Encore un énième débat sur l’immigration blanche. C’était sa faute s’il n’y avait plus de travail. C’était sa faute si l’insécurité avait augmenté. C’était sa faute si la culture nationale n’existait plus. C’était de sa faute et celle de catholicisme si la laïcité était mise à mal. C’était sa faute si sous toute la société et ses instituions mourraient. Elle était le mal des maux. Ce qu’il avait fuit revenait au galop. La peste brune. Il éteignit la télé. La salle de détente était vide. Son cours n’allait pas tarder à commencer. Il fallait se préparer. De son sac, il sortit un petit carnet bleu marine ou des notes étaient gribouillées. Le petit Grégory, sa dyslexie et son sourire qui naissait de jour en jour. Le sourire d’nu gamin ça valait la terre entière, avait dit un grand poète français. Il avait bien raison. Il regarda par la fenêtre. Le soleil était haut dans la poussière des routes. A cette heure, Edgard devait dormir, Lhouka dealait depuis deux heures et la Maine devait être à sa troisième histoire racontée à des touristes qui la payaient pour ça. Vivement dans trois ans ou ils recevront le droit de travailler. Tout ça pour payer le loyer d’un petit studio. Heureusement qu’ils étaient tombés sur la Mimi, leur logeuse et voisine de palier avec qui ils s’entendaient bien. Grincheuse comme leur vieille acolyte, alcoolique de confession et descendante de migrant de La Rochelle, elle les dépannait régulièrement.

- Tiens, une lettre du procureur, lui tendit Finah dans l’entrebâillement de la porte.

- Merci.

Il y a deux mois, le préfet l’avait conduit en justice pour vice de procédure dans la gestion de son dossier de demande de papiers. Le procureur devait trancher l’affaire. Croisons les doigts. De son côté Virgil n’avait plus donné de nouvelles. Ça allait faire deux ans. Depuis qu’il l’avait quitté à la Hierkro Jarmol. Peut-être qu’il était à la capitale, assit dans un canapé, une bière à la main, chez son cousin. Peut-être qu’il était en train de se faire couler dans une dalle de béton.