Chapitre 2
Je me suis endormi. Réveillé par les gargouillis de mon estomac, j’ouvre les yeux et m’assois sur le lit. Ma tête me tourne et la douleur de la faim est plus insupportable que jamais. Je ne suis jamais resté aussi longtemps le ventre vide, même lorsqu’elle… Non, n’y pense pas. Je n’ai même pas bu un verre d’eau, même pour prendre mes pilules.
Je tourne la tête et aperçois un plateau avec un sandwich, une bouteille d’eau et un verre de lait. J’en reste pantois. Je me jette dessus, affamé. Ce repas, même frugal, me fait un bien fou. Tant au corps qu’à l’esprit : quelqu’un s’est enfin soucié de moi.
Ne te fais pas d’illusions… Elle est payée pour ça !
Douche froide. Effectivement, Stéphanie ne s’occupera pas de moi gratuitement. Tout a un coût dans la vie. Combien ma vie vaut-elle ? Pas grand chose à mon avis… Mon regard est attiré par un morceau de papier coincé sous le verre.
Bon appétit !
C’est tout. Ces deux petits mots ont réussi à réchauffer mon coeur endolori. Pourtant ce n’est pas grand chose. Il fait nuit noire… et je n’ai plus sommeil. Je me sens un peu nauséeux… J’enfile un sweat à capuche et sors de la maison, aussi discrètement que possible. La rue est on ne peut plus éclairée : des lampadaires en veux-tu, en voilà. Je rabats la capuche sur mes yeux et avance droit devant moi.
La maison se situe dans un quartier résidentiel, tout bien rangé et propre. Cela me change de celui de mon appartement de banlieue… Je contourne le premier pâté de maisons et y découvre… exactement le même. Je soupire.
Vraiment rien d’intéressant.
Je fais demi-tour, espérant trouver autre chose… Mais quoi ? J’avance lentement dans ce qui devait être une rue marchande. Quelques boutiques ici et là mais elles ne semblent plus ouvertes : de nombreux cartons et autres déchets s’accumulent devant les rideaux métalliques poussiéreux.
Un peu plus loin, une enseigne lumineuse attire mon attention : “Akuma Club”. Un bar semble-t-il. L’enseigne est très bien travaillée : une démone auréolée aux courbes exacerbées, à la peau rouge et peu vêtue chevauche une harley noire aux ailes blanches, la langue sensuellement posée sur sa lèvre supérieure.
Le designer a beaucoup de goût.
Je suis comme hypnotisé mais n’ose pas approcher. Je détourne les yeux avant de continuer ma route. Un peu plus loin, je me retrouve sur un terrain vague, faiblement éclairé, entouré de buissons épineux. Sur la gauche se trouve un enchevêtrement d’arbustes et d’arbres plus ou moins dégarnis, donnant au tout un air de fin du monde, que j’apprécie réellement. À droite, une montagne de déchets a été déposée là, à même le sol, sans que personne ne semble y faire attention.
Ça fait un peu désordre dans ce petit quartier de bourges !
Je me dirige vers les bois, à peine visible sous la demie lune. Derrière le look apocalyptique des premiers arbres, je suis surpris d’en découvrir d'autres plus verts et disons plus accueillants. Je m'y enfonce un peu plus. Les arbres deviennent de plus en plus grands. Je remarque un cyprès aux feuilles d'un vert tendre et m’approche. Il est énorme, tellement que je ne peux faire le tour du tronc avec mes bras. Son cœur a été coupé, sûrement pour une fête de Noël quelconque… Sur son écorce, il a de nombreuses écorchures : et des je t’aime un tel ou encore des cœurs enflammés avec des initiales à l’intérieur…
Inutile…
Je me sens comme cet arbre : meurtri. Je décide d’y monter et me retrouve là où la scie a dû passer pour le couper en deux. Le tronc est assez large pour que je m’y assoie. Je laisse donc pendre mes jambes et appuie mon dos contre l’arbre blessé. Mes mains sous ma nuque, je laisse mon esprit vagabonder en regardant le ciel sombre parsemé d’étoiles.
Qu’est-ce que je fais là ? Que vais-je devenir ? Je ne sais pas. Je n’ai pas eu à me poser ces questions ces trois dernières années : mon seul et unique but était que l’on ne découvre pas ma situation. Maintenant que c’est fait… Je suis perdu. Complètement. Je n’ai plus ni famille, ni maison. À quinze ans, je me retrouve abandonné. Seul.
D’après ce que j’ai compris, le juge a fait une recherche pour savoir si j’avais de la famille. Dans mes souvenirs, il me semble que papa avait une soeur et elle n’a rien fait pour me venir en aide. Personne ne s’est soucié de ce que je suis devenu après le décès de mon père. J’ai vécu ces trois dernières années dans une espèce de brouillard : chaque jour était un combat pour cacher la vérité.
Et maintenant ?
Une douleur sourde s’empare de ma poitrine : un mélange de tristesse, de détresse, de sentiment d’abandon. Des grosses larmes débordent de mes yeux et roulent sur mes joues, je laisse mon chagrin sortir et pleure encore et encore. Assis sous ce ciel sans lune, je hurle cette douleur d’une voix rauque. Je ne sais pas quoi faire pour l’atténuer.
Je déteste être comme ça, si fragile, si pathétique. Je finis par m’écrouler sur mon arbre, exténué. Je hoquète misérablement et mon nez coule. Je tâte mes poches à la recherche d’un mouchoir… et trouve ma boîte de pilules.
Et si…
Je la secoue et la place devant mes yeux : elle est encore pleine. Si je la finissais, pourrais-je mourir ? J’ai bien envie d’essayer. Je l’ouvre…
- Tristan ! Tristan ? Tu es là ?
La voix de Stéphanie.
Elle… me cherche ?
Je réalise que je ne sais même pas quelle heure il est. Personne ne s’est jamais soucié de moi : j’entrais et sortais comme bon me semblait. C’est quelque chose de normal, non ?
- Tristan ? Si tu es là réponds-moi, s’il te plaît !
Il y a un petit quelque chose dans sa voix qui me fait réagir. Je descends de mon arbre et me dirige vers elle. Elle porte un vieux jean élimé et un T-shirt dix fois trop grand pour elle. Munie d’une lampe torche, Stéphanie avance pas à pas dans la forêt… en pantoufle. Dès qu’elle me voit, elle accourt vers moi… et me gifle, avant de me prendre dans ses bras.
- Seigneur ! Pardonne-moi de t’avoir frappé mais tu m’as fichu une de ces trouilles !
De… de quoi ?
Je suis tellement perdu que j’en oublie la douleur de sa claque. Elle a eu peur mais pourquoi ? Elle prend mon visage en coupe et me regarde droit dans les yeux.
- Quoi ? Ne me dis pas que tu ne comprends pas pourquoi j’étais inquiète !
Devant mon air ahuri, je crois qu’elle finit par deviner que, effectivement, je ne comprends pas. Elle pousse un soupir exaspéré.
- Ces crétins m’ont bien dit la vérité à ce que je vois…
Mon coeur se serre…
La vérité ?
- Je t’ai entendu descendre… J’ai tout d’abord cru que tu voulais te servir quelque chose dans la cuisine… Au bout d’un moment, ne percevant pas tes pas dans l’escalier, je suis allée voir. Quelle n’a pas été ma surprise de voir la porte d’entrée ouverte et pas de Tristan ! J’ai bien cru que tu t’étais enfui !
Son discours est allé crescendo : elle a presque hurlé sa dernière phrase. Je reste pantois : cette femme, que je connais à peine, s’est inquiétée de me savoir dehors en pleine nuit ? C’est bien ça ? Les larmes me montent aux yeux.
- Ne pleure pas mon Tristan… Viens, rentrons à la maison.
Mon ?!
Elle me prend par les épaules et me tire doucement. Je réalise que son toucher ne me dérange pas : il est est chaud et doux. Stéphanie garde le silence tout le long du trajet retour. Sous la véranda, Arnold est debout, faisant les cent pas.
- Ah ! Vous voilà enfin ! Tout va bien garçon ?
Il est en bas de pyjama et pantoufles. Perplexe, je lui fais signe que oui.
- Bien… Bien… Allons nous coucher. Nous en parlerons au petit déjeuner demain matin. Je compte sur ta présence, garçon !
Je n’ai pratiquement pas dormi le reste de la nuit. Arrivé dans ma chambre, j’ai constaté qu’il était plus de deux heures du matin. Je me suis posé sur mon lit et j’ai attendu. À cinq heures pétantes, Arnold s’est levé et préparé. Une demi-heure plus tard, j’entendais Stéphanie dans la salle de bain en face de ma chambre. Je n’ai toujours pas compris ce qui les a poussé hier soir. Et qui plus est, je dois descendre prendre le petit déjeuner avec eux. Mes sentiments sont mélangés dans ma tête et je ne sais quoi penser.
TOC. TOC.
Je m’assois sur le lit lorsque Stéphanie pousse la porte.
- Tu viens ? Nous t’attendons pour le petit déjeuner.
Je décide d’essayer… Après tout, qu'est-ce que j’ai à perdre ? Je passe par la salle de bain et constate que Stéphanie a recouvert le miroir d'une serviette. Je la remercie silencieusement de cette attention et me débarbouille rapidement. Je descends lentement les escaliers et m’arrête devant la porte de la cuisine. Spacieuse, elle dispose de plusieurs placards crème et d’une table en bois clair entourée de six chaises. Arnold sirote son café et Stéphanie s’affaire aux founeaux.
- Il te faut une invitation, garçon ?
Je lève la tête vers cet homme à la carrure vraiment imposante et m’avance lentement.
- Tu prends quoi au petit déjeuner ? me demande Stéphanie.
Je ne prends jamais de petit déjeuner…
En fait, je ne saurais dire la dernière fois que j’en ai pris un… Sûrement à l’époque de papa, où maman me servait toujours un lait chocolaté chaud et des biscuits ou viennoiseries. Mon coeur se gonfle… Avant qu’il n’aie le temps d’exploser, Stéphanie pose un mug rouge fumant devant moi.
- Café au lait… Tu me diras si tu aimes ou pas ! Le sucre est sur la table si jamais. Perso, je n’en mets pas !
- Comment peut-on vivre sans sucre ? commente Arnold. Non… Mets-en au moins une cuillerée, garçon. Tu verras, c’est meilleur.
Cet échange est pour le moins surprenant. En tout cas pour moi. Ce genre de badinage a été exclu de mon quotidien depuis tellement longtemps que je ne sais pas comment réagir. Je porte le mug à mes lèvres et grimace : c’est amer.
- Ah tu vois ! Vive le sucre ! jubile Arnold.
Stéphanie lève les yeux au ciel avant d’ajouter une cuillère de sucre à mon café au lait. Je le goûte à nouveau et il est nettement meilleur.
- Ça y est tu es content, pas vrai Arnold ? Depuis le temps qu’on essaie de le convertir au café sans sucre avec Rey… Il a fini par trouver un allié !
Ils se mettent à rire en chœur. Je ne peux même pas sourire, tellement je me sens étranger à tout cela. Comme si tout se déroulait dans un monde à part du mien. Je ne serais qu’un spectateur lambda qui regarde passer les jours heureux d’un couple aimant. Arnold se racle la gorge. Je sens que ce qui va suivre ne va pas me plaire.
- Garçon. Il va falloir parler de ce qui s’est passé hier soir. Bon, quand je dis parler… J’ai bien compris que pour le moment tu ne sais plus, n’ose plus… Enfin bref. Tu es bloqué.
J’hésite. Est-ce que… Non. En fait non. Je ne veux pas leur parler. Pas encore. Je le regarde fixement. Les yeux d’Arnold sont durs : un frisson désagréable me parcourt.
- Écoute. Je vais être direct. As-tu voulu t’enfuir ? Parce que dans ce cas…
- Arnold ! Soit plus gentil ! proteste Stéphanie.
Je secoue la tête avec véhémence. M’enfuir ? Je n’y ai même pas songé. Pour aller où de toute façon ? Personne ne veut de moi. À nouveau mon cœur se gonfle et j’essaie de masquer mon trouble. Les couleurs autour de moi se ternissent et mon estomac s’est fermé. Je ne peux plus rien avaler. Je n’ai qu’une envie c’est qu’un gouffre s’ouvre sous mes pieds et m’engloutisse.
Je me lève et cours vers ma chambre. Le sang tambourine dans mes tempes, ma respiration est saccadée et ça me fait mal. Ma tête me tourne et quelque chose de familier se forme : tous mes sentiments se mélangent pour ne former qu’un amas tourbillonnant dont je suis prisonnier. Je suis terrifié. En tremblant, je sors ma boîte de pilules et en prends deux. Le temps que la substance fasse effet… Et…
Ça y est… je me sens… libre…
- Regarde-le… Arnold… La prochaine fois, laisse-moi lui parler… Ce petit est encore fragile…
- Stéphanie… Tu sais ce que je pense de tout ça ! Nous avons peut-être réussi à sauver Rey mais en ce qui concerne ce gosse…
- Tsss… J’en fais mon affaire.
J’ai rêvé ? Des bribes de conversation me reviennent à l’esprit. Ma tête est lourde. Je ne sais pas comment mais je suis allongé dans mon lit sous mes couvertures. Je tourne la tête et découvre à nouveau un plateau. Sous le verre, un petit mot.
Arnold est allé travailler. Je suis sortie faire quelques courses. Envoie-moi un message à ton réveil.
Bises.
Stéphanie.
Un message ? Mais je n’ai… Ah si. En plus du sandwich et du verre de lait, Stéphanie a ajouté un téléphone. Ni neuf, ni vieux. Je le prends en main : je n’en ai jamais eu un. Les autres au collège oui, je crois bien avoir été le seul à ne pas en avoir. Je regarde l’heure. 13h50. Je soupire.
Va falloir que tu te bouges le cul !
Une voix. Dans ma tête. Je vais finir par croire que je suis fou. Ce n’est pas la première fois que ça m’arrive. Mais là… C’est différent. Je ne sais pas pourquoi…
Oui. Il va falloir que je me bouge le cul. Mais comment ? Pour commencer, peut-être par sortir de cette chambre ? Je prends mon téléphone et envoie un message à Stéphanie. Je tape. J’efface. Je recommence ce manège au moins trois ou quatre fois. Finalement, je le relis et appuie sur le bouton envoyer. Je le range dans ma poche.
Je sors faire un tour. Merci pour le sandwich et le téléphone.
Avant que le courage ne s’enfuie, je le ressors et envoie aussi : “Non. En fait, merci pour tout.” La réponse ne se fait pas attendre : “Il n’y a vraiment pas de quoi. Fais attention à toi. A ce soir.”
Je souris bêtement à mon téléphone.
Je ne sais vraiment pas où aller. Je marche un peu sans but pour en définitive arriver à mon arbre. L’endroit est si calme, rien ne perturbe le silence sinon le chant de quelques oiseaux ici et là… Je monte en son sein et retrouve ce qui j’en suis sûr va devenir mon refuge. Je m’allonge sur le tronc.
L'après-midi passe et soudain le roulement d’un orage se fait entendre : de lourds nuages noirs se profilent à l’horizon et je peux apercevoir la lumière des éclairs. Ce bruit m’apaise et je me laisse bercer. Le spectacle est magnifique : j’adore les temps d’orage. Les nuages s’amoncèlent doucement mais sûrement.
La pluie commence à tomber : tout d’abord fine, elle se durcit au fur et à mesure. Se faisant diluvienne, elle m’oblige à rentrer. Sous le porche, une serviette est accrochée à un clou : je la prends et me sèche tant bien que mal. J’enlève mon sweet détrempé… Mon T-shirt me colle à la peau...
Et merde... Pas ça...
Tout à coup une paire de bras m’enlace pour me plaquer contre un corps chaud bien que mouillé, coupant court à mes sombres pensées. Estomaqué, je lâche la serviette mais cette fois je ne peux réellement produire aucun son. Son visage dans mon cou, il respire mon odeur.
- Mmh… Oui. Tu es bien un mec… De dos, avec ta petite taille gracile, je t'ai pris pour une fille… me susurre une voix grave, tout près de mon oreille.
Danger !
Mon esprit me hurle de me dégager mais j’en suis parfaitement incapable. Durant les cinq secondes qu’a duré ce… - ce quoi d’ailleurs ? - mes sens ont pris le dessus sur ma rationalité. Ses mains larges sur mon ventre m’ont réchauffé instantanément. Sa voix si grave, si près de mon oreille… mon corps entier s’est recouvert de chair de poule. Mes mains se sont mises à trembler et j’ai même fermé les yeux pour… laisser s’échapper un accès de colère qui, selon moi, arrive bien trop tard. Je me débats et cherche à frapper cette personne qui me retient contre mon gré.
- Doucement, petit lion !
- Lâche-moi !
Son étreinte se desserre et j’en éprouve comme un pincement. J’entends son rire enfantin. Stéphanie sort de la maison, un peu inquiète, je crois. J’ai juste le temps d’apercevoir une veste en cuir noir se faufiler dans la pièce.
- Tristan ? Tristan tout va bien ? J’ai cru... C'était toi ? J'ai bien entendu ta voix ?
Je secoue rageusement la tête et pointe le doigt vers la personne qui vient d’entrer. Un mélange de sentiment tourbillonne en moi : colère, gêne mais aussi un étrange froid. J'ai du mal à expliquer ce que je ressens... C'est... étrange...
- Rey ! Je t’avais demandé d’être sympa avec lui !
- Ma, je n’ai fait que lui dire bonjour voyons ! répond-il avant de rire à nouveau, en secouant ses cheveux mouillés.
Stéphanie lui lance un regard furibond.
- Très bien, très bien, Ma ! Promis, je ne le ferai plus crier ! En tout cas, j’essaierai… fait-il, en lui (me ?) faisant un clin d'œil.
- Insupportable, cet enfant.
Pendant cet échange, je prends le temps de détailler le fameux Rey. Grand, les cheveux mi-bouclés noirs de jais avec quelques mèches rouges ici et là, il a les oreilles percées, les lobes et les cartilages. De là où je suis, je peux voir qu’il a au moins quatre boucles à chaque oreille. Dans son cou, deux chaines en argent sont posées sur un T-shirt blanc avec un dessin que je n’arrive pas à bien percevoir. Lorsqu’il tourne à demi sa tête vers nous, ses yeux me transpercent. L’un marron très clair, presque doré et l’autre bleu cristallin, presque blanc, comme ceux qui ont perdu la vue… Son sourire est taquin et lorsque Stéphanie le réprimande, il l’enveloppe d’un regard doux avant de lui tirer une langue percée elle aussi.
- Tu n’as pas osé ! Rey ! Pas la langue !
- Je vais à la douche !
Il s'enfuit sans demander son reste. Je reste interloqué par cette apparition qui, il y a deux minutes à peine, a fait naître des sensations inédites dans mon corps et dans ma tête.
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