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Après de longs détours et des nuits passées dans des abbayes ou des monastères, avec des hommes en robe, ce qui était très amusant, ils finirent dans une oasis en Toscane, aux portes du désert, dans un pays où les gens parlaient une drôle de langue.

La Nouvelle Église Convergente savait faire beaucoup de choses, mais essentiellement par habitude et reproduction de rites dont elle avait perdu l’origine. Avoir à gérer un phénomène angélique n’était pas dans ses cordes. Ils avaient récupéré, sans vergogne et sans limites, le contrat pour deux raisons. La première était de s’assurer de la non-divinité du machin et donc de pouvoir continuer sans souci leurs activités.

Aussitôt, Uriel fut soumis à nouveau à des examens dans tous les sens. Comme la fois précédente, les éminents spécialistes ne détectèrent rien d’autre comme particularité que ses ailes. Les hauts responsables entendirent ces gens très savants et en conclurent que, puisque les voies de Dieu étaient impénétrables, ne rien trouver prouvait absolument son origine divine. Aussitôt, d’autres hauts responsables en déduisirent le contraire : il n’y avait rien à craindre d’un phénomène naturel, bien qu’inexpliqué. Le résultat était raté, puisqu’un schisme faillit se produire entre ceux qui y croyaient et ceux qui rejetaient. La sagesse ramena la paix et chacun sur ses positions.

Un autre groupe se questionnait sur les résultats de l’analyse génétique et, particulièrement sur le télomère du chromosome 28 qui faisait apparaitre quatre lettres : F A T M. Le problème était la signification de ce mot, car la seule explication proposée par LIA était : French Army Trade Mark. Ce qui voulait dire que c’était un modèle déposé par l’armée française qui n’existait plus depuis que la PAV était devenue présidente de l’Europe et de la Russie Réunies. Les militaires, avaient-ils découvert, ou créé ces monstres, espérant en plus les doter d’un exocerveau, ce qui expliquait le faible niveau intellectuel du phénomène dans sa version de base ?

Le mieux, dans le doute, était d’enfouir cette information et de préparer le gamin à une reprogrammation génétique pour effacer ces traces et d’éventuelles demandes de redevance ou de droits de propriété.

Ils étaient nombreux à découvrir leur achat et les possibilités de ce nouveau produit. Il n’y avait pas que de bonnes surprises : les projections d’évolution le montraient très laid et repoussant à l’âge adulte, ce qui était inconcevable pour un porte-parole divin. Heureusement qu’il y avait les robots esthétiques, capables de vous remodeler corps et visage. Ils avaient lancé une vaste étude et les profileurs automatiques avaient dressé le portrait de l’Ange idéal pour la majorité du monde entier, y compris pour la foultitude des minorités déviantes, ou non typiques. À part les Inuits juifs et noirs, mais ils n’étaient que onze et en voie d’extinction.

C’étaient là deux chantiers importants ! Certains avaient quand même un peu réfléchi : le phénomène pouvait servir de représentation physique pour la NEC. Si l’idée du pape virtuel et immortel avait été une idée de génie, puisqu’il pouvait converser intimement avec des milliers de fidèles simultanément et infiniment, son absence dans les grandes occasions créait un vide. Les anciens symboles morbides n’étaient plus vendeurs, puisque l’apocalypse approchait. Positionner l’Ange comme incarnation de la NEC était une évidence. Son rattachement éternel à la NEC ne fut pas abordé.

Enfin, il restait la question de l’organisation. Un Synode de l’Ange Spécial fut mis en place, le SAS, réunissant soigneusement les deux obédiences et les deux genres de la NEC, puisque chacune des parties avait séparé les femmes des hommes. Il fallait aussi tenir compte des origines, des compétences et une liste de 127 membres fut établie. Le dernier serait nommé ultérieurement, un décès s’étant produit pendant les pourparlers. La première réunion plénière permit de définir des règles et d’élire un conseil de 53 membres, en charge de nommer un bureau de treize membres. Ils aimaient ce chiffre de un plus douze, ignorant la participation contractuelle de Matou à venir.

Pendant ce temps, à l’extérieur, les guerres, les épidémies et la misère se répandaient calmement, tandis que les procès se poursuivaient, se croisant dans tous les sens pour tenter de casser le contrat et d’évaluer les dédommagements. La justice pataugeait, n’ayant pas les moyens internationaux nécessaires à cette complexité. À la surprise générale, ce fut le premier point résolu : un simple référé, suivi d’un rescrit, mit fin à l’ensemble des procédures. La main occulte du nouveau contractant dans la culotte du PAV fut évoquée par des journaux à scandales, sans preuve.

Adepte du secret, la NEC n’avait pas encore révélé officiellement la retrouvaille du cher petit ange, préférant jouer sur l’absence, source d’attentes et d’espoirs. De toute façon, l’humanité, pour sa grande partie, était repartie sur les questions essentielles : comment survivre.

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