Des flots de pensées me trottaient dans la tête et monopolisaient tout mon être. Elles accostaient sur cette île étrange où elles étaient toujours les bienvenues. Moi, j'adorais ces moments, mon inconscient lui, les regardait d'un sale oeil. J'étais une penseuse et j'agissais rarement. Mes bonnes idées me poussaient à le faire plus souvent mais d'après Aurore, cela ne servait à rien. Aurore, c'est la personne qui vous parle. L'âme de ses dix-sept ans a subitement ressurgi afin de retracer l'aventure qu'elle a vécu, à elle toute seule, au fin fond de ses entrailles.

La journée destinée au lycée, il ne me restait plus que la nuit pour rêver...