Stéphanie

Tristan ne me semblait pas en forme aujourd’hui… Rey non plus d'ailleurs… J’ai bien remarqué qu’ils sont plus que synchronisés ces deux-là ! Soit ils vont bien tous les deux soit ils vont mal ! C’est assez incroyable…

Tu ne crois pas que…

Cela fait quelques jours que j’essaie de faire taire cette voix… J’ai bien remarqué les sourires, les œillades… Se pourrait-il qu’ils soient plus que des amis ces deux-là ? Difficile à dire… Rey a toujours été très secret sur ses amours et Tristan est passé par tellement de moments difficiles ces dernières années que je me demande s'il n’a jamais connu ce sentiment…

Oh, il y a bien eu Lydia : je vois bien qu’elle s’accroche mais Rey ne l’a jamais regardée comme une potentielle petite amie, elle est plus comme une petite soeur à ses yeux, rien de plus.

• Aïe !

Perdue dans mes pensées, je me suis encore piquée. Impossible de me concentrer sur ma broderie ce matin : le visage troublant de Tristan est encore gravé sous mes paupières. J’espère qu’il ne fera rien de stupide. Il a déjà attenté à sa vie et je soupçonne qu’il ait voulu recommencer le jour où Lydia a fait son apparition. Bien sûr, je n’ai jamais eu le fin mot de l’histoire.

Je dois avoir confiance en lui.

Oui. Il faut que je crois en lui. Il est capable du meilleur…

DDDRRIINNGGG ! DDRRIINNGG !

• Où est-ce que j’ai posé ce fichu téléphone !! Nom d’une carotte ! Ah ! Le voilà. Allô ?
• Oui, bonjour Mme Renaud ?
• Elle-même, répondis-je, un brin inquiète.
• Oui, c’est la vie scolaire. Je vous appelle au sujet de l’absence de Tristan ce matin ?
• Son absence ? - mon coeur s’est refroidi. - Il doit y avoir une erreur… Je l’ai déposé moi-même au lycée ce matin…
• Je suis désolée madame, je suis allée vérifier personnellement dans sa classe avant de vous appeler. Mme Luxus a été très claire à son sujet.
• Je… Très bien. J’essaie de le joindre et je vous rappelle.
• Merci, au revoir madame.

Seigneur… J’espère que…

Je compose le numéro de Tristan. Une sonnerie. Deux. Trois. Quatre… Messagerie. Je réessaie. Une fois. Deux fois. Rien. L’anxiété commence à m’envahir…

Pitié… Je ne veux pas perdre à nouveau un petit…

Je monte dans sa chambre et ouvre son placard. Ses pilules ne sont plus là. Même celle de “secours”. Les mains tremblantes par je ne sais quel pressentiment macabre, j’appelle Arnold. Il a toujours été de bon conseil. Il décroche dès la première sonnerie, comme à son habitude.

• Allô ? Que se passe-t-il chérie ?
• Arnold… Je… Tristan… - j’inspire un grand coup pour me calmer - Tristan n’est pas allé en cours ce matin. Le lycée vient de m’appeler.
• Ne tire pas de conclusion hâtive veux-tu ? Commence par faire le tour des endroits qu’il serait susceptible de fréquenter. Ensuite nous aviserons. Je dois faire une ronde avec les gars dans la forêt, j’en profiterai pour jeter un œil. Ne t’en fais pas, il ne doit pas être loin.

Je savais pourtant qu’il n’allait pas bien ce matin. Je m’en veux de l’avoir laissé partir… Je pars à sa recherche. Rien. J’arpente les rues et ruelles pendant deux heures, sans succès. Je passe devant la maison des Turner.

Étrange… Où va Ritchie avec sa grosse valise ? Tsss… Je n’ai pas le temps pour ça !

Je me décide enfin à appeler la seule personne qui n’est pas encore au courant. Rey saura peut-être… Lui aussi est sur messagerie.

Dites-moi que c’est une blague…

Je regarde l’heure : il est midi. Rey est sûrement en pause déjeuner. Je le rappellerai plus tard. Je ne lâche pas l’affaire et continue mes recherches.

Il est presque deux heures de l'après-midi et je n’ai aucune nouvelle. Je réessaie pour au moins la millionième fois d’appeler son portable : il ne sonne même plus et bascule directement sur messagerie. Je lui envoie un message. Aucun accusé de réception. Comme pour les six ou sept derniers.

Que faire ? Dois-je appeler la gendarmerie ? Je ne sais pas… Je ne sais plus…

Tristan… Où es-tu ?

Mon téléphone sonne. C’est Arnold.

• Allô ?
• Ma chérie… Je… Une jeune femme a vu quelqu’un se jeter du haut du pic du Diable… Il y a une heure environ.

Mon corps s’effondre et mon cœur lâche.

• Allô ? Allô ? Mina ? Nous ne sommes pas sûrs que ce soit Tristan ! J’ai quand même préféré te le dire avant que tu ne l’apprennes par la radio. Je dois m’y rendre. Je te rappelle plus tard. Mina ?
• Oui… oui je suis toujours là. Quelque soit les nouvelles… Je t’en prie… Tiens moi au courant.
• Promis.

Je vous en prie… Faites que ce ne soit pas lui… Par pitié… Non…