A la manière de... #1
Lieu : cuisine
A la manière de : un film dramatique
Jessica ouvrit lentement la porte d’entrée. Il était tard, il faisait nuit. Elle n’alluma pas la lumière. Laissant son sac tomber dans l’entrée, elle referma derrière elle. Elle s’arrêta un instant, la tête collée à la porte.
— Je suis rentrée, souffla-t-elle.
Elle caressa la porte du bout des doigts avant de se diriger vers la cuisine. Elle enleva ses chaussures au passage, les laissant sur son chemin. La jeune femme appuya sur l’interrupteur, clignant des yeux lorsque la lumière inonda la pièce. Elle regarda le plan de travail, immaculé. Un regard vers le frigo la fit frissonner. Elle jeta à peine un coup d’œil aux différentes photos retenues par des magnets d’enfant. Son regard glissa sur les sourires et les cartes postales venues de contrées lointaines.
La lumière du réfrigérateur fit danser les ombres sur son visage. Ses yeux vides parcoururent les étagères avant de tomber sur les tomates et la mozzarella. D’un geste lent elle les sortit et les disposa sur le plan de travail. Une brusque envie de salir tout ça. Elle saisit un couteau dans le tiroir qui lui faisait face et se mit à couper frénétiquement les tomates en rondelles, bientôt suivies par la mozzarella.
Lentement, d’un geste mécanique, elle sortit un saladier dans lequel elle mit ses ingrédients. Elle les regarda un instant de plus. Puis, avec lassitude, elle sortit le pot de vinaigrette. Il y avait bien longtemps qu’elle ne la faisait plus elle-même. Une larme roula sur sa joue. Puis une autre. Le sel de ses pleurs vint assaisonner sa salade.
Ses mains devenues tremblantes versèrent un peu de vinaigrette dans le saladier. Un sanglot la secoua. Elle sortit des couverts et se mit à mélanger le tout. Un spasme un peu plus violent que les autres la secoua. Elle lâcha les couverts qui tombèrent dans la salade. D’un geste brusque, elle essuya la morve qui commençait à couler avec sa manche.
Reniflant bruyamment, Jessica prit sa tête entre ses mains. Une plainte naquit au font de sa gorge. Le hurlement sortit de sa bouche, de plus en plus fort. Il se déchira dans un sanglot. Un violent spasme la fit renverser le pot de vinaigrette par terre. Des flashs lumineux vinrent danser devant ses yeux. Un visage, toujours le même visage. Elle hurla de nouveau. Toute sa peine et sa colère s’exprimaient à travers ce cri de désespoir.
Lentement, ses tremblements se calmèrent. Des larmes continuaient à rouler sur ses joues. Les ongles enfoncés dans la peau de son visage, Jessica décrispa ses doigts un à un. Lentement, elle ouvrit les yeux et baissa la tête pour voir le pot renversé au sol. Avec des gestes mécaniques, elle sortit une serpillère pour nettoyer les dégâts. Elle essora le tissu et retourna devant son saladier. Ses larmes s’étaient taries.
Elle sortie trois assiettes, qu’elle disposa de part et d’autre de la table de la salle à manger. Elle déposa les couverts, bien alignés, à côté des assiettes. Elle finit par ramener le saladier et par servir chaque assiette. Une fois sa tâche terminée, elle s’assit à sa place et regarda les photos face à elle.
— Bon appétit Lucas. Bon appétit Joris.
Seuls le sourire d’un petit garçon et d’un homme d’une trentaine d’années, immortalisés par deux photos, lui répondirent.
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