Poème de Lucas à Célia
Je l'aime d'un amour aussi pur que l'éther
Qui brûle comme un feu et qui murmure au vent
La somme de mes drames et des odieux tourments
Qui succèdent aux moments de bonheur éphémères.
Je l'aime comme on aime une femme oubliée,
Un mirage aperçu dans un désert sans fin,
Une aventure belle, mais sans lendemain,
Je l'aime comme on aime un rêve ou une idée.
Je l'aime quand elle est allongée près de moi,
Cou tendu, lèvres fraîches, offerte comme un lit,
Sur lequel on s'étend pour goûter à l'oubli,
Pour goûter à la mort comme on goûte aux émois.
Dans son obscurité qui m'éclaire en entier,
J'erre, tel un enfant qu'on a abandonné.
Mon coeur froid semble battre une étrange cadence
Qui me fait tituber comme un faux pas de danse;
Et je l'aime soudain d'une force nouvelle,
Et mon corps se souvient de gestes oubliés,
Et nos bouches et nos mains sont à nouveau liées,
Et je sais à nouveau ce qui la rend si belle.
Je l'aime et ne demande qu'à l'aimer encor.
Je l'aime et je suis fou de ses yeux noirs immenses,
Et mon amour me met dans une telle transe
Que je veux libérer son esprit de ce corps;
Je veux être une image, ou bien être une idée,
Car elle n'aimera jamais rien que cela:
Si elle doit rejoindre trop tôt l'au-delà,
La page sera pleine et l'encrier vidé.
Ce sera sans un cri, sans un geste de rage,
Mais avec un sourire qu'elle n'offre jamais
Et une franche joie que sa froideur omet,
Et moi je ne saurais comment tourner la page.
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