Deux manières de voir...
À l'heure où fraîchit l'aubépine dans le parc endormi. À l'instant où le char céleste pointe ses rayons d'or au-dessus de l'horizon et tandis que l'aurore aux doigts de rose éveille doucement la nature et les elfes des bois. À ce moment sacré où le sublime côtoie le divin, le monde de la nuit s'efface lentement et fait place à une nuée de rossignols et de fauvettes qui s'élancent vers les cieux en inondant l'espace de leur chant séraphique. À ce moment précis, j'ai une vision... Une déesse, une reine de beauté tout de blanc vêtue. Elle me fait face, debout sur son chariot de feu tiré par quatre licornes aux crinières flamboyantes. Elle me sourit tendrement, étend son bras en direction de l'horizon et d'une voix cristalline, me dit :
— Que le nouveau jour qui se lève soit pour vous l'aube d'un temps nouveau ».
Je tourne le regard vers le lointain et je suis aspiré par la féerie du paysage qui s'offre à moi. Un ciel sans nuage d'un bleu limpide s'étend au-dessus d'une clairière à la végétation luxuriante, j'éprouve aussitôt une béatitude ineffable. Mais, le bruit discret d'une bulle de savon qui éclate me détourne de cette vision olympienne. Devant moi, flotte dans l'air une missive parfumée déposée par l'oracle. Que me réserve cette journée qui s'ouvre sous de tels augures ?
***
À huit heure pétante la courriériste, visiblement de mauvais poil, entre dans le bureau en poussant un chariot bourré de lettres et de paquets. Elle marmonne un vague bonjour puis hoche la tête et pointe un doigt en direction de la fenêtre « z'avez-vu le temps pourri qu'on a encore aujourd'hui ! », je suis son regard et je vois la pluie qui tombe dru sous la grisaille. Puis la porte claque, je me retourne et je découvre sur mon bureau un monceau de dossiers et de courriers à traiter.
« Encore une journée de merde qui commence... » me dis-je.
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