4.3 Keira la sœur garce

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Aujourd'hui, la prison reçoit des visites. L'Alpha vient voir ses prisonniers. Je m'attends à affronter Sophie. Je me demande si c'est une délatrice ou juste un pion. J'ai la surprise de voir sa fille Solène débarquer. La jolie blonde nous fait venir Déborah et moi dans la salle d'interrogatoire. Elle explique à la directrice de prison que sa mère n'est pas encore remise de ses blessures. Elle la remplace donc. Officiellement, elle doit exécuter une punition à la demande de sa mère. Elle gifle Déborah. La blondinette me frappe avec une canne, pas bien fort.

Elle m'insulte, moi qui ai blessé sa mère. Sa fureur est crédible, mais je perçois un truc qui cloche. Elle ne frappe pas assez fort pour une fille en colère. Elle m'agrippe par les cheveux. Je sens qu'elle glisse un truc. Je confirme, c'est suspect. Solène nous fait un gros mensonge. Quelle vilaine fifille qui n'obeit pas à sa maman!

Quand sa rancune est passée, nous sommes reconduites à nos cellules. Discrètement, je passe la main dans mes cheveux. Je trouve une barrette à cheveux avec un petit mot. C'est bien ce que j'avais senti. Solène communique avec moi. En tant que fille de la chef des dictatrices, c'est imprévu mais excitant. Voyons donc ce qu'elle me veut.

—Salut la morveuse. Fouille bien.

KEIRA. Putain ! Cette garce est en contact avec Solène. La barrette, c'est pour je détache mes liens cette nuit. Je ne sais pas comment, mais peu importe. Si j'étais sensible, je pleurerais de joie en ayant des nouvelles de mon amie. Mais je ne suis pas sensible, alors, je mange le bout de papier pour ne pas laisser de trace. Je patiente et réfléchis. Keira a sûrement un plan.

De ce que j'ai vu, il n'y a que la directrice de la prison qui fait partie du réseau de délatrices et ma soi-disant sœur, traitresse de Déborah, qui ne vient plus. J'attends calmement. Je ne touche pas au repas du soir, je connais assez mon amie charogne pour savoir qu'il vaut mieux que je saute ce repas. Bingo. Je vois les autres prisonnières et les gardiennes s'assoupir. Keira a dû mettre un somnifère dans le dîner. Elle est si prévisible parfois. Je l'adore.

Quand tout le monde dort, je sors de la cellule en évitant les caméras. En un mois, je les ai toutes repérées. Et puis, je connais déjà bien les lieux depuis mon incursion enfant. Je fouille les ordinateurs des surveillantes et trafique les caméras. La directrice dort à poings fermés. Je fouille ses affaires sans aucun scrupule. Je lis tout. Sa correspondance avec les complices de Cassandra et celle avec le réseau officiel. Elle a bien reçu ordre de m'interroger et confirmation que notre sœur délatrice et Béa ne reviendront plus. La pouffiasse a obtenu les renseignements qu'elle souhaitait. Je ne trouve rien de bien intéressant.

Je retourne me coucher après avoir piqué de la bouffe à la cantine. Je me suis rempli le ventre et je ne tarde pas à ronfler. Dans l'après-midi, je subis un interrogatoire comme tous les jours. La décharge ne fonctionne pas. Elle est très faible. Mes geôlières réajustent mes liens. Elles recommencent. Maintenant que je sais, je simule la secousse. Je ne perçois qu'un picotement. Toute la séance, je joue la comédie de la douleur atroce.

Quelque chose cloche en ma faveur. Je ne crois pas au karma. Je penche pour un sabotage d'une espionne ou de Keira. La directrice s'en va, satisfaite de sa torture. Elle est si stupide. Une gardienne vient me détacher. Elle me met dans la bouche un morceau de fromage. Le préféré de Chen. Seule Keira, Chen et lui connaissons cette information. La seule assez sadique pour me vouloir mettre cette horreur en bouche, c'est cette garce de Keira.

— Chut. Je suis Éléonore. Je suis la petite sœur de Vanessa. Sœurs de sang. Je ne fais ni partie des rebelles ni de vos sœurs d'orphelinat. C'est la nympho qui m'envoie. Je ne parle qu'à elle. J'ai pour ordre de vous aider à ne plus souffrir.

La gardienne s'éloigne. C'est vrai qu'elle ressemble un peu à Vanessa, la Zêta de Sophie que j'ai fait fuir avec son amoureux alors qu'elle était enceinte. Je reste sur mes gardes. On ne sait jamais. Fichue paranoïa. Je me demande si un jour, je cesserais d'être en permanence en alerte.

Durant le mois qui suit, je suis correctement nourrie. Je me fais soigner par Eléonore. Les séances ne sont plus douloureuses. Je simule. Je fouille le soir. La directrice ne semble se douter de rien. Ses rapports font état de ma souffrance lors des tortures.

Solène est revenue pour sa visite mensuelle. Déborah et moi avons été battues, pas très fort. Solène n'a aucune poigne, ou elle se retient. Je penche pour un mélange des deux. Je me pose des questions sur sa complicité avec Keira. Je me doutais qu'un jour la blondinette s'opposerait à sa mère, mais là, je dois avouer qu'elle a particulièrement bien choisi son moment. Si Solène est de notre côté, cela veut dire que Keira doit avoir accès à l'ordinateur de Sophie d'une manière ou d'une autre. C'est génial, des cinq Alphas qui ont pris le pouvoir, elle est la plus intelligente et la plus influente. Si l'âge correspondait, j'aurais pu penser qu'elle est ma grand-mère, mais Sophie est plus jeune que Cassandra.

Parmi les soldats qui accompagnent Solène, je détecte Keira qui s'est grimée en une gardienne de l'établissement. Personne d'autre que moi et Nanou ne pourrait savoir que c'est elle. Keira est très douée pour se déguiser. Elle est capable de prendre les traits d'une personne existante. C'était notre petit secret entre nous trois. Je me demande ce qu'elle fiche ici. Je ne trahis pas sa présence et me régale de la voir patrouiller.

On nous a jamais appris à forcer le maquillage à ce point. Keira a appris toute seule, en expérimentant. Elle a un don naturel qu'elle dissimulait, et qui lui a permis de s'infiltrer dans bon nombre d'endroits. Notre code de conduite d'espionnes nous interdit de prendre l'apparence de quelqu'un de réel. Keira s'en fiche et adore se grimer.

Même Solène et Éléonore ne semblent pas être au courant de la présence de Keira. Elle me fait un signe. Un code entre Nanou, elle et moi. Je dois me mettre à terre. Pourquoi je l'ignore, peu importe, si Keira me le demande, c'est qu'elle a une bonne raison. Je fais semblant de tomber. Elle me relève d'une poigne ferme. Tiens, elle a dû faire de la muscu. Avant, elle avait du mal à me soulever. Ou alors, j'ai plus maigri que je pensais. Pourtant je fais un festin toutes les nuits dans la cantine. Keira glisse un truc dans mon soutif. Quelque chose de volumineux, blotti au creux de ma généreuse poitrine. Je me marre en silence tandis que mon amie s'éloigne.

C'est un jeu entre nous. Cacher des objets de plus en plus gros dans des endroits insolites. Dès que j'ai eu de la poitrine, mon soutif est devenu une cachette des plus utilisées. Avec une préférence pour la bouffe ou les couteaux. Un jour, on a fait un concours elle et moi pour savoir laquelle pouvait planquer le plus d'armes sur elle. Cette vicieuse avait tenté le revolver entre les fesses. Risqué, mais génial. J'ai gagné grâce aux deux minis pistolets sous les seins, aux couteaux dans la doublure du soutif et surtout, aux deux minis poignards dans les cheveux sous forme de baguettes à chignon. Nous sommes deux saletés de soldats d'élites sadiques et frappa dingues.

La journée se termine sans que je n'ai d'autres contacts. Je m'ennuie un peu. J'ai espéré qu'une bagarre éclate quand deux nanas ont commencée à s'engueuler à propos du repas du soir. Ca aurait mis un peu d'animation. Les gardiennes les ont calmées rapidos. Elles ont eu la mauvaise idée d'envoyer l'une d'elle près de Déborah et cette folle a voulu réquisitionner la bouffe de l'ex Alpha. Comme je m'ennuyais, que je suis du genre à protéger les faibles, et en plus j'aime bien Déborah, je me suis amusée un peu.

L'ex future harceleuse a failli s'étouffer et s'est très étrangement cassé un doigt sans que personne ne voit quoi que ce soit. J'ai été si rapide que seul mon sourire et mon doigt d'honneur ont trahi ma culpabilité sans vergogne. N'empêche, plus aucune prisonnière n'osera toucher à Déborah, et toutes les opprimées de la prison me voue une adulation depuis. Je me suis distraite un peu utilement.

A la nuit tombée, je fouille mon décolleté pour découvrir ma surprise. Un bracelet de gestion imitant mon entrave. Je l'allume pour découvrir le plan de mon amie. Keira a piraté le bracelet de la directrice. Je peux contrôler où elle se trouve et l'accès aux caméras. Mon bracelet est hors réseau, indétectable sauf pour cette charogne de Keira.

Ma pote m'a ouvert une boite mail. Une correspondance entre elle et moi. Elle m'a écrit tout ce qu'elle a découvert depuis notre fausse dispute il y a cinq mois. Keira est censée être en train de me fuir. Elle n'a aucune raison officielle de douter de notre réseau. Personne ne s'attend à ce qu'elle prenne le temps de le pirater. Vu qu'on la poursuit, ce serait totalement fou. Les espionnes n'envisagent même pas l'idée que nous puissions être complices.

Tout d'abord, les trois premiers mois, sur mes conseils, elle s'est infiltrée dans chaque centre de formation connu. Elle a repris toutes les données des lieux sans installer de dispositif d'espionnage qui aurait pu être détecté pour ne pas se faire repérer. Un centre existait bien avant la prise de fonction de Cassandra. Un centre qui ne répond pas à Cassandra mais à sa directrice. L'établissement a formé toutes les directrices et professeurs actuels. Cassandra en ignore l'existence. Ce centre a des sœurs placées auprès d'Alphas et d'anciennes proches de Cassandra. Des sœurs inconnues du réseau. Un réseau parallèle contrôlant le notre. Bordel. Keira vient de prouver l'existence des délatrices. Elle est rudement efficace. Pourquoi je ne lui ai pas fait confiance plus tôt? Elle est si douée. J'enrage contre moi-même.

Elle m'informe que ma secrétaire fait partie de ce réseau parallèle. Mamie me surveillait donc et je ne l'ai pas vu venir celle là. Je soupsconnais quelqu'un d'autre. Keira lui a fait boire du sérum de vérité le vendredi soir de ma capture. La fameuse directrice était inconnue de Cassandra. l'ex Alpha n'était bien qu'un pion, espionnée à son insu par sa propre secrétaire. Le réseau parallèle avait prévu de s'emparer du pouvoir. La destitution de Cassandra lui a fait retardé ses plans d'un an. Le réseau de délatrices continue de donner des ordres aux cinq dernières Alphas via quelqu'un.

Une fois les informations soutirées, Keira a attendu vingt quatre heures que le sérum ne soit plus détectable. Elle s'est déguisée en Zêta. Sous la menace, elle a conduit la jeune femme dans un bordel, puis l'a faite boire de l'alcool en grande quantité. Keira, de colère contre sa duperie, d'amitié envers moi et surtout pour ne pas laisser de témoins, l'a étranglé avec des chaînes d'esclaves. Le bordel a été attaqué le soir même par les rebelles qui ont trouvé morte la jeune femme. Keira s'est faite «délivrée» et s'est enfuie. La mort de ma secrétaire apparaît dans les deux réseaux comme provenant d'un esclave au moment de sa libération. Mon amie a brouillé les pistes avec brio.

Durant le mois suivant, mon premier mois de captivité, Keira est ensuite allé au lieu du centre secret en suivant les indications fournies par la secrétaire. Le centre était en éveil. La mort de l'une des leurs les rendaient méfiants. Keira a pris l'apparence d'une professeur et est rentrée dans le centre juste après le départ de celle ci, sous prétexte d'avoir oublié son écharpe. Elle a posé des caméras. Elle a surveillé les allées et venues pendant deux semaines. Le temps que la méfiance s'apaise. Nanou a simulé la présence de Keira à des milliers de Kilomètres de là. Notre réseau est tombé dans le panneau. Le parallèle aussi.

Keira a pénétré les lieux de nouveau durant une nuit. Elle a piraté les ordinateurs présents et est ressortie en échangeant l'ordinateur de la directrice avec un autre sous le contrôle de Keira. En temps réel, Keira pouvait lire chacun des écrans du centre. Les membres du réseau parallèle n'ont pas pensé un instant qu'ils pourraient être piraté de l'intérieur. La directrice collecte les informations des autres centres et des espionnes parallèles et les transmet à quelqu'un d'autre sous forme de code. Une certaine Blanche. Le cerveau. Ma grand-mère, mais cela Keira ne le sait pas encore.

La directrice espionnait Cassandra pour le compte de Blanche. On a enfin une piste sérieuse. Keira a analysé toutes les informations possédées par la directrice du réseau parallèle. Les anciens mails de Cassandra envoyés à cette adresse que j'ai récupéré sur un second ordinateur de ma génitrice. Cassandra correspondait directement avec Blanche sans en informer le réseau parallèle. Elle en ignorait l'existence. Tout comme la directrice ignorait que Cassandra avait le mail de Blanche. 

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