9. Romain
— Alors, comme ça tu es prêt ? Tu as arrêté le boulot, ramené tes affaires chez ton père, rendu les clefs de ton appartement. Tu n'as pas peur d'avoir fait tout ça pour rien et de devoir revenir ensuite ?
— Oui je suis prêt et oui j'ai peur. Merci Théo pour ton encouragement. Mais je n'ai pas peur de devoir revenir si ça ne fonctionne pas. J'ai seulement peur qu'elle ait trouvée quelqu'un d'autre. Qu'elle me mette une bonne claque bien méritée, qu'elle me ferme la porte au nez, qu'elle ne souhaite pas me voir. A part ça tout va très bien. Ah ah... En vérité, je suis stressé.
— C'est bien elle qui t'a envoyé cette lettre alors, pourquoi tu stresses ? On dirait que pour une fois vous avez inversé les rôles, ce n'est plus elle qui a peur de tes réactions mais toi. Tu as peur des siennes, je trouve ça assez comique d'ailleurs.
— N'en rajoute pas non plus, Kevin. Je stresse parce que le temps de tout préparer il s'est passé un mois depuis que j'ai reçu la lettre. Alors il a pu se passer n'importe quoi. Elle pense peut-être que j'ai jeté la lettre ou autre chose encore. Je ne sais pas, il peut s'être passé n'importe quoi en un mois. Même si... On a discuté rapidement par messages.
— Donc tu vas la rejoindre pour de vrai alors ? Ce n'est pas trop tôt. Quand je pense que tu viens de mettre autant de temps à réagir, ça ne m'étonnerait pas si Lucy avait trouvé quelqu'un. Tu sais, un copain. Un copain qui lui répondrait à ses messages et ses appels.
— Tu ne l'écoutes pas Kevin. Il vient de dire qu'ils ont discuté par messages. Sauf que tu ne nous as pas dit le plus important. Lui as-tu que tu la rejoins ?
— Oh d'accord, mais pour l'instant tais-toi, tu veux. Oui je vais la rejoindre et crois-moi, je ne pense pas que Lucy soit avec quelqu'un. Elle m'aurait envoyé un message quand même. Enfin, elle me l'aurait dit ? Non ? Enfin, je sais ce que vous allez dire mais, non. Je ne lui ai pas dit que je prends la route pour la rejoindre.
— Tu es complétement dingue ! Tu crois qu'il va se passer quoi ? Que tu peux te pointer comme une fleur et qu'elle t'ouvrira ses bras ? Dis-moi tu ne serais pas un peu con sur les bords ? Franchement, Romain. Appelle-la ! Qu'est-ce qui t'en empêches ?
— Je sais... J'ai peur qu'en l'appelant, je change d'avis. Et si, elle avait fait ça pour le jeu ?
Oui, qu'est-ce qui aurait pu l'empêcher de le faire pour le jeu ? Elle sait que le pire qu'elle puisse me faire, c'est... Oui, c'est partir. Et elle l'a fait alors qui me dit, qu'elle n'avait pas pensé à ça avant de partir. Je divague sûrement. Lucy, elle en avait marre de notre jeu. En même temps, je l'ai blessé tellement de fois et je l'ai brisé tellement fort. Que je pourrais dire que j'ai presque entendu les cris de son cœur la dernière fois que l'on a joué. Son regard à ce moment-là. Jamais. J'espère que je ne verrais jamais plus ce regard. Tout ça. Parce que Caroline a foutu la merde entre nous. Cette fille, cette plante verte sans le moindre esprit a failli nous séparer. Elle a failli faire disparaître Lucy de ma vie. Je ne pourrais lui pardonner. C'est du passé.
Je m'inquiète, pourtant je sais que Lucy m'attend encore, du moins je l'espère. Sinon, pourquoi elle m'aurait envoyé un message ? Et moi, pourquoi je lui ai répondu ? Je lui ai dit de m'oublier. Mais, c'est moi qui ne peux pas l'oublier. Si, elle ne m'avait pas envoyé de message à ce moment précis, je pense que je serais tout de même parti. J'avais pris la décision avant même de parler à Lucas de la lettre. Comment il pourrait en être autrement ? Honnêtement, je ne sais pas. Comment je pourrais être moi, sans elle ? Il n'y a rien qui puisse me faire changer d'avis. Elle est ce qui fait que je me sens moi. Elle me complète. Etrange, comme façon de penser. Mais Lucy est depuis longtemps ma moitié sans le savoir. Elle m'est indispensable.
— Il est reparti dans ses nuages ! Romain ! Tu nous écoutes ?
— Oui... Non. Je pense à Lucy.
— Pour changer. Enfin, nous on va te laisser. Tu dois te préparer à la route. Il faut vraiment que tu sois prêt à l'affronter. Pas qu'elle soit très robuste face à toi. Mais tu l'as blessé juste avant qu'elle parte donc, attends-toi au pire. Mon pauvre.
— Qu'est-ce qu'elle pourrait bien me faire de toute façon ? Elle est à moi, non ?
— Ne dis jamais ça ! Tu es vraiment dingue. Une fille n'est pas une propriété. Encore moins Lucy. Tu sais bien comment elle est. Toujours à te contredire, toujours à s'énerver contre toi. Mais elle est aussi toujours prête à te pardonner.
— Donc ce que vous me dites, toi et Théo, c'est que Lucy va m'engueuler. Puis elle me tombera dans les bras ? C'est ça, votre conclusion ?
— En gros, mais je pense plutôt que tu vas en baver avec elle. Tu as intérêt de te battre. Tu vas devoir te battre pour elle. Te battre comme tu ne l'as jamais fait pour personne. Est-ce que c'est clair ? Parce que votre relation, elle est peut-être compliquée. Mais là, c'est sûr, elle va changer. Si, elle t'a écrit c'est pour une raison. Crois-tu qu'une fille qui a été brisé en mille morceaux se donnerait la peine d'écrire à la personne qui l'a brisé sans raison ?
— Non, Mais...
— Rien. C'est elle et tu le sais. Elle a toujours été comme ça avec toi. Alors ouvres les yeux, tu veux bien. Ne la perd pas à nouveau. Avec Kevin, on est d'accord sur le fait que si là, tu la perds. Alors se sera la fin. Tu ne pourras plus la récupérer. Alors sois sûr de toi. Ne l'éloigne plus de toi, parce que c'est ta dernière chance.
— La flamme n'est pas éternelle...
— Quoi ?
— C'est Lucy qui m'a dit cela en fermant la porte le jour de son départ. Je lui criais dessus et la seule chose qu'elle a prononcé. C'est cette simple phrase. « La flamme n'est pas éternelle, alors ne souffle pas trop fort, tu risques de l'éteindre pour toujours ». Maintenant, je comprends ce qu'elle voulait dire.
— Elle est plus maligne que toi, cette petite.
Oui, elle est beaucoup plus maligne que moi. Et ça depuis bien longtemps. J'ai compris que le jeu allait commencer le jour où elle est entrée dans ma chambre pour me voler tous les paquets de bonbons que j'y cachais. Il est vraiment parti de pas grand-chose. Mais c'était le début. D'une partie qui s'est mal terminé. Elle m'a brisé plus que ce que je n'aurais cru. Sinon pourquoi je lui courrais après ? Je veux qu'elle recolle les morceaux qu'elle a brisé. Je veux que ce soit elle qui me reconstruise. Je veux me reconstruire avec elle.
Je deviens un peu trop... Euh... Romantique ? C'est comme ça qu'on dit, non ? Je crois. Mais je ne compte pas le crier sur tous les toits. En tout cas, pas tant que je ne serais pas avec elle. Ma Lucy. Cette petite tête blonde dont je ne peux pas me passer. Qu'est-ce que je m'ennuie sans elle. Pourquoi je me suis énervé déjà ? Ah oui, seulement parce qu'elle m'a dit qu'elle s'en allait. J'aurais sûrement dû l'écouter parler avant de la virer de la maison.
Le fait de discuter avec mes meilleurs amis m'a donné envie de lui envoyer un message, de lui dire que je ne l'oublie pas et que j'arrive. Mais je ne suis pas certain que se soit une bonne idée. Ce que je voulais, c'est la surprendre. Pourquoi ? Je ne sais pas, peut-être pour voir si elle est encore de la partie. Je ne sais pas, mais si c'est le cas. Est-ce que j'aurais envie de jouer ? Non, je ne veux plus ! Je pars pour elle, pour la retrouver. Pas pour jouer. Qu'est-ce que j'ai en tête ? Franchement, j'ai trop pris l'habitude de ce jeu. Il faut que j'arrête d'y penser.
— Tu penses au jeu ? C'est pour cela que tu ne veux pas lui dire que tu arrives ? Tu as peur qu'elle soit encore en plein dans votre jeu débile ?
— Oui, non, peut-être. Elle n'a pas vraiment dit qu'elle voulait mettre fin au jeu. Et si c'était encore l'un de ces tests ? Elle en a fait plusieurs. Vous vous souvenez la fois où elle m'a fait aller la chercher à une soirée à l'autre bout de la ville, et en plein milieu de la nuit ?
— Oui et donc ?
— Beh j'ai dû abandonner la fille avec qui j'étais tout ça parce que mademoiselle avait besoin d'un taxi ! J'y suis allé, parce qu'au téléphone elle avait l'air super paniqué. Et deviné quoi ? Quand je suis arrivé, elle m'attendait avec un grand sourire, chronomètre en main ! Vous y croyez, vous ?
— Oui, totalement ! En plus, c'est tout à fait son genre de faire ça ! Elle t'a souvent fait tourner en rond. C'était assez drôle à voir, quand elle t'appelait et que tu partais tout paniquer.
— Oui, je m'en rappelle ! Tu ne peux pas t'en prendre à elle. Ce n'était pas méchant. Elle voulait juste tester ta rapidité face au danger. Tu as toujours relevé le défi sans te plaindre. Alors pourquoi là, c'est le cas ?
— Euh... J'ai peur d'arriver là-bas et d'être totalement déçu de ce que j'y trouve.
— Elle t'a écrit une lettre, qu'est-ce qu'il te faut de plus ? Tu ne seras pas déçu ! Elle a pris la peine de prendre du papier et un stylo pour t'écrire. Cela signifie trois fois plus que si ça avait été un simple petit message. Un message ne fait pas le poids face à une lettre, crois-moi. Alors, cours-lui après. Et si un mec lui tourne autour montre lui bien que tu viens pour elle. Tu vas devoir faire le premier pas. Tu vas devoir parler de tes sentiments. Tu vas devoir t'ouvrir à elle comme tu ne l'as jamais fait. Te sens-tu prêt ? Parce que mon petit, il va te falloir du courage.
— Oui, surtout que ce n'est pas n'importe quelle fille que tu vas avoir face à toi. C'est Lucy. Alors tu as plutôt intérêt de montrer que tu es là pour elle. Pour vous.
— Vous me faites peur là. Franchement, je ne suis pas quelqu'un qui parle à cœur ouvert. Je ne sais même pas si je vais être capable de parler à Lucy, alors que je la connais depuis toujours.
Romain
Attends-moi.
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