Un grand merci
Jean était de permanence à la cure quand le téléphone sonna. Il décrocha, et en entendant une voix familière qui le remerciait infiniment, son visage s'illumina ! C'était Ed, qui lui annonçait que tout allait pour le mieux depuis un mois. L'échange ne dura pas car Jean écourta la conversation en prétextant une urgence. Edward était sauvé, et en raccrochant le téléphone, Jean pleura de joie, mais quand ses larmes furent sèches, il bascula dans un profond désespoir. Depuis qu'il s'était débarrassé de la pierre en la jetant dans le Rhône, il sentait une présence insidieuse le tourmenter. Il vivait dans la peur et parfois, il sursautait au moindre bruit.
***
Cette nuit, là Jean s'agita dans son sommeil, il était en proie à un horrible cauchemar. Il se voyait dormir et la croix qui trônait au-dessus de son lit tombait sans cesse, il la replaçait, mais bousculée par une main sombre, elle chutait encore et encore... Persuadé que le diable voulait le tourmenter, il se réveilla en sursauts ! Pour se rassurer, il pria intensément et en allumant sa lampe de chevet, il constata avec soulagement que la croix était bien fixée contre le mur. Après avoir éteint la lumière, à cause de craquements étranges, il n'arriva pas à se rendormir. Puis son oreille se focalisa sur un bruit. Jean avait l'impression qu'une bille roulait à travers la pièce, parfois elle cognait les plinthes et ça l'agaçait ! Dans le noir, à tâtons, il cherchait l'interrupteur, il l'actionna et la bille s'arrêta. Le prêtre se redressa pour observer le sol, il n'y avait rien à signaler et le cœur battant à tout rompre, il se pencha pour épier sous son lit. À part quelques moutons de poussière, il ne distingua rien et apaisé, il joignit les mains pour prier. Un claquement sinistre rompit le silence et Jean sursauta. Effrayé, il se tourna lentement, puis il se figea en voyant la pierre sur sa table de nuit. En songeant qu'elle était revenue le hanter, il frissonna. Les yeux écarquillés, il commençait à perdre pied, et il entendait la pierre s'exprimer d'une voix lancinante :
— Je suis à toi. Je suis à toi, viens à moi.
Jean savait qu'il ne devait pas obéir à la pierre mais, elle avait déjà pris le contrôle de son corps. Contre sa volonté, ses membres s'animèrent et impuissant, il s'approchait de l'objet maléfique. Il avait envie de hurler mais aucun son ne sortait de sa bouche. Son index était à deux doigts de la pierre quand un ordre fusa à travers la porte :
— Reculez Jean !
Implacable, ses deux mots résonnèrent dans son esprit, l'envoûtement se brisa et par pur réflexe, il se jeta en arrière. D'une démarche souple, un vieil homme entra dans la chambre. Il plissa les yeux en observant Jean, puis il s'approcha du lit pour saisir délicatement la pierre. Il décocha un clin d'œil complice au prêtre et il déclara :
— Je m'en occupe !
Jean resta sans voix et l'étranger fila sans un bruit.
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