Eve et le désert
Elle erre, le désert s’étend vers l’est, sec, éternel, extrême. Le vent se lève, et elle, bergère en herbe, rentre prestement ses chèvres. Les bêtes bêlent et elle les presse. Elle entre et ferme. Les lèvres sèches, elle tremble et désespère, elle déteste ce genre de vent, ces tempêtes véhémentes. Elle prend le temps de se remettre, d’enlever le grès et le sel de ses vêtements, se sert le verre espéré et cherche ses bébés. Elle les prend, les berce, les serre tendrement. Le père les déserte et se repent de ses péchés en ce désert. Ses recherches zélées de clémence restent en déshérence. Elle, elle perd le sens de ces messes, elle préfère rester, élever ses chèvres et ses bébés replets, le reste est dément, écervelé. Espérer, c’est jeter des germes devers le désert. Elle se relève, repense, se remet en tête le déclenchement de cet enfer terrestre.
Elle regrette tellement ses péchés, ses errements. Le serpent d’eden, ses verbes zélés, ses serments empressés et pervers, et elle, tentée, bernée, cède. Et de ses lèvres, de ses dents, elle se délecte de ce dessert de rêve. Le secret de ce péché s’évente et l’être éternel se présente, énervé, les éjecte d’eden et les enferme en ce désert. Terre de sel, herbe rèche, chèvres grèles et semences desséchées. Et les éléments effrénés, le vent en tête. C’est sévère, pense-t-elle, perplexe. Le fret des règles lésées, le revers des défenses excédées. L’éternel est tel le désert, ferme et entêté. Respect, révérence, messes et présents engendrent échecs et détresse. Être clément ? Les êtres célestes semblent préférer se venger vertement et lentement.
Elle en est l’exemple, elle, Eve, femme pécheresse, ses errements de genèse en legs, de femmes en femmes, éternellement. Femmes des temps présent, rejetez ce père éternel et ses légendes de péché, de ce ventre et de ce sexe est née cette belle espèce, femmes et mecs mêlés, êtres frêles et éphémères en recherche de berger.
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