Départ
Déjà deux ans que j’ai arrêté les études et que je vagabonde, que j’explore le monde et ses continents. Au prix de quelques mois en intérim et de nombreuses heures de transport, la soif d’aventures qui m’anime est toujours aussi mordante. Cet automne, je me suis engagée dans un périple à travers l’Europe du Nord. Après Berlin, la Pologne, Helsinki et Stockholm, l’Islande est ma prochaine destination. L’idée m’a piquée l’été dernier, lorsque j’ai rencontré une famille originaire d’Alaska, venus louer des chambres en Air bnb chez mes parents. Autour d’un thé, les quatre grand blonds aux yeux clairs comme le ciel m’ont fait le récit de leur mode de vie si étonnant. Les photographies de leur région étaient toutes plus fascinantes les unes que les autres. On les voyait triomphant de la chasse au caribou dans une forêt enneigée, prendre la pause sous la chorégraphie des lueurs vertes dans le ciel, ou encore à la pêche au saumon devant de majestueux glaciers. Chez eux, on pouvait observer des aurores boréales tout l’hiver. Portée à nouveau par le désir de vadrouille, j’ai effectué quelques recherches. L’Alaska n’étant pas la destination la plus abordable pour moi, j’ai pensé à l’Islande, plus proche et tout aussi susceptible de m’offrir l’ambiance magique du grand nord et ses aurores boréales.
J’ai réservé mes billets d’avion sans trop me préoccuper du reste. L’Islande étant une des destinations les plus coûteuses, je nourris l’espoir de trouver un logement en couchsurfing, mais s’il y a manifestement peu d’habitants qui reçoivent. Comme d’habitude, j’ai envoyé des messages au plus de personnes possibles dans l’espoir qu’une parmi elles se déclare disponible. J’ai aussi posté les dates où je serai Reykjavik afin que locaux et voyageurs puissent me contacter pour d'éventuelles rencontres ou visites en groupe.
Je suis à Stockholm, la veille de mon vol pour Keflavik, lorsqu’un certain Dalil m’envoie une proposition qui ravive mes espoirs. Sur son profil, je lis qu’il est installé en Islande depuis une douzaine d’années. Je passe en revue quelques-uns des nombreux avis positifs laissés par des voyageuses qu’il a déjà accueillies ou rencontrées. Sans mentionner l’hébergement, il se porte volontaire pour m'offrir une visite de Reykjavík et ses alentours. Je saute sur l’occasion. Après avoir échangé quelques brefs messages, cet homme me propose de venir me chercher à l’aéroport. L’offre est tentante. Se pourrait-il qu’il nourrisse des attentes en retour ? La question se pose, mais je décide de ne pas y donner du poids. Comme souvent, c’est l’esprit d’aventure et la confiance qui l’emportent. J’accepte en me disant qu’il doit être fiable, compte tenu des commentaires laissés par la communauté du couchsurfing. Au moins, j’ai la sensation d’avoir un point de repère qui m’attend sur cette île mystérieuse.
Nous sommes mi-novembre, il est six heure et demi lorsque j’embarque à bord de la compagnie Scandinavian Airlines. J’ai passé une partie de la nuit à danser jusqu’à plus soif, si bien que mes yeux peinent à rester ouverts. Je pose mon sac dans le compartiment au dessus des sièges et m’installe à côté d’une jeune asiatique. Elle fait seulement une escale en Islande pour rejoindre New York, dit-elle lorsque je lui pose la question. On ne sait jamais, j’aurais pu me faire une compagne de voyage. Je me laisse bercer par la chorégraphie des gestes de secours interprétée par les stewards. Le moteur vrombit et je tourne la tête vers les lumières de la piste qui défilent, nous quittons le sol suédois. Il n’y a plus qu’à patienter. Je sombre dans une sieste profonde, au-dessus des nuages.
Quand je me réveille, nous survolons déjà les côtes de l’Islande. L’île blanche au milieu de l’Atlantique paraît déserte. Ma poitrine se soulève à mesure que l’avion nous en rapproche. Aucune idée de ce qui m’attend. Juste Dalil, le prénom de cet inconnu qui a promis de venir me chercher à l’atterrissage.
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