Chapitre 11 : Tous à Saint-Clair.

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Le problème principal que rencontraient les élèves du Lycée Gordon, mis à part le fait qu’ils n’avaient plus de bâtiments pour s’instruire, fut de trouver un endroit où s’entrainer à la danse.

Cette activité était devenue en quelque sorte la culture de ces étudiants et elle allait de pair avec sa réputation : “I don’t care”. Ils étaient connus pour s’en foutre de tout et notamment pour faire voler les feuilles de cours pour prendre le dessus sur une heure de cours et performer.

Mais ça n’avait pas toujours été comme ça.

De manière influente, ce fut lorsque Ulys arriva à l’école que la danse se répandit parmi les élèves. Le jeune garçon rêvait de grandeur et de devenir un chanteur. Quand Kimi l’eut rencontré, il lui apporta la pièce manquante du puzzle. Elle réussit à effacer petit à petit la douleur qu’elle ressentait au quotidien grâce à la musique et ce qui se répandit dans son cœur, apparut de manière inévitable chez les autres membres du gang. Pour eux, ils leur semblaient que c’était la meilleure manière de faire table rase sur leurs anciennes activités. Les bagarres et règlements de compte avaient été remplacés par toutes sortes d’autres mouvements coordonnés. Le besoin de rester ensemble restait par contre réel.

Leroy avait été d’ailleurs le dernier à s’y joindre, bien qu’il s’était avéré être très doué pour son jeune âge. Kimi et Ulys l’avait surpris une fois après une répétition du groupe répéter tous les pas qu’ils avaient appris en plusieurs séances et lui visiblement en une seule fois. Le garçon très souple s’exerçait en cachette, mais au fur et à mesure, il était remonté en première ligne. Le groupe d’amis lui avait fait croire que c’était parce qu’il était l’un des plus petits de la bande, mais il s’agissait surtout de le mettre en valeur. Certains même le suivaient difficilement des yeux.

Puisque le groupe s’avérait être fort influent dans l’école, en tant qu’héros, nombreux autres étudiants les avaient suivis : “Je veux en faire partie !”. Voilà ce qui se disait, jusqu’à ce que chaque tête du gang se décide à devenir son propre chef, leurs totems respectifs en blason. Aux cours des années, intégrer l’une ou l’autre faction devenait comme un rite de passage. Mais à peine eurent-ils le temps de s’habituer à ce fonctionnement sur trois années qu’ils n’avaient plus d’endroit où s’exercer.

Durant les grandes vacances, les membres en tête prenaient le temps de créer des chorégraphies ensemble. Même séparés, ils formaient le premier noyau. Les répétitions se passaient généralement au Lycée même, mais depuis qu’il était parti dans les flammes de l’enfer, chacun se débrouillait comme il peut.

Le salon de Mike et Nadeije manquait clairement de place. Le couple qui vivait une idylle en cachette leva en même temps les yeux au ciel quand ils entendirent un cri leur parvenir depuis leur dos :

  • Grah ! Mais foutu fauteuil ! J’en ai marre !
  • Ken’, se retourna Nadeije en posant une main sur sa taille, dégoulinante de sueur. Un peu de concentration.

La fille aux deux grosses couettes pleines de couleur gonfla les joues en écrasant son pied plusieurs fois sur le bord du canapé où elle avait tapé ses orteils.

  • Mais c’est plus vivable ! s’exclama-t-elle. Sérieusement, j’ai trop chaud alors que je suis déjà à poil ! éclata-t-elle en se montrant de ses mains.

Effectivement, elle ne portait qu’un mini short et un top tout aussi petit sur sa grosse poitrine. Très grande, sa taille accentuait la petitesse de ses vêtements. Sur ses avants-bras, de grosses cicatrices apparaissaient, souvenirs de son passage à travers le pare-brise.

Dans l’endroit confiné, la chaleur grimpait, non seulement à cause des températures hautes de l’été, mais surtout parce que l’attroupement de personnes rendait l’air lourd.

Silencieuse, Silka souffrait aussi le martyr, le menton renfoncé vers ses épaules. Les mèches noires qui tombaient en pointe devant ses yeux translucides étaient trempées.

  • C’est vrai… que ça commence à devenir compliqué, souffla-t-elle, son torse se soulevant frénétiquement.
  • Tiens, bébé, fit Kennedy en lui balançant une serviette à la figure pour ensuite elle-même passer son bras sur son front.

Contrairement à Kennedy, son amie portait des vêtements noirs et plus longs. Elle ne supportait pas montrer son corps. C’était une des conséquences de ce qu’elle avait vécu étant plus jeune. Les coups et les abus qu’elle avait reçu ne s’étaient jamais effacés. Elle les cachait sous des couches.

Son sourire, elle le gagnait grâce à la grande à côté d’elle. Très liées, elles formaient un parfait duo. Dans le même état d’esprit, elles abandonnèrent la répétition.

  • Je crois qu’on va s’arrêter là, les parents vont bientôt rentrer de toute manière, annonça Mike.
  • Dis plutôt que vous voulez un moment à deux...
  • Ta gueule, Tiger ! lui balança Nadeije, aussi excédée par la chaleur.

En arrière-plan, sa chevelure mi-longue collée à la tête, laissant apparaître tout ses pierçings aux oreilles, le blond était assis à la table haute de ce qui ressemblait à une salle à manger. L’endroit s’articulait en une pièce, cuisine et salon. Il avait les manches de son t-shirt retroussés sur ses épaules. Lui aussi, ne supportant pas la chaleur, laissa tomber l’arrière de son crâne contre le mur derrière, étalé sur le tabouret et son téléphone en main. Il arriva encore à les regarder de haut dans son état de larve.

  • Vous allez leur dire quand ? Que vous sortez ensemble ? demanda-t-il, en les narguant de son regard félin.
  • Jamais. Ce serait trop bizarre, répondit Nadeije en soulevant sa frange rose.

Mike se balança dans le fauteuil et alluma la télévision. Il n’avait pas envie de répondre à cette question. Aucun lien de sang ne l’unissait à Nadeije, mais ils vivaient dans cette maison depuis leur six ans. La famille d’accueil avait accepté de prendre en charge deux enfants, Nadeije se trouvant dans une situation d’urgence à l’époque. En entendant son histoire, ceux qu’ils considéraient comme un oncle et une tante aujourd’hui, n’avait pu faire l’impasse sur la petite fille alors qu’il ne pensait prendre que Mike dans un premier temps. Ce dernier n’avait jamais vécu de coups, mais bien la négligence de parents incapables de prendre soin de lui. Après sa relation avec Kimi, l’ancien petit ami et l’ancienne meilleure amie avaient fini par avoir une attirance l’un pour l’autre. Inévitablement, les deux cohabitants finirent par tomber amoureux, mais ils avaient tellement de respect pour leurs “parents” qu’ils n’osaient pas leur avouer la vérité. D’autant plus qu’ils ne sortaient réellement ensemble que depuis peu, ayant eu d’abord la bienséance d’essayer de réprimer cet amour.

Tiger se moquait un peu d’eux, mais il les plaignait au fond. Il passa à autre chose.

  • Ce serait bien que les deux guignols assistent aux prochaines répét’ par contre, lança ce dernier au travers de la pièce en faisant référence aux deux plus petits du groupe.

Benjamin et Chen avaient l’âge de Leroy. Eux aussi, amoureux, s’éclipsaient beaucoup pour avoir des moments ensemble. Ils étaient les membres les plus turbulents.

  • Arrête, tu sais bien qu’ils ont besoin de se retrouver, le rattrapa Nadeije, en maman moralisatrice. Surtout que…

Le sujet sensible tomba sur la table. Chacun dans un coin de la pièce, tous les membres du groupe devinrent silencieux, un air de déprime collectif se dessinant. Il n’y avait plus que le bruit de la télé qui courait en fond.

  • Je ne pense pas qu’ils iront dans la même école… enchaina Silka d’un ton monotone. C’est pour ça qu’il faut leur laisser du temps, déclara-t-elle alors fermement.
  • Le groupe avant tout, rétorqua Tiger en se levant pour se mettre au milieu de la pièce. On va tous être séparés, c’est de nous dont il faut profiter.

Des valeurs différentes les opposaient souvent, mais ils finissaient toujours bien par trouver un compromis. Sauf qu’ici, peu importe la solution qu’ils trouveraient, les dés étaient lancés : ils seraient séparés. Du moins, c’est ce qu’ils pensaient tous.

Imposant pour les autres, surtout pour Kennedy, Tiger avait réussi à les faire taire assez pour que les infos l’interpelle.

  • Plus fort. Mike, le son, demanda-t-il rapidement en voyant le nom du Lycée Gordon apparaître à la télévision.

Quand il s’exécuta, chacun se pencha un peu plus sur ce que la présentatrice expliquait, une image de Chuck Ibiss apparaissant en fond. Ils restèrent en haleine en écoutant ses dires :

“ Après un long moment d’attente, sans solution pour le Lycée Gordon qui a malheureusement pris feu il y a quelques mois de ça, nous apprenons de la part de Chuck Ibiss lui-même que des fonds viennent d’être débloqués afin de proposer des bourses d’études à chacun des étudiants…”

  • Ça veut dire quoi, ça ? demanda Kennedy, clignant de ses grands yeux verts, une couette dans chaque main.
  • Chut ! la coupa Tiger d’un geste.

“ Un geste de solidarité immense de la part du pionnier de l’immobilier qui encore une fois nous prouve sa générosité sans égale et son intérêt quant à l’éducation. Ainsi donc, sa proposition concerne tous les anciens étudiants du Lycée. Sur demande, ceux ci auront le droit d’intégrer, pas la moindre des écoles, puisqu’il s’agit de Saint-Clair… ”

Une exclamation globale se fit entendre dans la pièce, sur quoi Tiger n’hésita pas à les faire taire encore une fois.

“ Dans son communiqué, il nous informe que les travaux d’agrandissement de l’école et de l’internat actuellement à Saint-Clair n’étaient pas prévus à cet effet. Cependant, en vue de l’ampleur du projet, Monsieur Ibiss y a perçu également une occasion d’offrir une chance à des étudiants de ne pas perdre leurs repères et d’intégrer une école qui saura leur faire remonter la pente... ”

  • Il veut que je lui pète sa gueule, lui… s’énerva Mike, les deux mains sur les genoux, en sentant la critique qui pesait sur Gordon.

“Pour ce soutien, nous le remercions. Un relai sera effectué entre les deux directeurs afin de renvoyer les informations vers les étudiants qui voudraient profiter de cette offre. Des critiques, cependant, ont déjà été entendues à propos… ”

D’une mine énervée, Tiger éteignit la télévision après avoir volé la télécommande à Mike. Ce dernier jeta un regard circulaire pour observer chacun de ses amis. Un gros blanc les prit à nouveau. Il essaya de clarifier la situation, posant sa casquette à l’envers sur sa tête.

  • Donc… là, concrètement, si je comprends bien... On vient de nous proposer d’aller à Saint-Clair… ?
  • Quelle connerie, s’en alla le chef de la bande.
  • Et pourquoi ça ? intervint Nadeije. C’est quand même l’école de Kimi, peut-être que… Je vais lui envoyer un message, déjà, pour la prévenir. Peut-être qu’elle sait quelque chose, dit-elle en écrivant rapidement sur son téléphone.
  • Réfléchis un peu. Cette proposition est plus qu’étrange, répondit-il, méfiant. Cet homme-là, fit-il en le montrant d’un geste de la tête sur l’écran, c’est un businessman. Quel est son intérêt à nous prendre sous son aile, hein ?
  • Parce que tu sais ce que sait, toi, d’être un businessman ? lui répondit Silka, les bras étendue le long du dossier du fauteuil.

Kennedy lui tapa dans la main. Elle baissa tout de suite les yeux quand il la foudroya. Ces deux là avaient une relation spéciale. Elle osa tout de même prendre la parole :

  • N’est-ce pas une chance ? lança-t-elle, assise sur le fauteuil, les bras entre ses cuisses.
  • Si… fit Tiger. Mais je n’aime pas ça.

Penchée sur l’écran de son téléphone, tenu entre ses deux mains, Nadeije ouvrit la bouche en grand. Elle roula ensuite les yeux de ses orbites.

  • Les gars, cherchez pas plus loin, les interpella-t-elle en brandissant son appareil. C’est elle. C’est Kimi qui a fait ça.

En lisant le message, tous eurent un soupir, à la fois de désespoir et de soulagement : “C’est normal, ne t’inquiètes pas. J’ai négocié avec Chuck Ibiss.”

Ce fut Tiger qui eut ensuite une notification.

Il l’ouvrit :

“ Fais ton travail. C’est toi le leader maintenant. Le groupe avant tout. Donc venez.”

Entre ses dents, avec un petit sourire qui n’allait pas de pair avec son air de délinquant, il murmura :

  • J’imagine que c’est un ordre.
  • De quoi ? fit Mike, interpellé.
  • Rien, huahua, le taquina-t-elle en référence à la race du petit chien, ce qui le fit immédiatement aboyer en retour. Un petit tour chez les riches, ça vous tente pas, finalement ? Après tout, Leroy, Ulys, Kimi… Ils s’y plaisent bien.
  • Finir à Saint-Clair, marmonna Nadeije. Alors ça, je n’y aurai jamais cru.

Malgré la nouvelle soudaine, déstabilisante et encore floue, comme un rêve éloigné, ce furent les rires qui prirent le dessus sur la méfiance. Aucun d’entre eux n’auraient en effet pu rêver un jour se rendre dans une telle école. Ils furent plus qu'étonnés, et ce, comme beaucoup d’autres.

Depuis leurs maisons respectifs, chaque Richess apprenait la nouvelle avec une réaction différente, mais tous en pensant au fait que Kimi avait quelque chose avoir là dedans.

Chez les Dan's, alors que Leroy souriait devant la télévision, Dossan monta les marches d'escalier deux à deux pour questionner sa fille :

  • Kimi ! C'est toi qui a fait ça ? débarqua-t-il dans sa chambre, essouflé. C'est ça... Que tu as demandé à Chuck ? De les faire...
  • Est-ce que ça pose un souci ? l'interrompit-elle, au bord de son lit, le regard sévère.
  • Pourquoi toujours être autant sur tes gardes... répondit-il aprés un temps, puis en venant lui caresser la tête. Non.. mais tu avoueras que c'est plus que surprenant ! s'exclama-t-il en s'asseyant à ses côtés.

Dossan la regarda plus attentivement. Elle grandissait tellement vite. Il ne l'aurait pas crue capable d'une telle chose. Bien qu'il comprenait, il était en fait plutôt inquiet.

  • Mais tu sais... Ce que tu as fait pour tes copains, c'est bien... Sauf que dans la vie de tous les jours, ce n'est pas toujours aussi simple... Tu comprends ? Et tu as eu de la chance que Chuck...
  • Je n'ai pas demandé à n'importe qui, parce que je savais à qui je devais demander pour que ça fonctionne.
  • Ce que je veux te dire, c'est d'agir avec prudence...
  • Je n'aurais pas dû... ?
  • Je ne sais pas, qu'en penses-tu ? lui laissa-t-il le libre arbitre de penser à ce sujet.

Kimi fronça les sourcils et serra les poings, puis elle finit par le regarder avec des yeux déterminés. Au plus elle pensait avoir fait une bonne action pour ses amis, au plus son visage se détendit.

  • Je ne regrette pas.
  • Dans ce cas... répondit-il seulement en haussant les épaules avant de l'embrasser sur le haut de la tête.

Dans une autre maison, d'un pas lent, Laure se rendit jusqu'au bureau de son père. Elle y entra si silencieusement qu'il faillit ne pas remarquer sa présence. Une fois fait, celui-ci l'accueillit trés sérieusement :

  • Tu veux me demander quelque chose ? fit-il en premier.
  • KImi... dit-elle, l'index levé. C'est elle qui t'a demandé pour les élèves d'I don't Care...
  • Du Lycée Gordon, rectifia-t-il. Oui, en effet.
  • ... D'accord... s'apprêta-t-elle à ressortir avant de se retourner à nouveau. Et pourquoi as-tu accepté ?
  • Eh bien... s'apprêta-t-il à répondre, mais il marqua un temps de réflexion. Elle a su me convaincre.
  • C'est tout ?
  • C'est tout.
  • Tu as accepté... sans penser aux conséquences pour Saint-Clair ?
  • A quoi penses-tu ? s'étonna-t-il de sa réflexion.
  • Je ne sais pas... à la réputation ou... Non, rien. C'est bien, dit-elle encore en partant puis en revenant. Merci de... d'avoir accepté...

Chuck s'étonna de plus en plus, se redressant légèrement à son bureau.

  • Je crois que... C'était très important pour elle. Donc merci... C'est tout.

Rouge jusqu'aux oreilles, elle s'enfuit dans le couloir qui menant sa chambre. Au-delà d'être soulagée pour Kimi, Laure ressentait un drôle de sentiment. Son instinct la mettait en garde, comme si un mauvais présage lui pendait au nez.

***

La tête engloutie sous l'eau, les remous de ses mouvements de lutte firent avaler de grosses gorgées à Kenji. Privé de respiration, le goût des chiottes ne l'atteignit pas, à l'instar de l'air qu'il récupérait une fois tiré en arrière. Il le reprit en une grosse bouffée, élargissant au plus qu’il le put ses yeux vairons irrités.

En plus de sa toux incontrôlée, de la bave s'écoulait le long de sa bouche grande ouverte. Les filets s'éjectaient de manière virulente avec ses crachats. Il chercha les murs de la cabine de ses doigts, appelant à l'aide. Ses bras furent bloqués dans son dos par un garçon massif. La prise lui tiraillait les épaules, aussi brûlantes que les racines de sa chevelure, elle-même coincée tel des brins d'herbes entre de fines phalanges. Lorsque la poigne se desserra, il appuya son front sur la planche froide des toilettes avec le mince espoir d’arriver à se relever.

La voix féminine qui le parvint lui accorda un délai, le temps de lui poser une question :

  • Alors comme ça… Tu t’es inscris à Saint-Clair ? l’interrogea-t-elle d’un ton dénonciateur.

Fermement, les longs ongles peints d'un gris mat, de son agresseuse se plantèrent à nouveau dans son crâne, le forçant à courber la nuque en arrière d’un geste brusque. La lumière au plafond crama ses rétines déjà abîmés par le produit WC. Le liquide qui s’y logea rendit le visage de son ancienne chef encore plus flou. Encadré par ses longs cheveux noirs dégradés en plusieurs étages, il n’en vit que les traits sévères. Les lèvres serrées, il ne répondit pas à sa question. Un coup de pied dans ses côtes le poussa à un cri et la basket entre ses cuisses lui arracha une autre plainte. La fille en question roula ses sombres prunelles dans ses orbites quand elle découvrit l’air angoissé de son acolyte.

Elle le chassa aussitôt :

  • Dégage, l’envoya-t-elle balader en le forçant à reculer. Et toi… poursuivit-elle en s’asseyant sur le corps recroquevillé de Kenji. Parle, l’obligea-t-elle en entourant son cou de sa main hâlée.
  • Ugh… Mes parents… articula-t-il difficilement, souffrant et tentant d’écarter ses doigts avec les siens. À... Saint-Clair…
  • Tes vieux t’ont inscrit ? J’y crois pas une seconde, murmura-t-elle en serrant davantage sa gorge.

Mal en point, Kenji arriva à peine à sortir un son pour se défendre. Avec supplice, il plongea son regard bicolore et larmoyant dans les yeux de sa louve. À califourchon sur ses hanches, sa fine silhouette s’entourait d’un halo de lumière. Mourir serait peut-être plus simple, surtout de ses griffes. Il s’y abandonna.

  • Tch, lâcha-t-elle, sa lèvre supérieure se relevant pour laisser un croc apparaître. Alors non seulement, tu n’avais jamais voulu me donner son prénom, mais maintenant que tu l’as fait… Comme par hasard, tu vas aller dans son école ? Quel drôle de coïncidence. Un peu trop gros à mon goût, déclara-t-elle en se relevant, écrasant son pied sur ventre. Debout, ordonna-t-elle tout de suite.
  • Arr… tenta-t-il de la supplier, alors qu’elle l’empoignait, impatiente, pour le caler au-dessus de la cuvette.

Le silence dont elle fit preuve n’annonça rien de bon. Les poils de la hyène se hérissèrent le long de son corps. Finalement, ses sens reprenaient le dessus.

  • Hey… Tu te rappelles de Safia ? Tiens, tiens… plus rien à répondre ? pouffa-t-elle d’un rire amer. Alors, on y retourne.
  • Ça suffit ! l’arrêta l’autre garçon. Lâche-le, tu vas le tuer ! paniqua-t-il en s’engouffrant ensuite dans la cabine.

Elle n’adoucit pas pour autant son geste.

La montée de l'eau dans son nez obligea Kenji à décoller ses lèvres qui laissèrent échapper l'air qui lui restait. Juste avant de perdre connaissance, il vit une petite main s’agiter depuis le dessous de l’eau. L'auteur du crime observait les bulles se former autour de ses cheveux flottants avec dédain.

  • Selah ! Arrête !

Une chaussure calée sur la planche et le bras plongé à l’intérieur, elle lâcha un râle avant de s’exécuter. De haut, elle toisa avec aversion le pauvre garçon en train de s’étouffer, se raccrocher désespérément au carrelage. Ses cils noirs volumineux accompagnaient ses paupières dans de lourds mouvements. La dénommée Selah, déposa un genou à terre et s’installa à son chevet. Kenji ne fit preuve d’aucune résistante quand elle vint serrer ses joues d’une seule main. Envers lui, elle n’éprouvait que du dédain, mais elle aurait été bien bête de tuer sa porte ouverte sur Saint-Clair.


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