Chapitre 3

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Même s’ils ne s’en étaient pas rendus compte, c’était bien une sorcière qui habitait dans cette maison aux couleurs criardes, perdue en pleine forêt. Oh pas une bête sorcière de contes de fées, qui mangeait les petits enfants, non, on était à un autre niveau, là.

Dans une petite pièce, un peu sombre, un peu secrète, elle avait installé tout ce qu’il fallait pour se faire transfuser le sang des enfants. Elle était persuadée qu’avec ces jeunes globules rouges tous frais, elle obtiendrait la jeunesse éternelle. Elle disposait de deux fauteuils genre dentiste, côte à côte et tout un système de pompes, tuyaux et aiguilles afin de collecter le précieux liquide et se l’injecter en temps réel. Bien entendu, l’un des sièges était équipé de sangles pour que le transfuseur ne puisse pas bouger.

Une fois qu’ils auraient bien joué, qu’ils auraient bien goûté, ils seraient à moitié endormis – surtout après le somnifère ingéré dans les boissons – ça ne serait qu’un jeu d’enfant d’emmener la petite dans la pièce d’à côté pour pomper son précieux fluide vital. Le garçon était un peu trop vieux, ça serait moins profitable Elle le garderait juste en réserve, au cas où... Les enfants perdus en forêt étaient rares en cette saison, il faudrait peut-être qu’elle songe à se rapprocher un peu des zones fréquentées.

Hänsel et Gretel s’amusaient comme des petits fous. Ils avaient même oublié la présence de cette femme, avec un regard, somme toute, assez inquiétant. Elle les surprit en les troublant dans leurs jeux :

- Vous n’avez pas faim et soif, les enfants ?

- Oh si ! répondirent-ils.

Il ne faut pas oublier qu’ils avaient mangé uniquement des baies, des graines voire des noisettes depuis leur départ de chez eux, une fois le morceau de pain – enfin ce qu’il en restait – avalé.

Ils se jetèrent sur les gâteaux offerts et les boissons sucrées. Toutefois, Hänsel se méfiait de ces boissons avec des couleurs si criardes. En plus, il ne supportait pas les boissons gazeuses, celles-ci lui donnant de terribles maux de ventre.

- Vous n’auriez pas juste de l’eau, s’il vous plait, madame ?

Ben oui, il était bien élevé ce garçon. On peut avoir des parents affreux et être quand même quelqu’un de bien. De toute façon, le petit scarabée était toujours bien élevé et poli dans les films qu’il se passait en boucle.

Mince, il ne va pas dormir, lui, se dit la sorcière. Bah, au pire je l’assommerai, j’en ferai facilement mon affaire de ce gamin.

Des enfants affamés, même bien élevés, se bâfrent forcément quand on leur propose autant de gâteaux que ça. C’est ce qu’ils firent. L’estomac plus que plein, la soif rassasiée, ils retournèrent jouer mollement. Gretel sentait ses paupières devenir lourdes, très lourdes.

- Eh ben, Gretel, qu’est-ce qu’il t’arrive ?

- J’ai sommeil, Hänsel, je suis si fatiguée.

- Allonge toi là, près de moi, je veillerai sur toi, ne t’en fais pas.

Elle sombra rapidement dans un sommeil profond, aussi profond que la forêt où ils s’étaient perdus tous les deux.

Le garçon, pas bête, se dit que ce sommeil n’était pas si naturel que cela. À son tour, il s’affala et fit mine de dormir à côté de sa petite sœur.

La sorcière attendit quelques minutes, puis voyant qu’ils semblaient tous les deux profondément endormis, se décida à passer à l’action. Elle avait complètement oublié que le jeune garçon n’avait pas bu ses sodas aux somnifères, la conne…

Elle s’approcha de Gretel, vérifia qu’elle était toujours dans les bras de Morphée pour un bon bout de temps, puis alla déverrouiller la porte de sa salle secrète. Elle revint chercher la petite fille et l’installa dans un des fauteuils. Elle la sangla dedans, sans trop serrer pour ne pas risquer de la réveiller. Toute à ses préparatifs, elle n’avait pas vu que le frère s’était levé sans faire de bruit et l’observait avec horreur attacher sa sœur dans ce siège.

Il ne savait pas ce que cette bonne femme pensait faire à sa petite sœur, mais visiblement, ses intentions n’étaient pas saines. Qu’aurait fait le petit scarabée dans une pareille situation ? Aurait-il frappé cette femme par surprise ? Non, il ne frappait jamais par derrière et encore moins une femme. Oui, mais une sorcière ? Fouillant dans sa mémoire, il passa rapidement – oui, le temps pressait quand même – en revue tous les épisodes de Kung Fu qu’il avait vus et revus. Aucun ne le mettait face à une sorcière. Il allait donc devoir inventer, improviser. La vie de sa petite Gretel en dépendait.

- Eh la vieille, tu fais quoi à ma sœur ? lui demanda-t-il un peu énervé et moins poli aussi.

Surprise par la voix – elle le pensait endormi comme la petite fille – elle se retourna en renversant le plateau sur lequel étaient disposés les divers tuyaux et aiguilles nécessaires à la transfusion prévue. Le flacon d’alcool nécessaire à la désinfection chut aussi et se brisa au sol dans un grand fracas.

- Mais, tu ne dors pas toi ?

- Ben non, vous avez fait quoi à ma sœur ? Vous l’avez droguée ?

C’est à ce moment qu’il se rappela que lui n’avait pas bu ces boissons sucrées et colorées, mais que de l’eau.

- Ne bouge pas de là, je vais m’occuper de toi, mon petit bonhomme, lui dit-elle d’un ton menaçant.

Là, on voyait bien que ce n’était pas une gentille femme. Chassez le naturel, il revient au galop comme on dit. Son caractère apparût sur son visage et heureusement qu’Hänsel était énervé et voulait sauver sa sœur, sinon, il aurait été effrayé par le visage boursoufflé et rouge de colère de cette sorcière.

Hänsel fit le vide dans sa tête, dans son cœur et ne fit plus qu’un avec le vent et l’oiseau. Sans prendre son élan il se jeta sur la sorcière, s’éleva dans les airs, la jambe droite à moitié relevée. Quand il fut à la bonne distance, celle-ci se tendit, un cri puissant sortit des poumons du garçon et son talon frappa violemment le menton de la bonne femme. Son crâne partit en arrière et vint frapper le support d’un des fauteuils dans un craquement sinistre. Elle ne bougeait plus, allongée au sol, sa tête faisant un angle bizarre avec le reste du corps.

Le garçon avait du mal à atterrir. Non pas qu’il fut toujours dans les airs, non, mais pour la première fois, il venait en vrai d’imiter son idole. Le plus fort, c’est que même contre une adulte, ça avait marché. Il n’en revenait pas. Quand il dirait ça à sa sœur….

Il se rappela alors de celle-ci, sanglée et prête à être soumise aux sévices de cette horrible femme. Il se précipita pour la détacher, la prit dans ses bras et l’emmena dans la pièce principale. Il passa les heures suivantes à la veiller jusqu’à ce que les drogues qu’elle avait ingérées cessent leur effet.

Il se sentait fort. Il savait qu’ils pourraient survivre maintenant. Il avait sauvé sa sœur une fois, il le referait si nécessaire. Il allait s’entrainer, encore et encore, pour devenir encore plus fort et quand il serait prêt, ils iraient voir le père et la mère pour régler leurs comptes avec eux.

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