Parfums d'antan

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Sa paume moite frappe à la porte. Son coeur s'emballe. Est-ce vraiment une bonne idée ? Pas le temps de réfléchir davantage. Voilà la porte qui s'ouvre.

— Ferme les yeux.

Oui, c'était une mauvaise idée. Elle s'apprête à faire demi tour sans un mot lorsque Ken lance :

— Fais moi confiance. J'aimerais seulement placer un foulard sur ton visage. Ce soir tu n'as pas décidé de me rejoindre moi. Ce soir je t'offre l'amour de ta vie.

Toujours dos à la chambre. Elle stoppe sa fuite. L'amour de sa vie... L'alcool pourrait aider... L'évasion pourrait fonctionner. Des pas s'approchent et l'étoffe se dépose sur ses paupières déjà fermées. Des lèvres rencontrent sa nuque et murmure dans un soupir brûlant :

— Maintenant, je t'écoute.

Un court instant, une milliseconde, elle pense qu'il est là. Comment a-t-il trouvé son parfum en si peau de temps ? L'hôtel ne compte aucune boutique... Qu'importe. Pendant une poussière de temps, David était là. L'alcool et la désorientation pourraient-ils faire le reste ? Ne désire-t-elle pas plus que tout qu'il l'enlace une fois encore ? Des acclamations envahissent soudain sa rêverie. Les autres... Peuvent-ils l'apercevoir depuis le hall ? Une paume se glisse dans la sienne et l'attire dans la chambre avant de claquer la porte.

— Sois tranquille, ils n'ont rien vu, je te le promets.

Si proche, l'effluve de David inonde ses sens... Il est là, quelque part et glisse une main dans sa nuque pour l'embrasser. Le toucher délicat est différent, mais ce parfum venu d'outre tombe fait chavirer les craintes de Vida. Les barrières de la raison s'évadent. La mélancolie et la nostalgie s'échappent de leur geôle. Un adieu à l'homme qu'elle a aimé, c'est tout ce qu'il veut lui offrir, c'est tout ce dont elle a besoin. Sans un mot, elle enlace ce corps en offrande alors que ses paupières se noyent de larmes.

— Tu me manques tellement...

— Je suis là... Tu es si belle,

— Ma puce.

— Tu es si belle, ma puce.

Sa voix est douce, chaleureuse et presque sensuelle. L'homme qui est avec elle ce soir n'est pas l'artiste torturé. Le parfum, encore, toujours... Irrésistible souvenir incontrôlable qui perturbe l'esprit et la chair. Le visage entre ses mains, Vida se penche et pose ses lèvres sur les siennes.

Le bouclier revient à la charge. Non, David n'est pas ici. Cette parade ne fonctionnera jamais. Que fait-elle ici ?

Les mains sur sa taille, l'homme la fait vriller et se plaque contre son dos. La tête tourne... La chaleur de ce corps a raison de sa prudence. L'alcool aussi. Les doigts voyagent sur ses cuisses en une caresse délicieuse et, tandis qu'il effleure ses fesses et glisse une main entre ses jambes, elle ne peut réprimer un soupir. Emprisonnée contre son membre déjà dur, il invite son bassin à se frotter. La jupe relevée, les fesses presque nues contre le jean met le reste de ses sens en émoi et abat son armure. Après des mois de torpeur, chaque terminaison nerveuse s'éveille enfin. Ses synapses se connectent et son coeur s'allume. Ses muscles s'étirent à mesure que la vie renaît en elle. Une main sur celle de Ken l'invite à passer sous la dentelle. Des doigts brûlants prennent ainsi possession de son corps. Serait-ce un gémissement qui s'évade ? Elle vacille.

Si, David est là. Il est là car elle l'a décidé.

— Allonge-toi.

Un murmure, de sorte que sa voix ne le trahisse pas. Vida s'exécute, guidée par Ken. Installé au dessus d'elle, ses mains tirent sur le débardeur pour y déposer de puissants baisers sur sa poitrine. Elle empoigne la chevelure qui chatouille ses narines et attire ainsi sa nuque à elle. David lui a tellement manqué. Par réflexe, elle embrasse à nouveau l'homme qui prend soin de son corps. À mesure que leurs langues se caressent, elle s'acclimate à la différence. Le baiser devient plus fougueux.

Des doigts glissent sur ses cuisses et imposent à sa culotte une course sensuelle jusqu'au bas de ses chevilles. D'un geste de la jambe, pour se débarrasser de cette entrave au plaisir, le tissu s'envole. Une paume chaude et puissante prend place sur son intimité. Elle brûle de désir.

Ses cuisses s'écartent sous la tendresse des mains posées sur ses genoux. Ne rien voir et ne rien anticiper exhacerbent ses sensations. Soudain, un souffle caresse son mont de Vénus. Que fait-il ? La main suffisait ! Elle tente de couper l'intention mais ce dernier attrape sa paume et entrelace ses doigts aux siens.

— Fais-moi confiance, ma puce.

Le souffle de ses mots sur ses lèvres lui fait perdre la raison. Un tissu imbibé de parfum frôle son nez, elle l'agrippe et aspire tout ce qui lui reste de David. Son odeur... Une langue se pose sur elle et ondule dans une danse délicieuse. Le plaisir l'envahit... Sans aucune maîtrise, elle se cambre et cherche à emprisonner ce visage de ses jambes. La domination de cette bouche l'étourdit. La délectation la submerge. Sa main, une pression, et l'ordre est donné. Elle exige qu'ils ne fassent qu'un. Il obéit, caresse, enfonce et insiste, enfin. La vague est puissante presque bruyante.

Vite, que David la comble encore !

Sur le ventre, elle ne voit rien mais perçoit cependant tout ce qui l'entoure. Jean tombé, T-Shirt glissé, souffle intense, il est prêt. Elle aussi... L'idée était divine. Peut-il vite la rejoindre et continuer le fantasme ? Un bruit de plastique brise néanmoins le rêve. L'a-t-il remarqué ? Il s'allonge sur elle et installe son sexe entre ses fesses.

— Bouge pour moi.

La phrase est brutale, un ordre. Le retour de cette puissance masculine et le membre calé contre elle noient ses réticences. Bassin relevé, deux doigts s'invitent entre ses jambes. Elle sombre.

David... Son odeur, ses habitudes. Il est là, comme avant, presque comme avant et que souhaite-t-elle ? Qu'il jouisse grâce à ses fesses. Alors, au rythme qui lui plait, elle use de son pouvoir. Le chaloupé de son corps fait gonfler le désir de son partenaire. Son souffle est grisant mais elle refuse qu'il exulte. Ce ne sont plus des doigts dont elle est affamée, non, la guerrière s'éveille et se cambre davantage. Arme en main, elle l'approche et la présente. Comprend-il ? La réponse est lente et délicate. L'envahissement est doux et terrible. Dernière chance. Dernier combat... La chaleur s'intensifie tandis qu'elle agrippe l'étoffe et l'hume...

Il est là, avec elle... Mais...

Trop doux, trop respectueux. Elle empoigne ses fesses et impose un battement plus fiévreux. La déesse mérite son combattant, celui qui se tuait presque à chaque étreinte, celui qui animait son corps encore et encore pour l'assouvir. L'homme qu'elle aime, puissant, fougueux refait soudain surface. Son corps savoure ce voyage grisant au sein d'un monde fantasmé. Son mari remplit le creux laissé dans sa poitrine et son corps. L'affrontement est orgasmique. En cadence avec ses gémissements, il poursuit et geint à son tour. Elle est divine, elle le sait. Ce qu'elle propose est exquis, comment le nier ? Il l'a toujours été. Seulement, l'amour est généreux. Donner autant que l'on reçoit. David la transcendait et dans cette pièce, son influence se maintient. Elle retire son bandeau.

— Tu as son parfum ? tente-t-elle

Essoufflé, Ken indique la salle de bain.

Tandis qu'elle se déshabille entièrement, elle dépose quelques pressions d'essence féminine sur son corps.

— Ferme les yeux, murmure-t-elle.

La poitrine frottée contre le corps de Ken arrache aux deux âmes en souffrance un soupir de folie. Il empoigne ses fesses avec force et l'installe sur lui. La simple pénétration lui fait perdre pied. Le ryhtme voulu est doux et tendre et Vida s'adapte à la perfection. Une main sur sa nuque, inspirant cette odeur, ce souvenir, la parade fonctionne-t-elle également pour lui ? Est-elle là quelque part pendant cette odyssée ? Il lèche sa peau et la mordille tout en lâchant quelques jurons. Vida s'embrase. Un baiser est échangé. Leurs langues s'harmonisent autour des mouvements de leurs corps. Peut-elle risquer d'accélerer le mouvement ? Peut-elle encore rêver de David avant que tout prenne fin ? Autour de leurs désirs, ils se réunissent et échangent à merveille. Il place ses mains sur son visage et fond davantage dans sa bouche. En écho, Vida danse et attise les braises du plaisir qui s'apprête à jaillir de ces deux étoiles. Quelques secondes, quelques minutes ? Le temps est incertain mais le ravissement, lui, est impétueux, presque infatigable. Pourrait-il ne jamais s'arrêter ?

Puis, petit à petit, la tempête se calme et l'ouragan s'éloigne. Le visage enfoui dans la nuque de leur partenaire, chacun se délecte des dernières réminiscences sensorielles de leur passé.


Vida se retire, enfile sa culotte et son T-Shirt puis s'allonge. Ken, nu, tombe lui aussi sur le lit. Les deux jeunes gens restent silencieux quelques minutes, perdus dans leurs pensées, isolés dans leurs souvenirs.

— Je sais que ce qu'on vient de faire c'est complètement tordu pour des gens qui ne peuvent pas comprendre, mais je veux te remercier. L'idée n'était pas mauvaise, Ken.

— De rien, pour moi aussi c'était bien.

— Tant mieux, on avait pas prévu de gérer tout ça en même temps, mais je pense qu'on a bien fait. Nous voilà l'un et l'autre libres de nos passés.

— Hein ? Certes j'ai joui, mais moi je n'étais pas prêt... Comment tu peux imaginer que je viens de lui dire au revoir ?

Incréduble, la jeune femme se rhabille. La parenthèse est belle et bien terminée. N'a-t-il pas su profiter pleinement de l'échange profond qu'ils viennent de réaliser ? Faut-il envisager une nouvelle étreinte pour le satisfaire, lui ? Une boule au ventre s'installe. Elle pensait que sa générosité incontrôlée durant ces dernières minutes était une bonne idée. Mais l'attitude renfrognée de Ken semble lui donner tort.

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