RENAISSANCE Chapitre 22
Chapitre écrit par "Agathe"
Le niveau du liquide descend lentement, depuis vingt minutes. L’instant de vérité est proche. Quelques minutes encore, et le corps d’Iliéna sera complètement débarrassé du liquide nourricier qui l’a maintenue en vie.
— Toutes ses fonctions seront-elles opérationnelles ?
— Tous les tests ont été positifs, il ne reste plus qu’à matérialiser l’efficacité de l’interface bionique.
— Un cliquetis au tableau de bord : maintenant....Le compte à rebours final était amorcé...Six..Cinq..Quatre...Trois...Deux...Un...
La coque transparente se soulève avec la confiance d’un coquillage dans son milieu naturel, offrant au regard de ses congénères une perle dissimulée.
Le corps nu d’Iliéna est totalement offert au regard de Lhiréa. La lueur de celui de Lhiréou avait quitté ses yeux...Seul subsiste son enveloppe, confortablement installée dans le fauteuil de commande. Son esprit vient de fusionner avec celui d’Iliéna.
— Un léger souffle d’air s’engouffre dans la coque en remplacement du liquide de survie. Il fait tressaillir la peau pâle du magnifique corps encore immobile. Un frisson provoque une onde douce sur l’épiderme mouillé.
L’index de la main droite d’Iliéna effectue un mouvement saccadé, suivi immédiatement de son pouce, et d‘un seul coup son poing se referme, entraînant du même coup une contraction de tout son bras. Les muscles fonctionnent parfaitement.
Dans les cinq minutes qui suivent, les deux bras, puis une jambe, sont animés de mouvements anarchiques...puis plus rien...le calme plat pendant quelques secondes interminables.
Ont-ils trop demandé à ce corps humain en l’équipant de l’interface bionique ? Pourtant Lhiréa sent que la créature terrestre est en mesure de se réveiller, il le faut...
Les gardiennes de vie se doivent de réussir pour comprendre le fonctionnement de ces terriens qui dévorent leur planète...
Elle décide de tenter une connexion avec sa sœur et de vérifier ainsi l’efficacité de l’interface bionique.
— Lhiréou, tu me ressens ? Raconte-moi, ce qui se passe ? Lui transmet-elle, légèrement anxieuse. Pendant quelques minutes qui lui semblent une éternité, aucun signal ne filtre entre leurs deux esprits. L’interface ne fonctionne peut-être pas aussi parfaitement qu’elles l’ont prévu ?
— Oui Lhiréa, je suis avec toi, mais je ne peux pas encore bouger, répond Lhiréou mentalement à sa sœur. Je sens des fourmillements dans tout mon corps, j’ai l’impression d’être envahie d’une multitude de picotements qui me poussent à mobiliser mes bras et mes jambes, mais je ne peux pas les mouvoir. C’est très désagréable. Peux-tu quelque chose pour moi Lhiréa ?
— Il faut attendre encore que l’effet du réveil musculaire d’Iliéna s’améliore. Ne t’inquiète pas et laisse-toi faire Lhiréou.
Comme pour donner raison à Lhiréa, la tête d’Iliéna se tourne brutalement vers l’extérieur de la coque, et deux yeux bleu clair s’ouvrent simultanément ; deux yeux étonnés encore humides, bordés de longs cils recourbés, d’un noir de jais.
Une naissance a lieu ! Différente du mode de naissance sur Leaurélia. Mais Lhiréa sait que les naissances se produisent autrement dans cette espèce.
Le processus de réveil se poursuit . Iliéna presque souriante, s’assoit un instant au bord de l’habitable transparent. Elle jette un regard circulaire, le temps de prendre toute la mesure de l’endroit où elle se trouve : une pièce quasi vide uniquement équipée d’un appareil complexe muni d’innombrables boutons de commandes. Lhiréou a l’impression de redécouvrir le vaisseau avec les yeux d’Iliéna, alors qu’elle le connaît parfaitement.
Elle se met debout, vacille légèrement et s’accroche au bord de la coque pour se rattraper. Le liquide dans sa longue crinière blonde, a dessiné de douces boucles qui retombent souplement jusqu’au bas de ses reins. Les rondeurs blanches qui apparaissent au travers des mèches éparses paraissent d’une texture plus fragile que la matière qui recouvrait le corps des Leauréliens.
— Cette créature est absolument sublime, pense Lhiréa. Quelle chance tu as Lhiréou, de vivre cette expérience unique. !
Mais l’envie n’est pas un sentiment qu’éprouvent les Gardiennes de la Vie. Elle sourit à l’idée que sa sœur vit en cet instant les sensations d’une femelle terrestre. Elle en est heureuse pour elle.
Iliéna fait un quart de tour vers une porte restée entrouverte. Ce mouvement dévoile sa poitrine menue, ornée de curieux bourgeons rose clair dont l’extrémité s’est dressée sous l’effet de la fraîcheur ambiante.
Lhiréa observe attentivement chaque réaction de ce corps à la fois ressemblant, mais pourtant tellement différent dans ses réactions aux éléments extérieurs, de celui des Leauréliennes. La sensation de froid leur est étrangère.
— Quelle curieuse impression transmet Lhiréou à sa sœur, en laissant glisser le bout de ses doigts sur la peau claire.
Elle regarde avec curiosité ces drôles de petits poils qui se relèvent sous l’effet du froid.
— Tu sais ce que cela signifie ? Lhiréa.
— Je crois que c’est le froid qui provoque cette réaction sur la peau d’Iliéna.
Les yeux d’Iliéna semblent chercher quelque chose. Elle découvre sur la droite, ce qui semble être un tissu souple qui recouvrait une console en deux parties. Elle prélève le tissu soyeux qu’elle plie en deux et le place en écharpe autour de ses épaules. Cela ne cache en rien la nudité de sa poitrine, mais elle n’en a cure. L’important est d’avoir chaud...En tant que nouvelle née elle ne connaît pas encore l’interdit.
Règne-t-il la liberté sur cette planète ? Se demande Lhiréa. Elle se souvient que sa sœur lui a raconté les désastres écologiques occasionnés par ces humains dans la mer. Elle comprend que sur Terre, la liberté s’exerce à des degrés divers, selon qu’on parle du corps ou de ses actes.
La deuxième partie de la soie transparente utilisée se transforme en pagne. D’une façon absolument naturelle, Iliéna a recouvert la toison blonde qui dessinait un triangle sur la zone située sur le bas de son ventre, juste entre ses jambes.
— Les femelles terrestres ont de curieux attributs, se dit Lhiréa en souriant malgré elle.
La main d’Iliéna se porte avec naturel sur cette partie de son corps, laissant le bout de ses doigts vagabonder.
— Oh ! C’est extrêmement doux. Lhiréou est excitée par cette perception inconnue. Elle se dit que les terriennes ont bien de la chance ....
D’un pas plus assuré, la jeune femme se dirige vers la porte, la franchit en souplesse, et se dirige vers une deuxième porte sous laquelle filtre une lumière clignotante. L’humaine fait preuve de curiosité...intéressant...
— As-tu ce sentiment Lhiréou ?
Sa sœur a complètement investi le corps et l’esprit d’Iliéna, et ne répond rien...
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