Tisserand 2/
- Tou te rrrrends côpte, soupira le traducteur transcendé, oune sssiiiir â pou âmer môa. Je mâ sôviens… quand âle saveuâr… âle encôrrrr amôr.
De la chaleur se déplaça, et couvrit mieux la tête d’Ombre, tandis qu’elle ouït des écailles frotter contre ses cheveux. Elle grogna sans conviction, désireuse de toucher à nouveau le sol. Après un temps bien trop long, les ronronnements devinrent à peine audibles.
- Oune ssssoeeeeuuur peut m’âmer… soupira-t-il, incrédule. Mâlgré… Mârsssssi, Ôbre.
- Pourrais-tu me reposer au sol ?
Il obtempéra sans cesser de partager son bonheur. À peine sa liberté recouvrée, Ombre s’éloigna de quelques pas de lui, et attendit qu’il se calme pour lui demander ce qu’elle pouvait prendre pour le petit-déjeuner. Il lui montra tout ce qu’il fallait pour préparer un bouillon pour tout le monde, accompagné d’une sorte de pain plat et noir.
Ils s’installèrent près du feu, Ssdvenna’êk rayonnait. Dès que le bouillon atteignit une température raisonnable, Ombre rejoignit son Seigneur. Ce dernier prit le temps de s’étirer, de bâiller, avant de s’attaquer à ce premier repas. D’une voix fatiguée, il s’enquit :
- J’ai entendu quelqu’un éprouver beaucoup de joie ce matin.
- Oui. Ssdvennaèke. Il vient d’apprendre que sa cheffe l’a aimé peu après son arrivée en ces lieux.
- Elle lui a dit ?
- Non.
- Comment le sait-il en ce cas ?
Elle marqua une hésitation. Son engagement à garder sa spécificité secrète avait été brisé. Mais… les circonstances ne lui avaient pas laissé le choix. Et elle ne s’imaginait pas mentir à son Seigneur.
- Il s’avère qu’il a pu me rejoindre dans mes visions du passé. Nous avons même pu communiquer… je ne saurais vous dire comment, mais nous nous comprenions.
- Donc il sait que tu peux voir le passé ?
Gérald s’inquiéta.
- Je sais me défendre mon Seigneur.
- Sois prudente.
Pour toute réponse, elle sourit. Cette mimique, Gérald ne l’avait que trop peu vue, et il se rappela pourquoi il l’avait aimée. Quelle beauté. Toute en forces insoupçonnables.
- Vous aussi mon Seigneur.
Et elle le laissa là.
Isséri avait rejoint le Doyen, et leur conversation se ponctuait de nombreux gestes et grognements. Hênn-fia les surveillait depuis l’entrée de la tente commune, et lança un regard fielleux à la petite rousse. Cette dernière lui rendit un air de défi, et rejoignit les deux supérieurs en bombant le torse.
Isséri lui adressa à peine un signe de tête, et Ssdvenna’êk lui indiqua de s’asseoir près de lui d’un geste.
- Mâge.
Ils avaient sorti une pile de poisson séché, dont elle se saisit en plus d’un bol de bouillon. Elle tenta de comprendre ce qu’ils se racontaient, en vain. Leurs gesticulations durèrent assez longtemps pour que la faim pousse le clan entier à les rejoindre, tous se coupant du duo en s’isolant entre leurs ailes.
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