Parfaite harmonie
Mes pas résonnaient sur le carrelage blanc. Les murs tapissés de mirroir ne me renvoyaient pas mon image. Deux lavabos se tenaient face à moi, mais je n'y prêtais pas attention. Encore endormie, j'avançais doucement vers la douche. L'eau claire coulait sans bruit sur mes cheveux, innondait mon visage et glissait sur mes épaules. Même le gargoullis des cannalisations se taisait. Tout était calme et serein dans cette petite bulle de marbre. Il me semblais parfois sentir le doux parfum de mon shampoing ou le gout mentholé de mon dentifrice. Je n'avais ni chaud, ni froid. La température n'existait pas ici. Je ne frissonai même pas en m'éloingnant du jet d'eau. Je me sentais bien, si bien...
Ce n'était visiblement pas le cas d'une petite femme, qui arpentait ma salle de bain de long en large. Ses bras tournoyaient autour d'elle dans de grands gestes tandis qu'elle parlait de tout et de rien, sans interruption, ne s'apercevant même pas que je ne l'entendais pas. Je la regardais s'agiter dans tous les sens, indifférente à ses bavardages. Je ne voyais que cela chez cette femme énergique, qui m'amena d'autorité devant un vasque noir où trônait un petit robinet. Je la devinais impatiente, elle était préssée. Elle se positionna derrière moi et saisit un peigne. Ses mains se mouvaient au rythme de ses lèvres dans une mélodie rapide. Alors, le temps, qui s'écoulait si lentement il y a quelques instant, se mis à courir dans un sentiment d'urgence.
Une fois ma coiffure terminée, l'adulte se détendit et devint tout aussi calme que la petite pièce. L'harmonie, troublée par son tempérament, s'était rétablie. Les rayons du soleil levant tombaient en cascade et m'éblouirent un instant. La lumière se réflétait sur les mirroirs et donnait naissance à des ruisseau d'arc-en-ciel. J'aurais aimé boire goutte à goutte toute cette beauté, pour l'absorber et la sentir rayonner en moi toute la journée. Mais je n'en fis rien. Ce songe m'était trop agréable pour que j'ose le modifier d'une quelconque façon. Il se poursuiva dans une symphonie de bulle de savon, puis un objet attira mon attention.
Sur le vasque noir, à coté du robinet, se tenait un simple gobelet. Une brosse à dent prête à l'emploit était allongée à ses pieds. Reposée, propre et coiffée, il ne me restait plus qu'à l'utiliser pour que tout soit parfait. Je me brossai donc les dents durant de longues minutes, comme à mon habitude, quand ce rêve enchanteur arriva à son terme. Respectant les gestes simples de ma routine, je ne me sentis pas émerger de mon plaisant sommeil. Je continuai ma toilette sans sentir mes yeux papillonner. Achevant ma tâche, je me mis à cracher de la mousse blanche dans le petit vasque noir, et de la bave sur mon oreiller...
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