34. Savannah/Ashton
Savannah
Revoir Ash m’a fait un mal de chien. Je pensais commencer à tourner la page sur notre histoire, à me dire que Kurt pourrait m’aider en pansant toutes mes blessures. Le week-end dernier, on s’est même embrassés. Ce n’était qu’un petit baiser, mais j’ai eu l’impression de me trouver sur la voie de la guérison. Que j’allais enfin pouvoir me remettre en selle. Mais voilà que ce brun au regard envoûtant revient dans ma vie sans crier gare et arrache d’un coup sec le pansement posé sur mon cœur. Par sa faute, j’ai passé la nuit à pleurer, en me souvenant de ce ,nous, qui n’existe plus depuis cinq mois. Callie est rentrée peu de temps après moi. Sans un mot, elle m’a serrée fort contre elle. J’ignore si elle a compris qui il était, mais elle n’a pas cherché à le savoir. Aucune question, juste du réconfort. Elle s’est endormie en me tenant contre elle. Quant à moi, je n’ai pas fermé l’œil de la nuit.
Mon réveil retentit. Dans un geste digne d’un automate, je l'éteins. Il est temps que je me lève pour aller en cours. Je quitte le lit, en faisant très attention de ne pas réveiller Callie. Elle a encore le temps de dormir. Je pars farfouiller dans mon armoire à la recherche de la tenue adéquate. Un sweat large aux couleurs de l’université et un vieux legging feront très bien l’affaire. J’ai bien trop le bourdon pour faire le moindre effort vestimentaire.
Après avoir récupéré ma trousse de toilette, je quitte la chambre. Souvent, je regrette que les douches se trouvent à l’autre bout du couloir. Encore plus ce matin, lorsque je tombe sur celui qui m’a tiré des larmes toute la nuit. Assis sur le sol, les jambes étendues devant lui, le dos collé au mur, il semble attendre – m’attendre. À peine ai-je refermé la porte qu’il lève la tête. Ses traits tirés et ses yeux bouffis m’indiquent qu’il n’a pas dû dormir de la nuit, lui non plus. Malgré tout, je le trouve irrésistiblement beau. Mon cœur palpite. Une nuée de papillons prend son envol.
Il saute sur ses pieds pour venir à ma rencontre. Un demi-sourire se dessine sur ses lèvres. Lui, le gars si confiant, ne semble plus l’être à cet instant précis. À quelques centimètres de moi, sa main esquisse un geste dans ma direction. Il l’arrête avant même de m’avoir frôlée. Son regard voilé me sonde comme s’il cherchait à savoir ce que je pense. Je ferme les yeux pour ne pas lui montrer combien sa présence me trouble.
— Jamie m’a dit que je te trouverai ici, s’explique-t-il.
Sa tristesse transparaît dans sa voix. Il semble aussi peiné que moi. Toutefois, il peut toujours rêveré s’il croit que je vais lui pardonner aussi facilement. Ses derniers mots, tout comme la main de Harper sur son bras, restent bien trop ancrés dans ma mémoire.
— Et ? répliqué-je, mordante.
Face à mon amertume, il recule d’un pas. Tandis qu’il me dévisage, il joue nerveusement avec le piercing qu’il a sur sa langue. Cette boule que j’ai tant apprécié ressentir lorsqu’il en jouait sur mes points sensibles.
— Je me suis excusé. Je voulais que tu reviennes. Mais tu n’as pas lu mon mot.
— Qu’est-ce que ça aurait changé, Davis ? Le mal était déjà fait. Tu ne m’as même pas écoutée.
Il baisse la tête et glisse une main sur sa nuque, visiblement gêné par cette vérité.
— Maintenant tu m’excuseras, mais je dois aller me préparer si je ne veux pas être à la bourre en cours.
Et sans plus tarder, je repars en direction des douches.
J’ai à peine franchi la moitié du couloir que je sens sa main se poser sur mon bras. Dans un mouvement doux, néanmoins ferme, il me force à m’arrêter, puis à reculer jusqu’au mur. Son bassin vient s’appuyer contre le mien et m’empêche le moindre mouvement. Sa main, auparavant hésitante, vient caresser ma joue. Sous son contact, je pourrais presque ronronner de plaisir. Je ferme les yeux et me laisse envahir par ce bien-être. Son torse frôle ma poitrine. Mes tétons se dressent comme s’ils tenaient à effacer la courte distance qui nous sépare. Son cœur bat aussi vite que le mien. Son odeur m’envahit alors que son souffle se fait sentir tout contre mes lèvres. Tous mes sens sont en éveil. Je crève d’envie qu’il m’embrasse, qu’il efface dans un simple baiser les cinq mois qui viennent de s’écouler.
— Tu me manques tellement, Savannah.
Ses mots font office d’électrochoc pour me sortir de ma léthargie et, contre toute attente, je le repousse.
— Va jouer avec qui tu veux, mais laisse-moi tranquille !
Cette fois, je me rue vers le fond du couloir. Hors de question que je me laisse à nouveau piéger par ce mec ! Je l’entends jurer dans mon dos, mais je ne me retourne pas. Lui et moi, c’est terminé. Je dois avancer coûte que coûte. Mettre mon cœur à l’abri de quiconque pourrait le ravager et de lui en particulier.
Forte de cette pensée, je me réfugie sous la douche. Je laisse longuement l’eau chaude s’écouler sur ma peau. Mes muscles se détendent au fur et à mesure que les secondes s’écoulent. Que ça fait du bien ! Je ferme les yeux pour profiter à fond de cet instant. Et c’est à ce moment qu’Ashton s’impose à moi derrière mes paupières closes. Puissant et rayonnant dans sa nudité. Affamée, je laisse mon regard couler le long de son corps jusqu’à venir se poser sur son sexe fièrement dressé, pour moi. Ma bouche s’assèche. Je caresse mes lèvres tandis que mon autre main descend* vers mon sein. Ma respiration s’accélère alors que je l’imagine en train de s’occuper de mes tétons. Désireuse de plus, je laisse mes doigts glisser plus bas. Une chaleur intense se propage dans mon organisme pendant que je décris des cercles sur mon clitoris. Je m’adosse au mur de plus en plus haletante et introduit mon index dans ma chaleur moite. Dans ma vision, c’est sa langue et son piercing qui joue avec mon désir. Au bord du précipice, j’accélère la cadence de mes mouvements en rêvant qu’il me retourne contre le mur et me prenne sauvagement. Au moment de ma délivrance, je mords ma main et m’écroule dans le bac, totalement chamboulée par ce que je viens de faire. Pourquoi ? Pourquoi ai-je fait ça ? C’est totalement contradictoire avec l’idée que j’avais en tête en entrant sous le jet. S’il n’était pas venu me voir, je suis certaine que ça ne se serait pas produit. Je le déteste, putain ! Je le hais de me rendre si faible devant lui.
Ashton
Je reste là, planté comme un con, le regard fixé vers le fond du couloir où Savannah a disparu. Je grogne de frustration, vénère qu’elle ne nous laisse pas la moindre chance. Ça fait au moins dix minutes qu’elle est dans la salle de douche. Comment je le sais ? C’est simple, je me suis éclaté plus d’une fois là-bas avec une de mes ex. Mais putain, ce n’est pas Sheryl que j’ai envie de rejoindre à cet instant. C’est d’un tout autre corps dont je rêve. La seule fille que je n’ai jamais baisé, mais à qui j’ai fait l’amour plus d’une fois. Furax contre la putain de désillusion que je me suis bouffé, je cogne mon poing contre le mur. Bordel, ça fait un mal de chien ! Un cri outré me fait tourner la tête alors que je secoue ma main. Je déshabille la gonzesse du regard. Putain, elle sort d’où celle-là avec sa chemise de nuit de grand-mère ? Et qu’est-ce qu’elle a à me reluquer comme ça ? Elle veut ma photo ou quoi ? Qu’elle me fasse pas croire que je suis le premier mec qu’elle croise au réveil ! Je crois plutôt qu’elle a vraiment besoin de se décoincer du cul.
— T’as jamais vu un mec en colère ? grogné-je en la mitraillant du regard.
— Vous n’avez rien à faire ici. C’est un étage réservé aux filles.
Face à son ignorance, je ne peux pas m’empêcher de me foutre de sa gueule.
— Je suis certain que tu ne dirais rien si je me glissais dans ton lit.
Elle hoquète, choquée et moi, je continue à me marrer comme un connard jusqu'à ce qu’elle parte vers les douches.
Au moins l’avantage de cette altercation, c’est qu’elle m’a permis de faire redescendre la tension sous mon jeans. Parce que j’avoue depuis que je me suis collé à Sav, j’étais plutôt tendu de ce côté-là.
Bon, on fait quoi maintenant, vieux ? On l’attend ou on se casse ?
À mon avis, si Sav me voit ici, elle va péter une durite et ce n’est pas l’effet que je cherche. Quant à l’autre tendue du string, elle est bien foutue d’appeler la sécurité pour me faire dégager. Autant se barrer. Toutefois, je ne vais pas lâcher l’affaire. Sav est mon évidence. Je la veux comme je n’ai jamais voulu personne. Peu importe le temps que ça prendra, mais elle me reviendra. Je vais à nouveau tout faire pour qu’elle ne voie que moi. Et je sais exactement comment je vais m’y prendre.
C’est dans cet état d’esprit que je rentre chez Jamie. Quand je passe la porte, mon pote est attablé en train de bouffer. Il tourne la tête dans ma direction et hausse un sourcil en m’apercevant.
— Ne me dis pas que t’es allé la voir ! Je t’avais demandé de ne pas le faire, putain ! Callie va me tuer si elle apprend que je t’ai dit où elles crèchent.
Ouais, ben, ça, fallait y réfléchir avant mon pote !
— Mêle-toi de ton cul, ce ne sont pas tes oignons ! grinché-je.
— WoW, quelle humeur de dogue ! Elle t’a lourdé ?
— Qu’est-ce que t’as pas capté dans ce que je viens de dire ? Pour le moment, j’ai pas envie de parler d’elle, putain ! Par contre, tu peux me rendre un service ?
Il arque un sourcil tandis que je prie tout ce que je peux pour qu’il accepte.
— Si ton service concerne une bombe rousse, oublie. J’ai pas envie de me faire flinguer par sa meilleure pote.
Je pouffe.
— Sav, je m’en charge. Je n’ai besoin d’aucun intermédiaire pour la récupérer. J’ai juste besoin de passer un coup de fil, mais je n’ai pas de téléphone.
— Ouais, bien sûr, accepte-t-il en tendant la main vers le sien.
Avant qu’il me le donne, je file dans ma chambre pour y récupérer le numéro qu’il me faut. Quand je reviens, Jamie déverrouille son écran et me passe son smartphone. Après avoir composé le numéro, je pars me réfugier à l’abri des oreilles indiscrètes.
Allongé sur mon lit, mon bras libre sous mon crâne, j’attends, les yeux fermés qu’on décroche. Savannah apparaît derrière mes paupières closes. Belle à en crever. Je sens à nouveau ses tétons tendus sous son top à dentelle. Mes reins s’enflamment aussitôt et ma queue se gorge de mon désir pour elle.
Concentration, mec, tu dérives là. Si madame Harrison décroche, tu risques d’oublier ce que tu veux lui dire.
À peine cette pensée m’a-t-elle effleurée que ma conseillère de réinsertion décroche.
— Bonjour, madame Harrison. C’est Ashton Davis.
— Oh, Monsieur Davis. Comment allez-vous ?
— J’ai besoin de vous.
Ma voix a dû l’alerter sur mon état d’esprit, puisqu’elle ne répond pas aussitôt. Peut-être s’attend-elle au pire venant de ma part.
— Racontez-moi tout. Vous m’inquiétez.
— En fait…En fait, je n’ai pas suivi le programme de réinsertion depuis ma libération.
Je déglutis péniblement, j’admets, je suis un peu mal à l’aise de lui avouer que j’ai fait le con à traîner durant une semaine. Je l’entends soupirer et l’imagine en train de masser l’arête de son nez.
— Est-ce que vous voulez bien m’expliquer pourquoi ?
— Des soucis à régler.
— J’espère que vous n’avez rien fait d’illégal.
— Non, mais le problème n’est pas là. Je veux suivre votre programme et j’ai besoin de savoir si c’est encore possible.
— Attendez un instant, s’il vous plaît.
J’entends un raclement de chaise, puis une porte et c’est le silence. Pendant que je patiente, mes pensées s’envolent à nouveau vers ma rouquine. Vers ce corps qui m’a électrisé alors que je n’étais qu'à quelques millimètres d’elle. À cette bouche qui me tentait plus que tout. À cette peau dénudée que je rêvais de lécher. Je me retrouve avec une gaule qui ne demande qu'à être soulagée quand ma conseillère reprend la conversation. Je m’efforce de me concentrer sur sa voix pour ne rien rater de ce qu’elle me dit.
— C’est arrangé. Votre prochain cours est à dix heures.
Je décolle le téléphone de mon oreille pour vérifier l’heure. Huit heures quarante-quatre.
— Merci. Bonne journée, madame Harrison.
— Merci à vous également.
Je m’apprête à raccrocher quand je l’entends me rappeler.
— Une dernière chose, Monsieur Davis. Une bourse vous a été allouée, il faudrait que vous trouviez une banque pour que les fonds vous soient versés.
Un sourire illumine mes traits.
— Seriez-vous mon ange gardien, madame Harrison ?
— Bonne journée, Monsieur Davis, me répond-elle, un sourire dans la voix.
À peine a-t-elle raccroché que je songe à ce que je vais pouvoir faire avec ce fric. Certes, ce ne sera pas une somme conséquente, mais elle va pouvoir me permettre de survivre et de sortir ma bécane de la fourrière. Mes paupières s’abaissent alors que j’imagine le corps de ma rouquine collé dans mon dos, comme avant. Les sensations s’éveillent et ma trique redouble d’ardeur. Cette fois, je dois vraiment me soulager, avant de me retrouver avec les couilles bleues.
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