24. La chair en feu

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Oldric.

Tour à tour, Tharacus l'insultait et l'encourageait, maintenant le cheval au trot. L'étalon reniflait en secouant sa crinière blanche avec colère, tandis que les cylindres en fonte amassés dans un filet et rattachés sur le dos d'Oldric semblaient plus lourds à chaque kilomètre. Serrant les dents contre la douleur, l'Estanien continua de courir, le corps trempé de sueur, les muscles tendus, la poitrine brûlante.

Il trébucha une fois, se rattrapa et jura dans son souffle. Il ne tenait pas à se couvrir de honte en tombant. Il se concentra sur l'atteinte du prochain jalon et, une fois celui-ci franchi, se mit en tête d'atteindre le suivant.

—Tiens bon, ordonna l’instructeur.

Oldric fit trois foulées de plus et s'arrêta. Se penchant, il serra les genoux et fit entrer de l'air dans ses poumons affamés.

—Redresse-toi et marche.

Le maître lança une poche d'eau. La bouche desséchée, Oldric but à grosse goulée, puis s'aspergea le visage et le torse. Il rendit la gourde, marcha de long en large sur le bord de la route jusqu'à ce que sa respiration redevienne normale et que son corps refroidisse. Le printemps qui finissait laissait place à une fournaise sans nom.

— Tu as attiré l'attention, barbare, dit Tharacus en souriant et en faisant un signe de tête vers les vergers qui bordaient la colline.

Assises à l'ombre d’un pêcher, deux jeunes femmes, entourées d’une demi-douzaine de licteurs, l'observaient.

La ville de Philippos était en fête après l'annonce du mariage du Gouverneur. Depuis plusieurs semaines, tel un fleuve d’acier et de soieries, grands seigneurs, bannerets, lames-liges, hommes libres et esclaves inondaient la cité, incarnant la force et la fine fleur de l'empire. Au-dessus des toits les plus modestes tout comme des palais, le vent marin fouettait les étendards bleus et or de la famille impériale.

Certainement, la petite noble, au regard de son teint frais qui ne portait pas encore la morsure du soleil, arrivait de la capitale. Elle était vêtue d'une tunique de fin lin blanc, tandis que son esclave à côté portait une robe brune croisée sur les omoplates et retenue par son collier distinctif.

— Elles sont figées comme des biches prêtes à s'enfuir, se moqua l’instructeur. On dirait qu'elles n'ont jamais vu d'homme nu.

Il rit avec cynisme.

— La dame te dévisage.

Oldric était trop fatigué pour s'émouvoir de l'attention d'une jolie fille ou d'une petite shulamite choquée, ou encore des moqueries de son maître. Il aspirait à son lit et à la tranquillité de sa cellule. Il était assez reposé pour repartir, mais Tharacus semblait d'humeur à s'amuser.

— Regarde-la bien, barbare. Elle est belle, n'est-ce pas ? Tu en rencontreras beaucoup comme elle quand tu entreras dans l'arène. Les dames et les seigneurs te donneront tout, de l'or, des bijoux, leur corps, tout ce que tu demanderas et de quelque manière que ce soit, si tu réponds favorablement à leurs exigences.

Il fit faire un tour à son cheval.

Oldric détailla à nouveau la fille en blanc. Il la fixa avec ardeur, jusqu'à ce qu'elle rougisse puis baisse la tête. La petite Shulamite lui murmura quelque chose dans l’oreille, avant qu'elles n’opèrent un demi-tour et disparaissent à travers les arbres fruitiers.

Tharacus le frappa avec le bout de son fouet.

— Tourne à gauche au carrefour et passe à travers le vallon.

Oubliant les filles, l’Estanien se remit en route. Il adopta un rythme régulier qu'il savait pouvoir tenir, mais l’instructeur lui cria d'accélérer. S'armant de courage, Oldric amorça la colline en chronométrant sa respiration.

Au bout d'innombrables foulées, la caserne apparut au loin. Le cheval avait juste assez de bride pour prendre de l'avance. Un garde siffla bruyamment depuis sa position sur le mur et, en réponse, la porte de l'enceinte s'ouvrit.

Le maître démonta et tendit les rênes à un esclave.

— Aux bains, barbare, puis présente-toi à Phlegon pour un massage.

Sa bouche s'inclina.

— Tu as bien travaillé aujourd’hui. Tu seras récompensé.

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