Chapitre 14 - Le Conseil Galactique (1/4)
— Je propose d'envoyer un escadron afin de les neutraliser. De cette façon, le problème sera rapidement résolu.
— Mais vous êtes fous ! Nous ne savons même pas où taper !
L'administrateur Karin s'était soudainement levé de son siège, refusant catégoriquement la solution proposée par l'ambassadeur Taeil.
— Vous auriez peut-être une meilleure idée à suggérer, Ambassadeur Nelin ? Dit ce dernier.
Un second Karin intervint.
— Ambassadeur Falinson. Nous savons déjà tous ce Kron a la meilleure flotte militaire de la galaxie, inutile d’insister là-dessus. Mais les rebelles que nous devons affronter sont malins et bougent beaucoup. Une confrontation de front ne serait qu’une perte d’effectifs et de moyens si nous ne sommes pas sûrs de les avoir a l’arrivée. Je propose de réfléchir à autre chose.
L’ambassade Taeil de Kron devait vraisemblablement céder face à ceux de Bel et Nolandy. De nombreux ambassadeurs ne supportaient pas son idée qui était, il l’avouait, quelque peu impulsif.
Mais ces satanés rebelles les faisaient tourner en bourrique depuis un moment maintenant et ils n’avaient toujours pas réussi à leur mettre la main dessus. Falinson ne comprenait pas comment une telle minorité pouvait nuire à ce point à la majorité.
Avec un sourire, il approuva la décision de ses compères.
— Très bien. Reprenons le débat alors, que pensez-vous faire ?
Même si le Conseil galactique régnait d’une main de fer sur la galaxie, sous l’hégémonie des systèmes Bel, Nolandy et Kron, toutes les décisions prises en son sein étaient votées démocratiquement. Les ambassadeurs ne pouvaient donc pas faire passer tout et n’importe quoi.
La discussion reprit de plus belle. Un petit groupe de personnes étaient d’accord avec Falinson, mais la plupart des membres du Conseil souhaitaient partir sur une stratégie, pour le moment, plus pacifiste.
— Devrions-nous envoyer un espion pour infiltrer leurs rangs et révéler leur base ? proposa un Humain.
— C’est une technique de lâche, grogna un grand Swatrozi à la peau bleutée.
— Peut être, mais c’est une technique qui pourrait marcher, et qui nous couterait peu d’essayer.
Le Swatrozi n’avait pas l’air très emballé par cette idée. Il faisait partie de ceux qui soutenaient Falinson pour l’attaque de front et était également un ambassadeur de Kron. Mais le Taeil ne trouva l’idée pas si bête et y réfléchit un moment.
— Pour cela, il nous faudrait engager un mercenaire de confiance, suggéra un Zantry.
Un ambassadeur Taeil du système Bel hurla de rire.
— Je ne pensais pas entendre un jour dans ma vie mercenaire et confiance dans une seule et même phrase. Merci pour cette blague, ambassadeur Shyless.
— L’ambassadeur Tolooson n’a pas tort sur ce point. Avec les trahisons fréquents de mercenaires que nous rapportent la police galactique, il est juste impensable pour moi de confier une mission aussi importante à ce genre de crapules.
Des éclats de voix se firent entendre. Les ambassadeurs débattaient vigoureusement sur la question. Certains étaient prêt à tenter le coup après une sélection rigoureuse, d’autres refusaient catégoriquement de laisser ce travail noble à un hors-la-loi. Le Zantry reprit la parole.
— Réfléchissez-y. Les mercenaires ont l’habitude de ce genre de mission. De plus, ils n’ont aucun camp et se rallient au plus fort et au plus offrant. Si notre marché est très alléchant, il est facile d’acheter leur loyauté.
— Et si les rebelles possèdent une richesse que nous ignorons, rétorqua un ambassadeur Karin, qui ne nous dit pas qu’il nous abandonnera pour leur révéler notre plan.
— C’est un risque à prendre, répondit Shyless
— Un risque qui pourrait nous faire perdre toutes ces années à amasser des informations sur leur compte, s’exclama Tolooson.
Le débat reprit de nouveau. Falinson remarqua néanmoins une avancée. Tous étaient plus ou moins d’accord pour envoyer quelqu’un pour espionner la base des rebelles. Il ne restait plus qu’à savoir qui.
La fin du pilote automatique réveilla Dicey qui s’était profondément endormi sur le tableau de bord. Saon était visible par la vitre en face de lui. Bergins étais assis sur le siège du copilote et appréhendait l’arrivée au hangar. La fois précédente n’avait pas réellement été couronnée de succès. Shad sortit de sa chambre et rejoignit ses deux coéquipiers. Dicey se prépara à arriver. Il enclencha la connexion de données afin de recevoir les informations du HGS. Comme lors de leur dernière visite, la voix d’un Taeil assez peu enthousiaste demanda.
— Numéro de l’appareil. Provenance.
— SW-514. Combalia, répondit le pilote qui espérait éviter les complications cette fois-ci.
Un léger silence précéda la réponse du Taeil puis une sonnerie de confirmation retentit.
— Bienvenue dans le Hangar Galactique de Saon, monsieur. Veuillez-bien vous diriger dans la zone H-708 afin d’y faire atterrir votre navette.
Dicey ouvrit de grands yeux et regarda Bergins qui n’avait pas l’air d’y croire non plus. Le pilote était excité d’entendre que leur vaisseau avait passé la sécurité, mais fit comme si de rien n’était.
— Merci beaucoup, monsieur. Terminé.
Il coupa la transmission et se dirigea vers le hangar indiqué. La passerelle s’ouvrit et Dicey y fit atterrir la navette dans un hangar à moitié vide. C’était dans ce genre de moment que l’Humain se rendait compte que le HGS était gigantesque. Il s’était toujours demandé comment la capitale faisait pour accueillir autant de vaisseaux de taille très différente au même endroit.
La navette se posa près d’un croiseur argenté et le groupe ramassa ses affaires puis sortit. Ils marchèrent vers la sortie et passèrent par l’habituel contrôle de sécurité qui servait de transition entre le hangar et l’intérieur du HGS. Le policier qui s’occupait des fouilles était un Zantry. Il se saisit des armes à feu et les montra au groupe.
— Ceci est interdit aux citadins. Je vais devoir être obligé de les garder et ne pourrait vous les rendre que lors de votre départ de la capitale.
— Très bien, répondit Bergins.
Le policier rangea les armes dans le casier 53 qui se referma automatiquement. Le numéro du casier correspondant à la place du vaisseau dans le hangar.
— Gardez ce numéro afin de pouvoir tout récupérer au moment de repartir, expliqua le
Zantry, sinon elles seront saisies par la police.
— Entendu, dit le colosse qui nota le nombre sur son ComDev.
Le policier termina la procédure de sécurité puis ouvrit la porte.
— Tout est en ordre. Passez un bon séjour sur la capitale.
Il s’inclina et laissa passer le groupe qui entra dans le hall du HGS. Shad s’exclama.
— C’est beaucoup moins stressant lorsque l’on est accueilli de cette manière.
— Contactons Mark dès maintenant pour savoir où il se trouve, proposa Bergins.
L’Humain se mit dans une zone peu fréquentée du hall, ce qui était un exploit en soi vu le nombre de personnes présentes au rez-de-chaussée. Dicey nota néanmoins que la foule semblait moins dense qu’auparavant. La purge du Conseil fonctionnait peut-être assez bien. Mais pas assez bien, selon lui, car ils étaient parvenus à passer sans encombres.
Bergins activa son ComDev et contacta discrètement Mark. Le capitaine de la Compagnie de l’Azur décrocha en quelques secondes, comme s’il avait attendu leur appel avec impatience.
— Que se passe-t-il ? Demanda le mercenaire.
— Nous venons d’arriver au HGS, où êtes-vous ?
— J’ai loué une suite dans les Quartiers Prime, afin d’être assez proche du Conseil. Je vous envoies l’adresse, venez me rejoindre.
Bergins acquiesça et coupa la transmission. Il reçut ensuite les données de l’hôtel où résidait Mark.
— Une suite dans les Quartiers Prime ?! S’exclama Shad qui se retint de crier, mais ça doit coûter une blinde.
— On ne t’a pas demandé de payer, lui rétorqua Bergins.
Le colosse se dirigea vers l’escalator afin de rejoindre le troisième étage et le reste du groupe le suivit. La gare était toujours bondée, mais la queue pour aller en direction des Quartiers Tiers était largement plus longue que pour aller vers les Quartiers Prime. Shad versa une larme car, bien entendu, le prix des billets n’était pas le même et un ticket vers les Primes coûtait le double d’un ticket pour les Tiers. Mais Mark avait fait un virement via ComDev pour l’achat des billets, ce qui donna le sourire au Zantry. Lorsqu’il s’agissait d’argent, ces derniers pouvaient se montrer très sensible.
Le train dans lequel ils montèrent n’était pas complètement plein, en partie dû au fait que c’était le milieu de la journée et que la majorité des gens étaient déjà au bureau ou bien faisait le trajet dans l’autre sens pour rentrer chez eux.
C’était une première pour Dicey et Shad d’aller dans les Quartiers Prime et ils en étaient excités. Bergins ne semblait toutefois pas très impressionné et effectuait le trajet comme s’il allait à un rendez-vous chez le dentiste.
Le train avançait à toute vitesse et ils arrivèrent aux Quartiers Prime en un rien de temps.
Contrairement aux Quartiers Tiers, les Quartiers Prime n’étaient divisés qu’en deux zones seulement : la première partie, proche du HGS, qui accueillait les sièges d’entreprises et les logements haut de gamme, ainsi que la deuxième, qui servait de Quartier Général au Conseil Galactique. Il était nécessaire d’obtenir une autorisation pour pouvoir y accéder. Seules des navettes privées effectuaient le trajet entre les deux zones.
La gare des Quartiers Prime était luxueuse et très propre. Des panneaux publicitaires étaient présents partout. Les gens rejoignaient les sorties machinalement afin d’aller travailler. Bergins regarda les coordonnées envoyées par Mark et choisit la sortie adéquate.
Les Quartiers Prime dégageaient une ambiance bien différente des Quartiers Tiers. La technologie semblait plus avancée et le rythme de vie plus rapide. Comment, sur une même planète, une telle disparité existe sans que personne ne fasse rien ? Sur les Quartiers Prime habitaient les cinq à dix pour cent de la population les plus riches qui possédaient, entre autres, la majorité des entreprises de la capitale.
Le groupe tourna sur une avenue vers un hôtel gigantesque appelée « L’Horizon ». Selon les coordonnées, Mark y possédait une suite au 26eme étage. Mais l’hôtel était immense et magnifique. Dicey se dit qu’un mercenaire de haut rang devait bien gagner sa vie, même l’argent n’était pas toujours propre.
Le groupe pénétra à l’intérieur de l’hôtel et rejoignit discrètement l’ascenseur afin de gravir plus rapidement les étages. Arrivés au 26eme, ils toquèrent à la chambre 2614, celle indiquée par Mark.
Le capitaine ouvrit et fit rapidement rentrer le groupe à l’intérieur en jetant un coup d’oeil pour vérifier que personne ne les avait suivi. Il referma ensuite calmement la porte pour ne laisser échapper aucun son, pas même un grincement.
Dicey et Shad eurent à peine le temps d’observer l’intérieur de la suite que les bras puissants de Mark les attrapèrent tous les deux.
— Vous ferez les touristes plus, les gars, dit l’Humain, pour le moment, nous sommes en mission, et nous sommes pressés.
— Comment vous avez fait pour que l’on puisse passer sans encombres ? Demanda Dicey.
Mark ricana et montra son insigne de la Compagnie de l’Azur.
— Vous pensez vraiment que seuls les Ombres Pourpres savent être discrets ? Nous avons aussi nos taupes, et aux bons endroits, expliqua le mercenaire.
— Et pour la suite ? Interrogea Shad, c’est aussi un cadeau de vos coéquipiers ?
— Tout à fait, répondit Mark avec un sourire, j’ai de nombreux contacts ici. C’est grâce à cela que je vais pouvoir obtenir une audience avec le Conseil.
L’Humain montra son ComDev au groupe.
— Toutes les données que nous avons collecté sont ici. Je vais aller voir le Conseil dès maintenant. Attendez-moi ici et reposez-vous. Lorsque nous aurons une horaire d’audience, je reviendrais vous chercher. Ensemble, nous pourrons les convaincre de l’existence du Néant et des Éphémères.
— Mais nous n’avons toujours aucune preuve tangible de leur existence, intervint Bergins.
— Avec ce que vous avez et l’échantillon que tu as ramassé, il leur suffit de faire un peu de recherches pour comprendre que la galaxie court un grave danger. Surtout s’ils ne font toujours rien pour arrêter les Ombres Pourpres.
Dicey vit le colosse rester dubitatif mais Mark semblait tellement déterminé que rien ne semblait l’arrêter. Il était anormalement excité.
— Prélassez-vous, je reviendrais plus tard, dit le mercenaire avant de sortir de la suite, refermant la porte derrière lui.
Les trois acolytes se regardèrent sans vraiment comprendre le comportement du capitaine de la Compagnie de l’Azur. Bergins tenta d’ouvrir la porte de la suite… Et bizarrement réussi.
— Il ne nous a pas tendu de piège, dit le colosse en la refermant, il est peut-être juste excité à l’idée de pouvoir coincer Shenin.
— Leur relation est vraiment étonnante si c’est le cas, s’exclama Shad.
Le groupe décida de faire comme avait dit Mark : Se prélasser. La suite était tout bonnement gigantesque. Probablement plus grande que le plus cher des appartements des Quartiers Tiers. Elle bénéficiait de dix-huit chambres, neuf salles de bain, un salon très étendu avec une véranda possédant une vue imprenable sur les Quartiers Prime ainsi que d’un écran plat à la qualité irréprochable. Et, enfin, pour couronner le tout, un grand bar, entouré de consoles vidéos dernier cri avec de petites télévisions privées et de nombreux jeux disponibles, était entreposé dans un coin du salon. Le bar possédait les alcools les plus chers de Saon, et en grande quantité.
Une mini piscine, un sauna et un jacuzzi se trouvaient entre autres dans les nombreuses pièces que possédaient la suite. Dicey et Shad avaient eu mal à réellement se trouver à l’intérieur de cet hôtel et se demandaient tout les deux à quel moment allaient-ils se réveiller. Bergins, quant a lui, pensait toujours à un piège, car, disait-il, après autant de galères pour revenir à la capitale, une suite dans les Quartiers Prime était beaucoup trop facilement donnée.
Mais Shad et Dicey préféraient profiter de la suite avant d’inévitablement repartir sur une autre mission prochainement.
Le pilote prit donc un bain avec des bulles, se fit masser dans le jacuzzi, but une demibouteille d’Elotros, le vin le plus cher de Saon, termina une douzaine de parties sur l’Attaque des Zerons, le jeu vidéo culte de son enfance.
Ne voyant pas Mark revenir, le groupe finit par s’endormir. Épuisés, mais déstressés... Pour le moment...
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