Cher papa,

Je m'adresse à toi ce soir dans une entreprise déterminante : en ce 21 juillet 2018, je m'engage à te pardonner d'ici la fin de la rédaction de ce papier de pixels.

Bubble était un texte que j'avais écrit il y a maintenant deux ans.

Je l'ai continué aujourd'hui. Je suis forcée de constater que cette blessure ne s'est pas encore fermée.

Cela fait 10 minutes que j'attends devant mon clavier. J'attends que tombe la trame. Comment est-ce que j'agencerai les faits pour qu'en résulte enfin l'acceptation. Si j'ai rejoué chacuns de tes actes à de multiples reprises, c'est la première fois que je tente de m'en défaire.

Je souhaite te pardonner car je sais que c'est mon chemin vers la Liberté. Tant que je ne me serai pas défaite de ces ressentiments, tu auras du pouvoir sur moi.

Je souhaite également te pardonner car c'est une preuve d'incohérence par rapport à l'existence que je me suis construite -sans toi- d'éprouver autant de haine.

Je souhaite te pardonner ce soir car j'ai besoin de me prouver que je fais bouger les choses en moi. J'ai besoin de remettre des pavés à ma route, sentir que j'avance. Si je te pardonne toi, je pardonnerai qui conque.

Enfin, je décide de te pardonner pour objectiviser les leçons que j'ai tiré de tes nuisances. Elles ne pourront être légitimes que lorsque je t'aurai accordé cette absolution mentale.

J'accepte le fait que tu n'es pas en capacité d'envisager d'autres choix à chaque fois que tu blesses quelqu'un. Je te pardonne.

...

En fait, cela suffit. Ca porte tout ce qu'il faut.

Eh bien, merci.

Merci pour ton immaturité. Elle m'a montré que savoir aimer, cela requiert beaucoup d'exigence envers soi-même.

Merci pour ton ignorance. Elle m'a enseigné que tout est nuancé ; qu'à la phrase "Je ne suis pas parfait et personne ne l'est.", il faut ajouter "et je veille à devenir meilleur chaque jour.".

Merci pour ton inconstance. Elle m'a conduit, par toutes tes erreurs, à chérir les miens avec justesse.

Merci pour ta lâcheté. Elle m'a donné l'opportunité d'être courageuse.

Merci de n'avoir pas su jouer ton rôle de père. Tu m'as amené à faire les premiers choix de ma vie, des choix pesés ne laissant pas de place aux excuses.

Enfin, merci pour toutes ces blessures. Elles m'ont permis d'apprendre la profondeur du pardon. Je mesure combien c'est une leçon inestimable.

Ce soir, je me pardonne aussi d'avoir garder ce poids si longtemps.

Tout devient paisible.

-Love.