Eh bè été, cong...
Une de ces magnifiques matinées d’été, suffisamment avancée pour laisser exploser toute la palette de ses dorés et pas encore assez chaude pour te faire regretter de porter des habits de ville.
Tu passes par le petit parc avant de te rendre au bureau. Tu adores déambuler dans ses allées et profiter de la fraîcheur des plans d’eau. Tu flânes, ton journal sous le bras, dégustant par petites lampées la tranquillité du lieu. Sous un tilleul, un peu à l’écart du passage, un banc de pierre semble t’inviter à la pause. Comme tu as encore du temps devant toi, tu t’assois, prends tes aises et plonges un œil distrait dans les nouvelles du jour.
Tu viens juste d’ouvrir les "pages internationales" quand des battements d’eau affolés rompent le silence quelque part dans ton dos. Tu te retournes. Au milieu d’un bassin peu profond, une enfant effrayée tente désespérément d’atteindre le bord d’une eau où elle n’a pas pied. Elle semble épuisée, même plus la force de crier. Entre deux coulées, ses grands yeux noirs se fixent désespérément sur toi.
Pas âme qui vive aux alentours, ni parents ni badauds. Comment cette gamine a-t-elle pu arriver là ? Tu hésites un instant, enlever chaussures et pantalon ou sauter tout habillé dans l’eau ? La première solution, le temps de se rhabiller te ferait sûrement arriver en retard au travail, la seconde t’obligerait à passer la matinée tout mouillé.
Prenant brusquement une décision, tu détournes la tête, replies soigneusement ton journal et après avoir épousseté ton pantalon, tu te remets en route, déjà concentré sur les problèmes professionnels et domestiques que tu auras à résoudre dans la journée.
Derrière toi, à la surface de l’eau du bassin, les dernières bulles éclatent en cercles concentriques.
Plus tard dans la matinée, tu repenses à la noyade de cette gamine avec une pointe de regret. Pourquoi n’as-tu pas sorti ton téléphone portable et filmé la scène ? Tu te souviens alors que ta feuille de choux est dans une poubelle, jetée négligemment dès la sortie du parc et que décidément, le journaliste des "pages internationales" avait beaucoup de talent.
Annotations
Versions