Avalanche : L'enfer blanc
Le vieil homme releva la tête en entendant l’énorme déflagration. Il observa passivement les blocs de neiges se détacher de la falaise et courir vers la vallée, entraînant avec eux la sage poudreuse qui s’était délicatement déposée sur les flancs de la montagne.
Il admira les mouvements à la fois fascinants et mortels de cette neige sauvage et agressive. Il contempla l’enfer blanc se déchaîner, emportant avec lui arbres et hommes en rugissant. Cette mer immaculée et hurlante s’approchait à grande vitesse des habitations tendrement lovées dans la courbe accueillante de la rivière. Les arbres ployaient et se brisaient sous l’action de cette puissance terrifiante.
Il vit les gens sortir de chez eux, s’agitant, terrorisés devant cette masse pure et limpide qui venait les emporter.
Enfin, après plusieurs minutes de hurlements de terreur, le calme revint sur ses montagnes. Les gens avaient été engloutis.
Maintenant allait venir le seconde acte. Les secours.
Et, en effet, le bruit cyclique et lourd des pales des hélicoptères résonna rapidement, brisant ainsi le calme tout juste retrouvé de la montagne.
Le vieil homme fixa avec intérêt les hommes se précipiter vers les maisons qui émergeaient çà et là pour tenter de trouver des rescapés. Ils sortirent quelques corps à moitié gelés et s’empressèrent de les hisser sur les civières afin de les emmener au centre de secours le plus proche. Les heures passèrent lentement, ponctuées par les trouvailles de rares survivants et de trop nombreux cadavres.
Les hommes finirent par abandonner les recherches, sachant pertinemment qu’ils ne trouveraient plus de corps chauds dans cet océan glacial.
L’un des hommes, en contrebas, se tendit, et releva la tête vers les hauteurs. Il aperçut le vieil homme, perché sur la corniche.
Il se rappela soudain ce que lui avait dit le doyen avant de le laisser partir sur cette mission.
« On raconte que, dans ces montagnes vit un esprit protecteur qui punit les hommes qui tentent de lui faire du mal. Alors écoute, fils. Quand tu seras là-haut, n’oublie jamais que tu n’es qu’un invité à la merci de la colère des Esprits de la Nature. »
Sur le moment, il ne l’avait pas cru. Pourtant, le frisson qui parcourut son corps lui démontra que le vieux secouriste avait eu raison.
« Ne t’en fais pas, Esprit, nous allons te laisser tranquille. »
Et il remonta dans l’hélicoptère, décolla, et partit loin de cet enfer colérique et impitoyable.
Le vieil homme, toujours sur sa corniche, sourit.
« Papa, venez-vous ? »
Il se retourna vers la voix et sourit tendrement à la petite fille. Ses petits pieds nus, sa petite robe blanche, et ses grands yeux clairs étaient reconnaissable entre tous.
« J’arrive, Neige. Va chercher Rivière et Biche en m’attendant, s’il te plaît. »
La petite fille le dévisagea un instant, confuse, avant de repartir en riant vers les bois.
Non, pensa-t-il en regardant les restes des maisons en contrebas, il ne laisserait définitivement personne toucher à ses enfants.
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Le vieil homme de la corniche | Chapitre | 8 messages | 4 ans |
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