12. Regard dans la nuit
Robin tente de se ressaisir. Chancelant, il se dirige vers la salle de bain où il soulage sa vessie, il ouvre la fenêtre et laisse le vent frais se saisir de son corps nu. Il espère que le froid lui rendra sa sérénité, mais au lieu de cela, il entend la mélopée sinistre des villageois qui rebondit entre les murs de la cour de l’hôtel.
Il enfile son jeans et un t-shirt, s’approche de Nathalie, encore endormie. Il la secoue gentiment.
— Hmmm. Laisse-moi dormir… répond-elle lui tournant le dos.
— Nathalie, remue-toi ! Il se passe quelque chose de bizarre.
— La dernière fois que tu m’as réveillé en pleine nuit, c’était pour qu’on le refasse, j’ai envie de dormir.
— Je t’en prie, viens voir.
— Fais chier.
Nathalie le regarde, entre les nappes de brume dont le sommeil enrobe encore son regard, elle finit par remarquer la panique qui imprègne le visage de son homme, elle ressurgit sur elle et achève de la sortir réveiller.
— Que se passe-t-il ?
— Viens voir !
Elle se lève et le suit près de la baie vitrée. La procession semble s’épuiser. Les derniers groupes chargés de leurs lourds filets de poisson s’engagent dans la rue principale. Quelques habitants, armés de torches, se sont assemblés devant la porte de l’hôtel. Ils discutent avec le patron.
— Qu’est-ce qui se passe ici ? interroge Nathalie en se tournant vers Robin.
— Je ne sais pas, mais. Mais ce que je sais, c’est que ça me fout les boules ! Habille-toi !
— C’est juste une fête de village. Recouche-toi.
— Habille-toi ! Au pire, tu pourras te moquer de moi demain matin.
Devant son insistance et leur frayeur partagée, elle enfile elle aussi des vêtements, éclairée par la lumière que la Lune dispense à leur chambre par les grandes fenêtres.
— Dépêche-toi ! Ils entrent dans l’hôtel.
L’urgence la saisit, elle chausse ses baskets, passe un sweat-shirt au-dessus de ses épaules. Pendant que Robin prend ses chaussures de marche et sa parka. Ils ont à peine terminé de s’habiller, ils entendent des pas lourds dans l’escalier. Un groupe s’achemine vers eux.
— Qu’est-ce qu’on fait ? demande-t-elle en rejoignant Robin, l’oreille clouée à la porte.
— On garde notre calme
— C’est toi qui me dis ça ?
Il ne se donne pas la peine de répondre, les bruits se rapprochent derrière la porte.
— Ils sont plusieurs, je dirais cinq ou six. Passe-moi la chaise !
Elle la lui tend. Il la bloque sous la poignée. Elle trouve la situation irréelle, elle ne pense pas que se barricader soit nécessaire, mais la peur est contagieuse, elle sait que Robin n’a rien d’un lâche, que s’il réagit de cette manière, elle se doit de l’accompagner. Au mieux, ils en riront demain, au pire.
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