Chapitre 10 : Des Ruines et des Révélations

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Ériger une existence sur Terre en tant qu'ange exilé, sans mémoire complète ni certitude quant à sa mission, était à peu près aussi amusant que de marcher pieds nus sur des tessons de verre. C'est-à-dire, pas du tout.

Depuis notre affrontement contre les émissaires du Dévoreur, Elias et moi avions traversé des villages déserts, des forêts lugubres, et des montagnes battues par le vent. Chaque paysage semblait poser une question différente : Pourquoi es-tu là, Cédriciel ? Pourquoi continues-tu d’avancer alors que rien ne te guide vraiment ?

Et si je devais être honnête, je n’avais aucune réponse. Juste cette sensation persistante qu’il y avait un but, quelque part, enfoui sous des couches de doutes et de souvenirs fragmentés.

Nous avions atteint un plateau rocheux qui surplombait une vaste plaine. La vue aurait pu être inspirante si elle n’avait pas été troublée par l’orage qui grondait à l’horizon.

Elias s’arrêta pour examiner le ciel sombre. « Ça approche. »

— « Le Dévoreur ? » demandai-je.

Il hocha la tête. « Ou quelque chose de pire. Continue à avancer, je vais explorer les environs pour m’assurer que nous ne sommes pas suivis. »

Avant que je ne puisse protester, il avait déjà disparu dans les ombres. C’était son truc, apparemment : apparaître, disparaître, et me laisser seul avec mes pensées.

Je descendis lentement vers la plaine. L’air devenait plus lourd à chaque pas, comme si le monde lui-même était en deuil.

Et c’est alors que je le vis.

Un homme assis près d’un feu éteint, vêtu d’une cape sombre, une épée appuyée contre son genou. Sa silhouette semblait usée, comme si elle portait tout le poids de la misère humaine.

— « Tu es perdu, toi aussi ? » lança-t-il, sa voix rauque.

J’hésitai. Cet homme avait quelque chose de familier, mais je ne pouvais pas dire quoi.

— « Peut-être. Et vous ? »

Il haussa les épaules. « Je ne suis qu’un vestige d’un monde qui n’existe plus. Mais toi… tu es différent. Je le vois dans tes yeux. Tu cherches quelque chose, mais tu ne sais pas encore quoi. »

Je m’assis à une distance prudente. « Et qu’est-ce qui vous fait dire ça ? »

Il esquissa un sourire triste. « Parce que je te ressemble plus que tu ne le crois. »

L’homme, qui se présenta sous le nom de Kael, m’indiqua un sentier qui menait à une série de ruines anciennes.

— « Si tu cherches des réponses, elles sont peut-être là-bas. Mais attention : ce lieu est dangereux. Il dévore ceux qui s’y aventurent avec de mauvaises intentions. »

— « Génial, un autre endroit qui veut me tuer, » marmonnai-je en me levant.

Kael éclata de rire, mais son visage redevint sérieux presque instantanément. « Si tu as besoin d’aide, appelle-moi. »

Je hochai la tête et pris la direction qu’il m’avait indiquée.

Les ruines n’étaient pas visibles au premier abord. Elles étaient dissimulées dans un creux, couvertes de vignes et de pierres effondrées. Une étrange énergie semblait pulser dans l’air, comme un cœur battant au ralenti.

Chaque pas que je faisais résonnait dans le silence. Les murs autour de moi étaient gravés de symboles que je ne pouvais pas comprendre, mais qui me semblaient étrangement familiers.

Soudain, un fragment de mémoire me frappa comme un éclair.

Je me vis debout dans un temple similaire, entouré d’autres anges. Nous chantions, une mélodie qui faisait vibrer les étoiles elles-mêmes. Mais quelque chose s’était mal passé. Une explosion de lumière, suivie d’un cri. Puis le néant.

Je me penchai contre un mur, haletant.

— « Qu’est-ce que c’était ? » murmurai-je, comme si le mur pouvait me répondre.

Mais au lieu de réponses, un rugissement retentit dans les profondeurs des ruines.

Le rugissement se transforma en un grondement sourd. Le sol sous mes pieds trembla, et une créature gigantesque surgit d’un tunnel obscur.

C’était une chose informe, une masse d’ombres tourbillonnantes avec des yeux rouges perçants. Elle semblait faite de la même matière que les émissaires que nous avions affrontés, mais beaucoup plus grande et beaucoup plus… affamée.

— « Un autre obstacle, génial, » soupirai-je en serrant la plume dorée.

La lumière de la plume s’intensifia alors que je la brandissais devant moi. La créature hésita un instant, comme si elle reconnaissait cette lumière.

— « Tu ne m’arrêteras pas, » déclarai-je, bien que ma voix tremblait légèrement.

La créature répondit par un rugissement assourdissant et chargea.

Le combat fut chaotique. La plume, répondant à ma volonté, créa des éclats de lumière qui repoussèrent la créature à plusieurs reprises. Mais elle revenait toujours, plus féroce à chaque attaque.

— « Allez, réfléchis, réfléchis… » me dis-je à moi-même en esquivant une autre attaque.

Soudain, un souvenir refit surface : une incantation, une formule ancienne que j’avais utilisée autrefois.

Je fermai les yeux et laissai les mots venir à moi.

— « Lux et tenebrae, unum fiant ! »

La plume réagit immédiatement, émettant un faisceau de lumière pure qui frappa la créature en plein cœur. Elle hurla, son corps d’ombre se dissipant lentement.

Quand le silence revint, je m’effondrai à genoux, épuisé.

Alors que je récupérais mon souffle, une lueur attira mon attention. Un petit artefact était apparu là où la créature s’était tenue : un médaillon d’or orné des mêmes symboles gravés sur les murs.

Je le ramassai, sentant une étrange chaleur émaner de lui.

Un autre fragment de mémoire me frappa. Cette fois, c’était une voix : celle d’Elara.

— « Trouve les clés, Cédriciel. Elles te mèneront à la vérité. »

Je serrai le médaillon dans ma main, sentant une détermination renouvelée.

Kael avait raison : ces ruines contenaient des réponses, mais elles étaient loin d’être complètes.

Quand je rejoignis Elias, il me lança un regard interrogateur.

— « Tu as trouvé quelque chose ? »

Je hochai la tête, brandissant le médaillon. « Une piste. »

Il sourit légèrement. « Alors allons-y. »

Alors que nous quittions les ruines, je ne pouvais m’empêcher de sentir que ce médaillon n’était que le début. Il y avait d’autres clés à trouver, d’autres vérités à dévoiler.

Et peut-être, juste peut-être, elles me mèneraient enfin à Elara — et à la lumière qui m’attendait au bout de ce chemin tortueux.

Le médaillon semblait avoir une vie propre. À chaque pas que je faisais, je sentais une pulsation douce, comme le battement d’un cœur. Elias jetait des regards inquiets sur l’objet, mais il ne disait rien, comme s’il savait que je devais être le premier à parler.

Quand le silence devint insoutenable, je pris une inspiration. « Ce médaillon… il a un pouvoir. Je le ressens. »

Elias hocha lentement la tête. « Ce n’est pas qu’un pouvoir, Cédriciel. C’est une pièce d’un tout. Et si tu ressens son énergie, c’est parce qu’elle t’appelle. »

— « M’appelle pour quoi ? » demandai-je, frustré.

Elias s’arrêta et me fixa. « Pour te rappeler ce que tu as perdu. Pour t’aider à retrouver ce que tu cherches. Mais attention… ces clés ne te donneront pas seulement des réponses. Elles demanderont quelque chose en retour. »

Sa réponse me donna des frissons. Je serrai le médaillon plus fort, comme si je pouvais le forcer à me parler.

— « Et si je ne veux pas payer ce prix ? » murmurai-je.

Elias ne répondit pas. Il recommença à marcher, me laissant seul avec mes doutes.

Après plusieurs heures de marche, nous arrivâmes à un petit village abandonné. Les maisons en pierre semblaient intactes, mais il n’y avait aucun signe de vie. Pas de bruits d’animaux, pas de vent qui soufflait. Juste un silence lourd et pesant.

— « Encore un endroit accueillant, » grognai-je.

Elias inspecta les environs avec précaution. « Reste sur tes gardes. Ce n’est pas un hasard si le médaillon t’a conduit ici. »

Nous avancions lentement, scrutant les maisons vides. Les rues étaient jonchées de restes de vie quotidienne : une brouette renversée, des jouets d’enfants abandonnés, des vêtements suspendus qui n’avaient pas été touchés depuis des années.

Puis, un son brisa le silence.

Un faible murmure, presque imperceptible.

Je tendis l’oreille, essayant de localiser l’origine. « Tu as entendu ça ? »

Elias dégaina son épée. « Oui. Et je n’aime pas ça. »

Nous suivîmes le murmure jusqu’à une petite place centrale. Au milieu se trouvait un puits en pierre, entouré de fleurs fanées. Le médaillon dans ma main se mit à vibrer plus intensément.

— « Génial, le puits hanté, » murmurai-je.

Avant qu’Elias ne puisse répondre, une ombre émergea lentement du puits. Elle avait une forme vaguement humaine, mais ses contours étaient flous, comme si elle n’appartenait pas entièrement à ce monde.

— « Qui ose troubler le repos des âmes perdues ? » demanda-t-elle d’une voix grave et éthérée.

Elias s’interposa immédiatement entre moi et la créature. « Nous ne cherchons pas de querelle. Nous cherchons des réponses. »

L’ombre se tourna vers moi, ses yeux vides fixés sur le médaillon. « Cet objet… il ne t’appartient pas encore. »

— « Pas encore ? » répétai-je.

La créature sembla hésiter, puis tendit une main spectrale vers moi. « Pour mériter ce que tu cherches, tu dois affronter ton reflet. »

Avant que je ne puisse demander ce que cela signifiait, l’ombre me toucha.

Je fus projeté dans un tourbillon de lumière et d’ombres, ma vision se brouillant tandis que mon esprit était transporté ailleurs.

Quand je rouvris les yeux, je n’étais plus dans le village. J’étais dans un vaste désert blanc, où le ciel et le sol semblaient se confondre. Devant moi se tenait une silhouette : moi-même, mais différent.

Ce double avait une aura sombre, et ses yeux brillaient d’une lueur rouge.

— « Qui es-tu ? » demandai-je.

Il sourit, un sourire froid et cruel. « Je suis toi, bien sûr. Mais pas le toi que tu veux être. Je suis ce que tu as essayé d’oublier. »

— « Je ne comprends pas. »

— « Tu comprendras bientôt, » dit-il en dégainant une épée noire. « Mais d’abord, tu dois me vaincre. »

Le combat qui s’ensuivit fut le plus difficile que j’aie jamais connu. Ce double connaissait tous mes mouvements, toutes mes faiblesses. Chaque coup que je portais semblait être anticipé, chaque défense brisée.

Mais au fur et à mesure que la bataille avançait, je réalisai quelque chose : il n’essayait pas seulement de me vaincre. Il essayait de me pousser à me souvenir.

Des fragments de mémoire surgissaient à chaque coup : une bataille dans le ciel, des anges tombant autour de moi, une lumière éclatante… et Elara. Toujours Elara.

— « Tu ne peux pas m’échapper, » grogna le double en bloquant une autre de mes attaques. « Tu dois accepter ce que tu es. Ce que tu as fait. »

— « Et qu’ai-je fait ?! » criai-je, désespéré.

Il ne répondit pas. Mais son expression devint plus sérieuse, presque compatissante.

— « Tu verras. Quand tu seras prêt. »

Avec un dernier éclat de lumière, il disparut, me laissant seul dans le désert.

Quand je revins à moi, j’étais de retour dans le village, allongé près du puits. Elias se tenait au-dessus de moi, l’air inquiet.

— « Tu es enfin réveillé. Tu as été inconscient pendant des heures. »

Je me redressai lentement, le médaillon toujours serré dans ma main. Il brillait faiblement, comme si quelque chose en lui avait changé.

— « J’ai vu… quelque chose, » murmurai-je.

Elias posa une main sur mon épaule. « Tu n’es pas obligé de tout comprendre maintenant. Mais ce médaillon t’a choisi, et il t’aidera à te rapprocher de la vérité. »

Je le regardai, puis fixai le médaillon. Une chose était claire : ce n’était que le début.

Le chemin devant moi était encore long, mais je n’étais plus complètement perdu.

J’avais une direction.

Et, avec un peu de chance, j’aurais bientôt les réponses que je cherchais.

Le médaillon continuait à émettre une chaleur étrange, presque réconfortante, mais chaque pulsation semblait également peser sur mon esprit, comme une invitation pressante à avancer. Elias restait silencieux à mes côtés, ses yeux perçant chaque recoin du village déserté.

— « Nous devons partir d’ici, » dit-il brusquement. « Ce lieu n’a pas fini de tester ta volonté. »

Je hochai la tête, mais une part de moi était incapable de lâcher le médaillon. J’avais le sentiment qu’il contenait des réponses. Pas juste sur mon passé, mais sur quelque chose de plus grand.

Alors que nous quittions la place centrale, un murmure me retint.

— « Elias, attends… »

Il s’arrêta et me regarda, tendu. Je me tournai vers le puits. Le murmure était à peine audible, comme un souffle perdu dans le vent.

— « Tu n’entends pas ça ? »

Il secoua la tête. « Non. Et je doute que ce soit une bonne idée de rester ici pour le découvrir. »

Mais quelque chose m’attira de nouveau vers le puits. Je me penchai au-dessus de l’ouverture sombre, le médaillon dans ma main vibrante.

— « Cédriciel… » prévint Elias d’une voix basse.

Trop tard.

Le médaillon brilla intensément, et une vague d’énergie m’aspira dans le puits.

Je m’attendais à l’eau glaciale ou à une chute sans fin. À la place, je me retrouvai debout dans une caverne immense, illuminée par des cristaux luisants qui semblaient s’étendre à l’infini. L’air était lourd, saturé d’une magie ancienne.

— « Qu’est-ce que… ? » commençai-je, mais ma voix résonnait comme un écho infini.

Au centre de la caverne se trouvait un piédestal sur lequel reposait un second médaillon, presque identique à celui que je tenais, mais orné d’un symbole différent. Ce nouveau médaillon émettait une lumière rouge, comme un feu dormant.

Je m’avançai prudemment. Chaque pas semblait réveiller quelque chose d’invisible dans l’air. Des ombres dansaient sur les murs, bien que rien ne bougeât réellement.

Quand je posai enfin ma main sur le médaillon rouge, une voix s’éleva dans la caverne.

— « Tu te rapproches, Cédriciel. Mais es-tu prêt à voir la vérité ? »

Je reculai instinctivement, mon souffle se coupant.

— « Qui est là ? » criai-je, mes mots se perdant dans les échos.

Une silhouette se forma parmi les cristaux. Elle avait l’apparence d’un ange, mais ses ailes étaient noires comme la nuit, et ses yeux brillaient d’une lumière dorée.

— « Tu me connais, même si tu m’as oublié, » dit la silhouette avec un sourire triste.

— « Tu fais partie de mes souvenirs perdus ? » demandai-je.

Elle hocha la tête. « Et de ton futur. »

La silhouette avança, et je sentis une étrange familiarité émaner d’elle. Comme si elle faisait partie de moi.

— « Ces médaillons, » expliqua-t-elle, « sont les clés d’un savoir oublié. Ils te guideront vers les vérités que tu cherches. Mais sois prudent, Cédriciel. Toute vérité a un prix. »

— « Vous voulez dire, encore un prix ? » rétorquai-je, exaspéré.

La silhouette sourit légèrement. « Le premier médaillon t’a demandé de te confronter à ton reflet. Celui-ci exigera que tu te confrontes à ton cœur. »

Je serrai les dents. « Mon cœur ? »

Elle hocha la tête, puis posa une main éthérée sur ma poitrine. « Tu as des choix à faire, des sacrifices à accepter. Es-tu prêt ? »

Je pris une profonde inspiration, regardant le médaillon rouge dans ma main. Je ne comprenais pas encore tout ce que cela impliquait, mais je savais une chose : il n’y avait pas de retour en arrière.

— « Oui, » dis-je finalement.

La silhouette se dissipa dans une lumière aveuglante, et je me retrouvai à genoux, seul dans la caverne. Le médaillon rouge pulsait doucement dans ma main, s’accordant à celui que je portais déjà.

Je me levai, le souffle court, et me dirigeai vers une ouverture que je n’avais pas remarquée auparavant. Un tunnel étroit serpentait dans la roche, illuminé par une lumière lointaine.

Quand je ressortis, Elias m’attendait, les bras croisés, son visage marqué par l’inquiétude.

— « Tu as une tendance incroyable à te mettre dans des situations impossibles, » grogna-t-il.

— « C’est ce que je fais de mieux, » répondis-je avec un sourire fatigué.

Je lui montrai le second médaillon. « Une autre clé. Je ne sais pas encore exactement où tout cela mène, mais… je sais que c’est important. »

Elias observa les médaillons, puis hocha la tête. « Alors il est temps de trouver la prochaine. Mais sois sur tes gardes, Cédriciel. Chaque clé que tu trouves te rapproche non seulement de la vérité, mais aussi de ceux qui te cherchent. »

— « Ceux qui me cherchent ? »

Il esquissa un sourire énigmatique. « Crois-tu vraiment que le Dévoreur est le seul à s’intéresser à toi ? »

Alors que nous quittions le village, un vent glacial s’éleva. Je sentis un frisson parcourir mon échine, comme si quelque chose — ou quelqu’un — nous suivait.

Elias et moi marchâmes en silence, le crépitement des médaillons dans ma main brisant le calme pesant.

— « Où allons-nous maintenant ? » demandai-je.

Elias fixa l’horizon, où les montagnes se découpaient en silhouettes sombres contre le ciel étoilé.

— « Là où la prochaine clé t’appelle. Mais souviens-toi, Cédriciel… chaque étape de ce voyage te changera. Tu ne seras plus le même à la fin. »

Je serrai les médaillons dans ma main, sentant leur énergie pulser à l’unisson. Peut-être que c’était vrai. Peut-être que je devenais quelqu’un d’autre. Mais pour le moment, tout ce que je pouvais faire, c’était avancer.

Et espérer que les réponses que je trouverais en valaient la peine.

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