– Entrez ! Je vous en prie, prenez place ! Ne soyez pas timides, vous ne risquez rien. Enfin pas encore ! Tout d'abord, mesdames et messieurs, sachez que je suis heureux de vous accueillir au sein de ma classe. Assurément, nous allons vivre de grands moments ensemble, alors installez-vous confortablement !

La salle de classe était immense. Les élèves y entraient pour la première fois et c'est avec hésitation qu'ils choisirent leur bureau. Le professeur qui se tenait devant eux était le plus sévère de la formation. Sa réputation traversait les générations et tout le monde savait qu'il n'avait ni pitié ni tolérance pour ses élèves, et encore moins pour les différents mondes qu'il torturait jusqu'à la mort.

Personne n'aurait su dire combien de planètes il avait déjà détruites, mais à en juger par celles qui trônaient au fond de la salle comme des trophées, il y en avait certainement des dizaines. Les plus grands fléaux et dictateurs étaient passés dans cette classe. Les plus illustres avaient d'ailleurs leurs portraits en hauteur, sur les murs. Étrangement, ces derniers semblaient observer les nouveaux venus et ne pas les quitter du regard.

Le professeur reprit la parole.

– Bien ! Maintenant que vous êtes tous assis, nous allons pouvoir nous présenter. Quand je dis nous, il ne s'agit pas de vous et moi car je connais déjà vos dossiers et certains d'entre vous sont trop insignifiants pour prendre la parole. Non. Quand je dis nous, je veux parler de mes meilleurs élèves et de moi-même.

Le professeur, dont le visage était dissimulé sous une capuche, leva les bras. Deux mains blafardes aux doigts anormalement longs sortirent des manches et pointèrent les portraits de chaque côté de la classe.

– Je vous présente les Illustres. Ce sont les meilleurs à être passés ici, sur ces bancs où vous êtes vous-même assis. Je les ai formés avec rigueur et ils ont ensuite égalé le Maître que je suis. Égalé mais jamais dépassé. Vous les connaissez tous de réputation. Je vous présente Peste Noire, les cousins H1N1 et H1N3, Grippe Espagnole, Choléra, Rage, Hitler... Il m'est impossible de tous les nommer, même si certains d'entre eux sont encore à l’œuvre comme VIH, Staphylocoque, Cancer et Grippe Saisonnière entre autres.

Dans la classe seule la voix rauque du professeur raisonnait et montait jusqu'à la voûte. Les élèves tournaient leurs têtes à droite, à gauche et posaient des regards admiratifs sur chacun des portraits.

Là aussi, il y en avait tellement que personne ne sut dire combien ils étaient.

– Avoir son portrait dans cette galerie des Illustres est une consécration. Tous ces élèves sont devenus des légendes. Ils ont tous tués des milliers d'êtres humains. Ils ont éradiqué des populations voir pour certains des planètes entières, dont vous trouverez les vestiges au fond de la classe. Elles sont inertes. C'était un spectacle grandiose ! Je vous souhaite à tous d'en faire partie, même si je pense qu'aucun d'entre vous n'en est capable.

Dans la classe, les élèves osaient à peine bouger. Certains s'étaient enfoncés au fond de leur siège tandis que d'autres s'étaient redressés pour mieux boire les paroles. Bénéficier de ces leçons étaient déjà un privilège alors s'imaginer en portrait dans la galerie des Illustres était totalement inenvisageable, du moins pour l'instant.

– Quant à moi, je suis le croque-mitaine, reprit le professeur. Vous l'aurez compris, ma spécialité, ce sont les enfants. Je suis leur cauchemar. Je me nourris de leur terreur, de leurs angoisses et je traverse les générations. Tout le monde me connaît mais personne ne m'a jamais vu ni ne sait à quoi je ressemble, ce qui me rend insaisissable. Je suis une légende vivante et vous en deviendrez peut-être une si vous m'écoutez attentivement. Vous êtes en fin de cursus et vous avez des bases qu'il va falloir maintenant mobiliser. C'est le moment de nous montrer que nous ne nous sommes pas trompés en formant une nouvelle promotion de Virus. Nous allons voir ce que vous avez dans le noyau et pour ce faire, rien de mieux que des travaux pratiques.

Joignant les gestes à la parole, le professeur tendit les bras devant lui et mis ses mains face à face. Une lueur apparut. Minuscule, elle se mit à grossir. Le professeur ne s’arrêta pas avant qu'elle n'ait atteint une taille assez grande pour être vue depuis le fond de la classe.

– Je vous présente la Terre !