Chapitre 8 : Du fromage ?
En position de défense et mon poignard en main, mes yeux s'écarquillent, sans parvenir à distinguer les traits de l'individu. Il continue à s'avancer lentement dans ma direction. Soudain, la silhouette s'immobilise, j'entends distinctement le cliquetis de l'interrupteur de la cuisine. La lumière m'aveugle un instant, heureusement la silhouette n'est autre que celle de Dean.
— Bordel, Dean ! J'ai failli faire une crise cardiaque, soufflé-je légèrement irritée.
Dean essaye de répondre, mais s'étouffe en mangeant. Je ne sais pas ce qui me sidère le plus entre le fait qu'il reste debout dans la cuisine, dans le noir complet à trois heures du matin, ou qu'il coupe son fromage avec sa dague anti-démon.
— Rassure-moi, tu l'as nettoyé avant de t'en servir ? Dean observe son couteau avec un haut-le-cœur et le pose sur la table. Il ne l'a pas lavé, décidément les garçons sont dégueulasses...
— Bobby n'avait pas fait la vaisselle ! parvient-il à articuler.
Je soupire, il m'a foutu la trouille. Je pose mes clés de voiture sur le vieux buffet, enlève ma veste et me tourne vers lui en croisant les bras.
— Qu'est-ce que tu fous au juste ?
— Je t'attendais, dit-il les sourcils froncés.
— Pardon ? Comment ça tu m'attendais ? demandé-je, stupéfaite.
— T'as dit que tu rentrerais pas tard et c'est à cette heure-ci que tu rentres ! me crie-t-il, la voix pleine de reproches. J'ai du mal à croire à ce que j'entends.
— Tu plaisantes j'espère. Dean, tu sais quel âge j'ai ? vingt-six ans ! Vingt-six !
— Je me suis inquiété, d'accord ! Il marque une pause puis me demande avec amertume : alors avec Jeff ? Vous vous êtes bien amusés ? je pousse un long soupir. Quel fouineur! Je ne lui ai pas dit que j'allais voir Jeff, il a dû harceler Bobby pour le savoir.
— Mais je rêve ! Attends, t'es jaloux ?
— Quoi ? Non, je ne suis pas jaloux, c'était juste pour savoir. dit-il peu sûr de lui, évidemment qu'il l'est. Mais il tente de le cacher, sans grand succès.
— Bon, Dean je suis épuisée. Et je ne m'attendais pas à cette réaction de ta part, tu m'engueules comme si j'étais une gamine de trois ans. Allez, ça suffit. Je monte me coucher !
Non mais sérieusement il se prend pour mon père ou quoi ! J'adore Dean, mais je ne peux pas le laisser me traiter comme une enfant. Direction ma chambre, sans un regard vers lui. Une fois les escaliers montés puis ma porte fermée, je libère un soupir. Ce n'est pas mon genre de rendre des comptes, même à mes proches. Je décide de me calmer, d'ôter mes vêtements et de me glisser sous la couette. Même exténuée, la soirée passée avec Jeff me revient en tête. Un sourire se dessine sur mon visage, je l'apprécie vraiment.
À peine me suis-je assoupie, que le démon aux yeux jaunes apparait sous mes yeux las, tout ce que je demande c'est qu'on me fiche la paix !
— Encore toi, je rêve ou tout le monde veut ma peau...
— Bonsoir délicieuse petite... commence Azazel avec son air malsain habituel avant que je ne le coupe dans son élan.
— Oh la ferme ! Il a l'air surpris par ma réplique. C'est vraiment pas le moment de venir me chercher des noises ! Mes yeux le fusillent du regard. Après avoir observé les alentours, je constate que nous nous trouvons dans une maison vide. Elle semble abandonnée, et malheureusement, aucune arme à portée de main.
Azazel se racle la gorge en quête d'une attention de ma part, sans grand résultat...
— Génial ! soupiré-je sans lui accorder la moindre importance, encore un rêve à tous les coups...
Je me pince le dos de la main pour me réveiller mais cela ne fonctionne pas...
Ok donc à première vue, une personne ou une créature engendre mes rêves. Il aurait au moins pu me faire rêver de Jeff... Ennuyé par mon monologue, le démon s'avance vers moi avec un air menaçant. L'agacement prend possession de mon corps , mes poings se serrent fermement.
— Oh non, ne t'en fais pas. Tu n'auras pas besoin de te battre. Je suis venu te faire passer un message, j'ai... mais avant qu'il ne finisse sa phrase, je m'approche vivement de lui , avec une atittude hostile.
— Ecoute-moi bien pourriture, je ne sais pas ce que tu manigances. Mais Azazel est mort, donc qui que vous soyez derrière cet ideux visage, vous allez me dire ce que vous me voulez et maintenant !
— Je te recontacterai en temps voulu.
Le démon disparait soudainement, provoquant mon réveil en plein milieu de la nuit. Ce rêve était étrange... Je me rallonge en soupirant, il y en a assez de tous ces mystères, tout ce que je veux c'est retrouver l'assassin de ma famille. Et comprendre pourquoi ces rêves d'Azazel me hantent, quel rapport a-t-il avec Lawrence? Et qui est la personne qui se cache derrière mon enlèvement ?
Des souvenirs désagréables reviennent tout à coup tourmenter mon esprit, ce fameux hangar plongé dans l'obscurité. Ils m'avaient attachée avec des cordes et torturée pendant des heures. Je ne savais pas s'il faisait jour ou non, toute notion du temps s'était envolée. Je caresse la cicatrice ornant le côté droit de mon bas ventre, c'est là que j'ai été poignardée par un démon en essayant de m'échapper. Heureusement, Castiel m'a soignée, mais elle est toujours là. Une cicatrice indélébile, une trace du passé que je préférerais oublier. Il y avait cet homme, un démon j'imagine. Je n'ai jamais vu son visage, cependant sa voix reste gravée dans ma tête . Il ne pouvait s'agir que de leur chef, au vu des ordres qu'il prononçait. Mon enlèvement et ma torture viennent de lui. Des larmes de rage coulent sur mon visage alors que Morphée me replonge dans un sommeil profond. Je me promets de le retrouver.
* Le lendemain *
J'émerge du sommeil quelques minutes avant que la sonnerie de mon réveil ne retentisse. Je me sens d'une humeur écrasante, après la petite scène que m'a fait Dean suite à mon arrivée nocturne . Venant s'ajouter à cela, le fait qu'Azazel me tyrannise dans mon sommeil. J'ai vraiment besoin de me défouler. Jetant un oeil à mes notifications, je ne suis pas surprise de recevoir un message de Jeff. Il m'invite justement à aller chasser avec lui, sa proposition tombe à pic. Après avoir pris une douche, me voilà à la cuisine avec Bobby plongé dans ses livres, une bière à la main. Je me suis habituée à le voir boire aussi souvent, c'est le mauvais réflexe des chasseurs, d'ailleurs je n'ai pas trop mon mot à dire à ce niveau-là moi non plus.
— Salut Bobby, où sont les garçons ?
— Ah Eli te voilà, Dean est sorti voir un de ses contacts pour se renseigner sur Lawrence, et Sam traine sûrement à la bibliothèque pour faire des recherches sur CaÏn.
Ça tombe bien, je n'ai aucune envie de croiser Dean aujourd'hui...
— Ok, euh Jeff m'a appelée pour une affaire de gang de démons, je vais lui filer un coup de main.
— D'accord, sois prudente.
— Promis et préviens-moi quand t'auras des infos.
— Ça marche, à plus.
Je lui souris et sors de la maison pour rejoindre Jeff. Il m'a donné rendez-vous chez lui, à quelques kilomètres de la maison de Bobby à Sioux Falls. Sur le chemin, il m'a expliqué qu'un gang de démons sévissait dans la région depuis plusieurs semaines. Ils ont possédé une vingtaine d'humains et s'amusent à tuer des innocents. Il est temps de mettre un terme à leurs crimes. Jeff a appris par un contact, que les démons ont l'intention de se réunir. Et ils seront nombreux, il nous faut intervenir.
Nous avons attendu que la nuit tombe avant de nous rendre sur le lieu de l'échange, nous sommes tapis dans l'ombre, immobiles, observant les faits et gestes des créatures de l'Enfer. Les démons se sont rassemblés dans une ruelle isolée. Soudain, un éclair de génie me traverse l'esprit lorsque j'aperçois un vieux château d'eau situé non loin de là. Je me dirige alors vers celui-ci à pas de louve, et monte l'échelle silencieusement.
— Elizabeth ? Qu'est-ce que tu fais ? me chuchote Jeff, j'ignore sa question et monte l'échelle pour arriver au sommet du vieux château d'eau. J'ouvre la trappe sans grande difficulté et lance un regard vers Jeff :
— Je vais nous débarasser de ces vermines. J'attrape alors le chapelet dans la poche droite de ma veste, puis récite le rituel à haute voix en le tenant au-dessus de l'eau. Exorcisamum te, creatura anue in nomine dei patris, omnis potentis e tinvertite spiritus sancti. Je termine ma phrase en laissant tomber le chapelet dans l'eau, Jeff m'observe l'air perplexe.
— Je viens de bénir de l'eau, comme tu le sais, les démons n'en sont pas très friands. J'observe avec amusement, le visage de Jeff s'illuminer en comprenant le plan que j'ai en tête.
— Trés ingénieux, je n'y aurais pas pensé. me dit-il avec l'air ravi.
Je lui rends son sourire en pensant à John, c'est lui qui m'a appris cette astuce, lui qui était si débrouillard. Je regarde Jeff, avec détermination :
— On va leur tendre un piège...
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