Je termine mon verre assez rapidement puis je me tourne vers Matéo qui sirote tranquillement un verre d’alcool. Nos regards se croisent puis un sourire franc se dessine ses lèvres.

- Je veux danser sur la piste VIP, je lui fais part en posant ma main sur son bras.

- Bien sûr princesse ! s’exclame-t-il avant de boire son verre d’une traite.

Il repose l’objet sur le comptoir puis m’emmène sur la piste au milieu de quelques danseurs. C’est le meilleur moyen pour moi de profiter de la soirée et de me décontracter.

Je repense à la première fois que j’ai vu Matéo. C’était dans un bar et je dansais comme maintenant. Désormais, il est avec moi sur la piste et non assis au comptoir en train d’embrasser une fille.

Matéo se rapproche de moi et ses mains se posent sur mon dos. Nous nous dandinons au rythme de la musique. D’après ce que dit mon homme, le DJ est un artiste très connu aux Etats-Unis : c’est une chance unique pour nous de danser sur ses titres.

Lorsque Matéo me fait tournoyer sur moi-même, mon regard se pose ensuite sur une banquette près du bar. Je vois Eliot en compagnie d’une élégante brune plus âgée que lui. Ils regardent autour d’eux avant de croiser quelques secondes mes prunelles. Peu de temps après, le couple se dirige vers le couloir où se trouve les pièces fermées.

Matéo attire mon attention pour que je me concentre sur lui. Je lui lance un sourire rassurant avant de changer de pas de danses. Il fait de plus en plus chaud dans la pièce et Matéo commence à transpirer à travers sa chemise blanche. Cet effet ajouté à la lumière tamisée, me permet de discerner sa musculature.

J’avoue que je commence à avoir mal aux pieds à force de danser. Je fais part à Matéo de mon état et il propose de me commander un verre pendant que je me dirige du mieux que je peux vers les toilettes.

Je suis impressionnée par la décoration du lieu. Je ne pensais pas que des toilettes pouvais être aussi luxueux. Je m’installe sur une élégante banquette puis je retire mes chaussures pour quelques minutes.

Je reste seule un instant puis la porte est poussée par la mystérieuse brune que j’ai aperçu tout à l’heure. Elle me lance un sourire compatissant avant de s’installer près d’un miroir en or.

- Pas pratique ce genre de souliers, commente-t-elle tout en sortant du maquillage de sa trousse.

- En effet, je soupire en me frottant les pieds.

Elle se remet du rouge à lèvre puis du mascara avant de se tourner vivement vers moi.

- Je suis la sœur d’Eliot, je m’appelle Gaëlle, me renseigne-t-elle.

Je ne sais pas pourquoi, mais je sens que la famille Rochefort s’intéresse tout particulièrement à ma personne.

- Je ne te cache pas que nos affaires personnelles sont en lien avec ton oncle, continue-t-elle sur un ton décidé.

- C’est étrange mais je n’ai jamais entendu parler de votre famille, je lui dis en restant sur mes gardes.

- Nous si, et nous voulons que te tu réussisses à convaincre ton oncle dans sa lancée. Il veut se rétracter sur un projet important et c’est ennuyeux puisqu’il a signé un contrat. Nous te demandons ça, mon frère et moi car il est injoignable depuis plusieurs jours.

- Je ne comprends pas bien, je lui indique.

- Tu n’as pas besoin d’en savoir plus, conclu-t-elle avant de franchir la porte.

Ce qu’il vient de se passer était vraiment très bizarre. Mon oncle n’est pas du genre trouillard et il est connu pour être un excellent homme d’affaire. Je ne comprends pas pourquoi les Rochefort tiennent tant à m’inclure dans leur histoire. Peut-être que le voyage de mon parent y est pour quelque chose.

Après une petite réflexion, je décide de ne pas me mêler de ce genre d’affaires. Je ne veux vraiment pas avoir de problème et m’enchevêtrer dans des situations qui me dépassent. Je vais sortir de ses toilettes et faire comme si je n’avais rien entendu.

Lorsque je reviens dans la salle principale, je retrouve Matéo avec la femme du feuilleton télévisée. Je ne connais pas son nom mais je l’ai déjà aperçu à l’écran. La fureur s’empare de moi et me précipite vers lui en même temps que l’actrice soit interpelée par un autre homme.

La voie est libre à mon arrivée et Matéo pose un verre près de moi. La jalousie que j’éprouve à ce moment-là est intarissable.

- Je peux savoir ce que te voulait cette femme ? je lui demande sur un ton agressif.

- Calme-toi tigresse, répond-il en riant. Elle voulait savoir si je n’étais pas acteur ou mannequin. Peut-être qu’elle s’est dit qu’avec un physique pareil je devais forcément être connu.

Je tape violemment Matéo sur l’épaule mais il sourcille à peine. Je n’aime vraiment pas le ton sarcastique qu’il emploi : il sait très bien que cette femme voulait le draguer.

- Et toi ? Cette virée aux toilettes, bien passé ? questionne-t-il pour changer de sujet.

- Evidemment, pourquoi tu me poses cette question ?

- J’ai vu la brune qui accompagnait Rochefort venir juste après toi.

J’écarquille les yeux de surprise, rien n’échappe à cet homme. Comment peut-il se douter de quelque chose ?

- Comment sais-tu que…

- On apprend beaucoup de trucs à l’armée, me coupe-t-il, et être attentif en fait partie. Analyser tous ce qui m’entoure est une seconde nature chez moi.

- Ok, elle est venue me parler mais ce n’était rien, je minimise.

- Elle t’a dit quoi ? s’énerve tout à coup Matéo.

C’est rare quand il réagit comme ça au quart de tour. Je ne vois vraiment pas pourquoi la moutarde lui monte au nez.

- Elle m’a juste dit de convaincre mon oncle de continuer à suivre le contrat, mais elle n’a pas voulu m’en dire plus, je lui explique dans l’espoir de le calmer.

À peine ai-je fini de parler que Matéo se lève d’un bond en renversant presque le tabouret sur lequel il était assis. Il se précipite dans le couloir et je peine à le suivre. Une à une, il ouvre les portes avec la conviction de trouver Eliot et sa sœur.

Lorsqu’il trouve la bonne porte, les deux adultes se retournent avec surprise. Plus menaçant que jamais, Matéo s’avance vers eux. Même moi je reste en retrait touchée par l’aura offensif que dégage cet homme imposant.

- Combien de fois allez-vous nous emmerder ! hurle Matéo.

La surprise passée, les deux jeunes gens retrouvent leur climat de supériorité.

- Cette affaire concerne les Folona, affirme Gaëlle d’un ton ferme.

- Non ! Elle ne concerne que l’oncle de Tina ! continue de crier mon amoureux.

- Tu ne serais pas Matéo Di Angelo ? intervient Eliot.

- Comment êtes vous au courant de mon existence ? demande-t-il de plus en plus suspicieux.

- Simon de Folona et sa femme parlent beaucoup avec notre famille, explique posément Eliot.

- Tous ceux qui prennent part à ce contrat doivent suivre leur engagement, n’est-ce pas Matéo ? ricane Gaëlle.

Le visage de mon amoureux se décomposent avant de lancer un regard assassin aux Rochefort.

- Je ne veux rien savoir, fulmine Matéo.

Sur ses mots, il tourne les talons puis me pousse vers la sortie. Je n’ai pas le temps de répliquer que nous sommes déjà dans les escaliers. À la vue de Matéo, personne n’ose nous interpeller.

Il récupère les clés et en quelques secondes, nous roulons sur la route. Mon amoureux déferle très vite dans les rues et j’avoue ne pas être sereine. Matéo éteint le moteur une fois dans le garage puis marque un temps d’arrêt.

- C’était quoi ça ? Tu es au courant de quelque chose ? je demande inquiète.

- Non, je ne suis au courant de rien, répond-il d’un ton ferme. Il vaut mieux oublier ces zigotos qui se prennent pour des entrepreneurs.

- Super la soirée, je grogne en quittant la belle voiture.

Nous marchons jusqu’au salon où mon père est en train de lire un livre sur l’économie.

- Comment c’était ? demande-t-il en levant la tête de son bouquin.

- Assez… mouvementé, je réponds. Et votre soirée ?

- On est parti tôt car ta mère ne sentait pas bien, confit-il.

- J’espère que ça ira mieux demain.

Après ces quelques phrases de politesse, je grimpe les marches.

- Oublie ce qu’ils ont dit et dort, me conseille Matéo. Ces histoires ne nous regardent pas.

Il a bien raison sur ce coup et je compte suivre ses conseils. D’un hochement de tête, je lui indique que j’ai compris.

- Bonne nuit Tina, susurre-t-il après m’avoir fait un léger baiser sur la bouche.