20 décembre, Chloé

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A.R

Après tant d'activités, il est grand temps de se sustenter. Marie Noëlle mère m’a conseillé sur le chemin du retour de faire une halte dans un hôtel quatre étoiles. Ce luxe était au dessus de mon budget, le salaire de commissaire aurait pu tout au plus me payer le dessert. Alors celui d’inspecteur, même à cette heure, ne me garantissait qu’une simple tartine. Ne vous moquez pas, j’adore cette gourmandise, une tranche de pain grillé où s'étale une couche de beurre cachée sous une montagne de confiture de figues. Un petit péché que m’accordait ma grand-mère pendant mes vacances au bord de la mer.

En attendant, je suis devant ce palace qui plus est ne me laisse pas de glace. Marie Noëlle mère a tout prévu dans les moindres détails. Je suis reçue en princesse, le groom me presse pour que je regagne l'intérieur de la forteresse. Dans le hall, chaque chose est à sa place, chaque espace a été pensé avec subtilité. Je reste sans voix devant ce palais des merveilles aux milles facettes. Un jeu de lumière diffuse au travers des cristaux une ambiance féerique. Le temps d’un hiver, cet édifice éphémère est sorti de terre pour émerveiller l'enfant qui en nous se terre pour faire taire l’adulte.

Je flâne dans les couloirs aux couleurs scintillantes, aux voûtes immaculées et aux sculptures impressionnantes. Le lieu est unique, les superlatifs me manquent. Le granit a cédé sa place aux blocs de glace. Depuis mes premiers pas en Laponie, je ne compte plus les “waouh” qui traversent mon esprit. Le plus étrange dans cette expérience, mon esprit s’envole dans tous les sens.Ce monde fascinant gomme mes tracasseries qui jusque-là me pourrissent la vie. Ce territoire vierge m'offre une page blanche où je pourrais être entière. Je ne secoue plus la boule de neige, je ne regarde plus au travers, je suis à l’intérieur. N’allez pas penser que je suis sa prisonnière, bien au contraire je me sens enfin libre de respirer.

Après la découverte, tout aussi fabuleuse de ma chambre, je me rends au restaurant pour un dîner au coin du feu. Je débute le repas par une savoureuse soupe crémeuse de carottes, fromage fumé et oignons croustillants. Hum, un délice pour mes papilles, chaque cuillère est un bond en arrière, un saut de puce dans la cuisine de grand-mère. À l'époque, sur la pointe des pieds, sur mon tabouret, devant l’évier, j'épluchais les légumes du potager. Avec papy, au petit matin, accroupi dans la terre, nous les avions ramassés dans la rosée, écartant les escargots de notre chemin.

Pour le plat principal un saumon frit au feu de bois, pommes de terres lapones rôties et poireaux est un mariage heureux pour mon palais. Tout en appréciant les mets, je sais avec qui je souhaiterais les partager. Dès qu’il sera à nouveau sur pied , je kidnapperai William pour qu’il puisse profiter de cette expérience inoubliable. À deux, le lieu est d'autant plus merveilleux, le couple à la table voisine en est une parfaite image. Je n’en reviens pas de ressentir de plus en plus son absence et le dessert me rappelle le nombre incalculable de fois où nous avons dîné en tête à tête au bureau ou en planque dans la voiture. Il est le roi de la mousse au chocolat. Dès que le temps le lui permettait il m’en confectionnait un petit pot juste pour me faire plaisir.

**

  • À table, lance avec enthousiasme Marie Noëlle mère à ses invités.
  • Oui, oui nous arrivons, répondent à l’unisson Élodie et Augustin.
  • Ça sent divinement bon, ajoute William tout guilleret.
  • Eh bien jeune homme, vous me semblez requinqué, sourit Marie Noëlle, le grand air vous a redonné des couleurs.
  • Mes gardes du corps ont su se montrer persuasifs et je les en remercie. Cette balade dans les bois et la neige fut très plaisante.
  • Maintenant, il faut te remplumer, je sais que les repas à l’hôpital ne sont pas des plus goûteux, aussi j’ai demandé à mon amie Dame Tartine de concocter des pikkujoulu, se réjouit Marie Noëlle.
  • Goute donc ce glögi, suggère Élodie en lui tendant son verre de vin chaud épicé.
  • Mais avant de te l’enfiler, manger quelques biscuits sablés, conseille Augustin.
  • À ce rythme, il sera sur pied pour Noël, se réjouit Marie Noëlle mère, nous n’aurons plus qu’à l’emballer.
  • Quelle charmante idée, après nous irons faire les boutiques, lance Élodie en prenant le bras de son voisin qui la dévore des yeux.
  • Vous pensez que c’est prudent ? tente timidement William.
  • Oh que oui, tu as besoin d’une nouvelle garde robe, fini les chemises d’hôpital ou les tenues trop amples de mon ami Alvar.
  • Bien madame, acquiesce William.
  • Avant de nous lancer dans cette expédition somme toute passionnante, prends donc un peu de cet excellent riisipuuro, ce riz au lait est à se damner, valide Augustin en léchant le bol sous le regard amusé d’Élodie.

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