Correspondance Avec Darius de Saint-Germain (V)
Ma chère Fanny,
Je t'écris cette lettre que tu ne liras peut-être pas car tu m'auras oublié. La page Darius sera belle et bien tournée. Pour autant je suis là à t'attendre et pourtant je sais que tu ne viendras pas. J'écoute Chopin en boucle sur un vieux mange-disque poussiéreux et je pense à toi, mon vieux mange-disque aussi sans doute. Une mélodie mélancolique qui parle d'amour impossible et de tendresse humaine.
En attendant, ma chère Fanny, je remets du charbon dans mon poêle et je me mets à rêver. J'ai froid. Je n'ai que le froid pour compagnon dans ma petite cabane ouverte à la ville et au monde. Je suis là à espérer. Espérer quoi ? Je regarde le feu rougir, je sens la chaleur me bercer et porter mes pensées vers toi. Je vois encore ton visage juvénile et ton sourire radieux.
Je vis comme un clochard mais avec un feu et un lieu. J'ai des trous dans mes chaussettes et mes chaussures prennent l'eau. Le dénuement a quelque chose d'idéal. Vivre sans rien est un bonheur total auquel je t'invite bien volontiers. Nous serons à l'unisson de l'absolue nécessité de vivre comme le papillon bleu dont le seul bonheur est de naître un matin pour disparaître à la nuit tombée. Je t'invite à vivre à contrario du mouvement universel mais tu es une femme. La décroissance n'est pas ton truc.
Appelle moi ou fais-moi signe si tu changes d'avis.
Ton Darius qui t'aime et qui brûle pour toi.
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