Chapitre douze : ... Noël arriva.

10 minutes de lecture

25 décembre 2020

-André...

Ce fut le premier mot, le premier nom qu'Adrien prononça à son réveil. Le seul qui comptait...

-Je suis là, mon amour.

Le jeune homme ouvrit les yeux pour découvrir son tendre amant à ses côtés, blotti contre lui, un bras passé autour de sa taille, le regard encore ensommeillé et presque incertain. Ne résistant pas à cette vision adorable et désirant détruire la légère peur qui pouvait peut-être encore subsister dans ses yeux, Adrien se jeta sur lui, déposant de fougueux baisers sur ses lèvres, son front, ses joues...

-Je t'aime ! Je t'aime ! Je t'aime ! Je t'aime tant !

André le serra fort contre lui, riant de joie face à ses paroles et son attitude passionnée. Ils roulèrent sur le lit avant de s'immobiliser, retrouvant leur calme face au bonheur des retrouvailles. Adrien avait posé sa tête dans le cou de son amant, respirant avec délectation son odeur mélangée à son parfum. Son compagnon caressait tendrement ses cheveux, la bouche sur son front. Il n'y avait plus qu'eux deux au monde et c'était tout ce qui importait.

Adrien se souvenait de ses précédentes vies. C'était toujours étrange de s'endormir en tant qu'un autre et puis de se réveiller avec tous ses souvenirs revenus. Heureusement, dans chacune de ses vies, il avait la même personnalité, la même façon de penser et lorsqu'il se souvenait de tout ou presque, - la mémoire étant sélective, certains détails peu importants sur toutes ses vies vécues étaient parfois oubliés -, il ne changeait pas. Il était toujours Guillaume mais aussi Baptiste, Fabrice et Adrien. Ce fut en repensant à sa dernière vie qu'il se figea en réalisant quelque chose d'important.

-Tu l'as rachetée.

-Quoi ?

-La maison ! Tu as racheté notre belle maison de Normandie !

-Bien sûr ! Même si nous avons été heureux en Suisse, elle représentait beaucoup pour nous ! Elle était notre nouveau départ, elle symbolisait notre vie à deux après nos retrouvailles. Nous y étions bien, près de l'océan comme nous le désirions. Un peu à l'écart des autres pour pouvoir vivre notre amour sans subir la haine des gens. Nous l'avions choisie ensemble, nous y avions fait les travaux ensemble et nous l'avions décorée ensemble. J'ai aimé notre maison en Suisse mais ce n'était pas la même chose. Elle était déjà construite entièrement, pas de modifications à faire, pas d'océan et dans une patrie qui n'était pas la nôtre... Quand tu m'as quitté pour renaître en France, je suis parti et je l'ai rachetée. J'y ai apporté de la modernité mais j'ai gardé tels quels les travaux que nous y avions mené. C'est notre marque, notre signature qui signifie autant qu'un cœur gravé dans la pierre !

Adrien était tellement submergé d'émotions qu'il ne put que lever la main et lui caresser tendrement le visage, n'ayant pas les mots pour exprimer ce qu'il ressentait. André se baissa et déposa un bref baiser sur ses lèvres.

-Descendons déjeuner ! J'ai un cadeau pour toi ! s'exclama tout d'un coup ce dernier.

Sur ses paroles, il descendit du lit et tendit la main que le jeune homme attrapa. Ils se rendirent à la cuisine et le sourire aux lèvres, André entreprit de préparer le premier repas de la journée.

Tout aussi souriant, Adrien qui se tenait debout contre le chambranle de la porte, le regardait s'affairer dans la cuisine. Malgré les années, il y avait réellement quelque chose de familier. En cet instant précis, il n'avait pas l'impression que vingt-sept ans étaient passés durant lesquels ils avaient été séparés. Ils étaient de nouveau réunis !

Mais même ainsi, durant ce doux moment, il se sentait toujours un peu confus en ayant tous ses souvenirs de ses précédentes vies. En pensant à ce qu'était encore son quotidien, hier au phare avec son cha...

-FRANCIS !

André releva la tête, les yeux interrogateurs.

-Mon chat est tout seul depuis le début de soirée d'hier ! Il ne faudra pas que l'on tarde trop ! Il ne doit plus rien avoir à manger et...

André ne put s'empêcher de rire. Il se sentait si apaisé ! Tout était redevenu normal. L'homme qu'il aimait, était de nouveau à ses côtés et il n'aurait pu être plus heureux !

-Eh ! Ne te moque pas de moi ! s'exclama Adrien, les bras croisés avec un air faussement outré.

Le bel homme aux longs cheveux bruns qui lui tombaient désormais sur les épaules et lui donnaient un air encore plus sexy, son élastique ayant dû glisser durant la nuit, coupa le gaz et s'approcha d'Adrien. Il l'enlaça tendrement et posa ses lèvres contre son front avant de laisser tomber sa tête dans son cou.

-Ne m'en veux pas mais tu es si adorable que je ne peux m'en empêcher ! Dans presque toutes tes vies, je te retrouve avec un chat dont tu prends soin. Tu ne changes pas et je t'aime.

Adrien sourit et se blottit contre lui, savourant l'instant.

-Tu n'avais pas un présent pour moi ? demanda-t-il, taquin.

Il sentit les mains de son compagnon descendre le long de son dos jusqu'à ses fesses qu'il empoigna franchement en plaquant son bassin contre le sien.

-André... protesta-t-il, les joues plus rouges qu'une tomate bien mûre.

Il en avait envie, bien évidemment ! La dernière fois qu'ils avaient partagé ces moments intimes était bien loin... TROP loin ! Mais il se sentait encore un peu perdu et il désirait tant savourer entièrement ce moment avec l'homme qu'il aimait !

Avec douceur et compréhension, André déposa un baiser sur sa joue et se détacha de lui.

-Je sais, mon amour... Je sais que tu es encore un peu embrouillé. Nous n'avons même pas encore pris notre petit-déjeuner ni même pris une douche. Commençons déjà par là, tu te sentiras mieux après.

Un peu gêné alors qu'il savait pourtant qu'André comprenait parfaitement que ses idées, ses pensées n'étaient pas encore très claires, son cerveau devant gérer toutes les nouvelles informations apparues en une nuit, il le regarda mettre la table. André y déposa ses fabuleux pancakes dont il avait le secret. Il y avait vraiment des choses qui ne changeaient pas et c'était tant mieux !

Les deux amants mangèrent avec appétit. Adrien n'osa pas redemander pour le cadeau qui lui était destiné. Il avait compris que l'instant serait spécial. Ce n'était pas à lui de le provoquer mais à André de décider quel moment serait le plus opportun.

Lorsque ce dernier monta pour aller prendre une douche et après quelques secondes d'hésitation, le jeune homme ne put s'empêcher de finir par le rejoindre au grand étonnement de son compagnon qui fut ravi de cette surprise. Pourquoi y aurait-il une quelconque gêne entre eux ? Ils se connaissaient depuis si longtemps !

Ce ne fut que caresses et baisers tendres et passionnés. Ils se livrèrent pleinement sans rien se cacher dans un plaisir des sens qui furent assouvis lorsque leurs mains descendirent respectivement sur le corps de l'autre, leurs regards ne se lâchant pas pendant que les sensations s'amplifiaient jusqu'à les emporter...

L'heure du départ finit par arriver. Adrien se sentait bien mieux ! Quelques heures étaient passées depuis son réveil. Ils avaient mangé, parlé, fait l'amour sous la douche... Comme avant. Et ce fut main dans la main et le sourire aux lèvres qu'ils se rendirent jusqu'au phare dans lequel un chat mécontent d'avoir été laissé seul les accueillit en miaulant sans s'arrêter.

-Oui, je sais, Francis ! Excuse-moi ! Je ne pensais pas partir si longtemps, dit le jeune homme en attrapant son petit chat noir qui se mit à ronronner.

Il lui donna sa pâtée, de la viande et changea son eau. Le mimine se mit à tout dévorer avec contentement. Lorsque Adrien se retourna après une dernière caresse, se fut pour découvrir les yeux d'André posés sur lui et qui le dévoraient littéralement. Ce regard.... Il faisait toujours autant chavirer son cœur.

André avança vers lui sans dire un mot. Il sortit une petite boîte de sa poche et en retira son médaillon. Le cœur d'Adrien s'accéléra. Son précieux médaillon ! Créé pour lui par l'homme qu'il aimait et qui à chaque fois qu'il le quittait contre sa volonté, le gardait et en prenait soin jusqu'à ce qu'il revienne dans sa vie... C'était un gage, une promesse qu'il l'attendrait.

Un grand sourire illuminant son visage et le cœur rempli d'émotions, Adrien laissa André lui mettre le médaillon autour du cou. À peine le geste accompli, il l'attrapa et le détailla comme s'il le voyait réellement pour la première fois depuis longtemps. Et c'était le cas... Il se remémora le moment où il l'avait découvert chez son compagnon plus de deux semaines auparavant et se rappela avec douleur les pensées qui avaient été les siennes, sa déception mais aussi le mal qu'il avait fait sans en avoir conscience à l'homme qui possédait pourtant son cœur.

Adrien releva la tête, prêt à parler de ce qui s'était passé ce jour-là et à s'excuser mais il fut stoppé lorsqu'il vit André poser un genou sur le sol en tenant une autre petite boîte noire dans sa main. Ce dernier l'ouvrit et quand il découvrit ce qu'elle contenait, Adrien en lâcha le médaillon qui retomba sur son torse, près de son cœur.

-André ?

-Adrien Gauthier, l'homme que j'aime plus que tout au monde, plus que ma propre vie. Toi qui partages mon existence compliquée depuis plus de deux siècles, me feras-tu l'honneur de devenir mon époux ?

Les larmes envahirent les yeux du jeune homme. En quelques heures, il s'était passé tant de choses ! Tellement d'émotions le submergeaient !

-Oui ! Oui ! Oui ! Oui, je veux devenir ton mari !

Dans un sourire qui illumina le phare plus que ne l'aurait fait une lanterne allumée en pleine nuit, André lui passa au doigt, l'anneau symbolisant leur prochaine union. Adrien le détailla et ne fut pas surpris de découvrir une petite inscription. Deux « A » étaient liés dans le signe de l'infini. André et Adrien. Contrairement au médaillon qui contenait les initiales d'André et de Guillaume, cette fois-ci, son nouveau prénom y figurait. Et ça le touchait. Après tout, il était aussi bien Guillaume que Fabrice que Baptiste et qu'Adrien ! Et dans leur nouvelle vie ensemble, ils allaient pouvoir s'unir comme n'importe quel couple et symboliser, officialiser leur amour ! Vivre en tant qu'époux ! Ne plus se faire passer pour des frères et se cacher ! Enfin ! Malgré tout ce qu'ils avaient vécu, c'était réellement nouveau. Alors le choix de son dernier prénom marquait cette nouvelle vie qui commençait pour eux deux !

Le jeune homme se jeta dans les bras d'André qui s'était relevé et le serra le plus fort possible, ayant encore du mal à croire à son bonheur.

-Je t'aime ! Je t'aime tellement ! s'écria le jeune homme.

Le grand sourire de son fiancé lui répondit et des lèvres douces ne tardèrent pas à venir s'emparer des siennes. Ils s'embrassèrent au milieu des décorations de Noël qu'Adrien avait récemment ajoutées, habillant le phare d'une parure de fête, comme l'était cet instant qu'ils vivaient. À ce moment de joie, ils ne se doutaient pas qu'un autre bonheur les attendait...

Deux cents années étaient passées depuis que le pacte avait été engagé. Les deux hommes ne le savaient pas encore mais le prix était désormais payé. Ils ne le comprendront qu'une douzaine d'années plus tard lorsqu'Adrien qui sera arrivé à l'âge de quarante ans, se rendra compte que contrairement à ses précédentes vies, les quelques rides et cheveux blancs habituels ne venaient pas se marquer sur son visage et son cuir chevelu.

Cela faisait bien quelques années qu'il s'était aperçu qu'il ne changeait pas mais il avait d'abord pensé que c'était tout simplement dû à son hygiène de vie de cette époque et les crèmes qu'il utilisait. La vie était moins rude qu'autrefois, il était donc normal de vieillir moins rapidement ! Mais à un moment, il ne pouvait plus en douter. Quelque chose avait changé. Que ce soit André ou lui-même, aucun des deux hommes ne vieillissaient malgré les années qui passaient. Pour le plus âgé, ce n'était pas nouveau mais pour Adrien, ce n'était pas anodin...

Ils entreprirent alors des recherches sur le calice familial qu'André possédait toujours et gardait en lieu sûr. Ils ne trouvèrent qu'un vieux manuscrit expliquant qu'il existait toujours un prix à payer lorsque l'on passait un pacte. Un souhait exigeait un prix. Mais ce dernier n'était pas éternel et selon ce prix, la vie de la personne qui avait passé le pacte pouvait prendre une bonne tournure. Tout dépendait du souhait et des paroles prononcées. L'exemple de l'ancêtre d'André et de la fin qu'elle et sa compagne avait connu en attestait.

En le découvrant, les deux époux furent réellement soulagés et submergés de bonheur. Ils pouvaient enfin être réunis pour toujours comme ils le désiraient depuis si longtemps ! Vivre sereinement dans une époque qui sans être parfaite, loin de là, pouvait tout de même et contrairement à ce qu'ils avaient connu jusqu'alors et leur avait coûté temporairement la vie, accepter leur amour ! Et si un jour, un autre pacte devait être accompli, bien qu'avec tout ce qui s'était passé, ils feraient en sorte que cela n'arrive pas, ils possédaient le calice et désormais, un manuscrit expliquant son fonctionnement et les risques encourus. C'était leur roue de secours car rien n'était sûr dans ce monde... Mais la leçon avait été apprise. Et l'avenir leur paraissait ainsi moins périlleux que ce qu'ils avaient déjà vécu.

Le jour de Noël avait été source de douleur pour les deux hommes. Puis source de bonheur à chacune de leurs retrouvailles. Aujourd'hui, il devenait le symbole d'une nouvelle vie. D'une vie dans laquelle André et Adrien ne seraient plus jamais séparés. Malgré la souffrance et les obstacles, l'amour avait enfin triomphé…

FIN

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