Mardi 21 mars 2006

Ils quittèrent Mummy en toute fin de journée, ayant voulu profiter au mieux de la vieille dame. Le matin, Mickaël l'avait accompagnée pour faire des courses pour la semaine, pour qu'elle n'ait besoin de rien avant plusieurs jours. L'après-midi, ils avaient rendu une petite visite à John, le neveu de Mummy. Maureen avait pu mesurer, à cette occasion, l'étendue de l'ancienne propriété de Donan MacLeod, du temps où celui-ci était le seul héritier des terres de ses ancêtres et s'était employé à les faire fructifier en étant alors l'un des principaux éleveurs de moutons de la région. Elle comprit aussi que Mummy était demeurée propriétaire de certaines terres, que c'était John qui les exploitait, car en faisant le petit trajet entre la maison de Mummy et celle de John, la vieille dame avait désigné des parcelles d'un côté ou de l'autre de la route et avait mentionné celles qui étaient encore à elle. Maureen avait du mal à évaluer ce que cela représentait. Et elle se demanda ce que ces terres deviendraient quand Mummy ne serait plus là, mais elle espérait aussi que John et son fils pourraient les exploiter encore longtemps, que l'arrangement trouvé pourrait perdurer.

Ils rentrèrent tranquillement à Glasgow, Mickaël conduisit tout le long de la route. Encore une fois, ils sentaient la parenthèse se refermer derrière eux, en franchissant la passe de Glencoe. Quand ils arrivèrent à Glasgow, la nuit était tombée. Ils se rendirent directement chez la jeune femme, pour y passer la soirée et la nuit. Ayant échangé son tour de criée avec le patron pour passer ce mardi à Fort William, Mickaël devait se lever tôt le lendemain. Il espérait ne pas passer trop de temps à faire son choix pour le soir et pouvoir revenir aider Maureen à la réception de sa livraison de fleurs.

Alors qu'il montait leurs petits bagages à l'étage, Maureen s'employa à réchauffer la soupe que Mummy leur avait préparée. Encore une fois, ils n'étaient pas repartis sans provisions et elle avait bien perçu le sourire ravi de Mickaël à l'idée d'emporter une douzaine d'œufs frais donnés par la voisine de Mummy. A cette occasion, la vieille dame lui avait raconté qu'elle avait autrefois un poulailler, mais que c'était un peu trop d'entretien pour elle. Elle n'avait pas repris de poules, laissant les dernières bêtes finir tranquillement leur vie, sans renouveler son petit cheptel. Entre John et la voisine, elle ne manquait pas d'œufs frais et en achetait rarement en ville.

Mickaël mit la table alors qu'elle ouvrait son courrier. Elle avait reçu une lettre de Tara qui lui donnait quelques nouvelles. La jeune femme avait joint aussi trois photos de Brendan et ils purent constater que le bébé grandissait vite.

- C'est fou comme il change ! s'exclama Mickaël. Par rapport aux dernières photos... Là, j'ai l'impression qu'il tient bien son cou droit, maintenant, non ?

- Oui, on dirait, fit Maureen. Et il est bien éveillé. Il a grossi un peu, j'ai l'impression...

- Les nouvelles sont bonnes, sinon ? s'enquit Mickaël en se demandant si Tara avait parlé de leur mère à Maureen.

- Oui, répondit la jeune femme d'un ton léger. Philip et elle vont bien. Elle ne me dit rien de spécial...

Il comprit que Tara n'avait pas mentionné leur mère, et il espérait que les relations avec elle s'étaient apaisées. Dans les derniers échanges que Maureen avait eus avec sa sœur, cette dernière lui avait dit que c'était encore un peu tendu, mais que leur père et Kenneth semblaient avoir réussi à faire entendre raison à leur épouse et mère, afin qu'au moins, elle se montre mieux disposée vis-à-vis de Tara. Quant à renouer le contact avec sa fille aînée, cela, il n'en était bien entendu pas du tout encore question. Mickaël se promit d'ailleurs d'appeler prochainement Kenneth pour parler juste avec lui, mais il voulait d'abord laisser à Maureen l'opportunité d'annoncer sa grossesse à son frère. Il ne savait pas comment Kenneth réagirait - il espérait qu'il apprendrait la nouvelle avec joie -, lui-même ne voulant rien précipiter. L'attitude déplaisante, hargneuse et violente de la mère de Maureen, lors de leur visite à Tara, lui restait bien en mémoire. Et il n'était pas question pour lui de faire ressentir à Maureen stress ou tristesse à évoquer sa famille, en ce moment.