Chapitre 6 : L’atelier improvisé

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Les semaines passèrent et le rendez-vous au café devint une habitude. Chaque samedi, Lucas, Clara, Sofia, et Julien se retrouvaient à la même table, partageant un café, des éclats de rire, et des discussions animées sur leurs projets respectifs. La ville autour d’eux semblait continuer sa course frénétique, mais dans ce petit coin de café, le temps ralentissait, et ils pouvaient enfin respirer.

Un samedi après-midi, Sofia arriva avec une idée en tête. Elle avait passé la semaine à réfléchir à ce que Clara avait proposé, cette idée de créer quelque chose ensemble, et elle ne pouvait plus se la sortir de l’esprit. Elle posa son sac sur la table et sortit une petite boîte remplie de tubes de peinture, des pinceaux usés et des carnets de croquis. Lucas, qui était plongé dans son carnet de notes, leva un sourcil curieux.

— Qu’est-ce que tu prépares ? demanda-t-il avec un sourire en coin.

Sofia posa la boîte devant eux et sourit, légèrement nerveuse.

— Je me disais… Pourquoi ne pas faire un atelier, ici, ensemble ? Pas besoin d’être un pro, juste… exprimer ce qu’on ressent. J’ai envie de peindre quelque chose de nous, de cet espace qu’on a créé. Et si chacun contribuait ? On pourrait en faire une œuvre collective, quelque chose qui nous représente tous.

Clara sembla emballée par l’idée, ses yeux s’illuminant à la perspective de sortir de ses mots habituels pour explorer une nouvelle forme d’expression. Lucas, lui, était moins certain. Il n’avait jamais vraiment touché à la peinture, et l’idée de s’exposer ainsi le rendait mal à l’aise.

— Je ne sais pas trop peindre, avoua-t-il en se grattant la nuque. Mes talents s’arrêtent aux schémas de cours de philo.

Julien, qui n’avait pas dit grand-chose jusqu’à présent, sourit timidement. Il observa la boîte de peinture, un souvenir lointain remontant à la surface. Dans une autre vie, il avait dessiné. Rien de sérieux, juste des croquis dans des cahiers, des esquisses de paysages urbains, de visages croisés dans les transports. Il se souvenait de la sensation du crayon sur le papier, de la manière dont il pouvait capter une émotion en quelques traits.

— On s’en fiche que ce soit beau ou non, dit Sofia. C’est juste pour nous. Pour se rappeler pourquoi on est là, et pourquoi on continue.

Clara attrapa un pinceau et le tendit à Lucas avec un sourire encourageant.

— Allez, prof, lance-toi. On ne va pas te juger.

Lucas finit par accepter, riant de lui-même. Il trempa le pinceau dans la peinture et, après une hésitation, traça une ligne sur la toile improvisée que Sofia avait accrochée à l’arrière du café. Julien se joignit à eux, ajoutant quelques touches de couleur, des traits discrets mais pleins de sens. Chacun contribua, maladroitement d’abord, puis avec plus d’assurance.

Le tableau se construisait peu à peu, comme un collage de leurs univers respectifs. Clara y ajouta des mots, des phrases courtes qui résonnaient comme des fragments de pensées : *Espoir*, *Liberté*, *Renaissance*. Lucas peignit une forme abstraite, une sorte de spirale qui symbolisait pour lui le cycle des choix et des regrets. Sofia y mit des touches de lumière, des éclats de jaune et de bleu pour rappeler que même dans le gris de la ville, il y avait toujours de la couleur. Julien, quant à lui, ajouta des silhouettes vagues, des ombres qui se tenaient en arrière-plan, comme des témoins discrets de leur œuvre.

La toile était chaotique, imparfaite, mais elle avait une âme, un reflet de ce qu’ils étaient ensemble. Un moment de création pure, sans jugement, sans pression, juste le plaisir de faire quelque chose qui leur appartenait.

À la fin de l’après-midi, ils s’arrêtèrent pour contempler leur travail. Ce n’était peut-être pas un chef-d’œuvre, mais c’était le leur, et cela suffisait. Pour Lucas, c’était un rappel que les mots n’étaient pas toujours nécessaires pour exprimer ce qu’on ressentait. Pour Clara, c’était une évasion bienvenue de ses phrases soigneusement construites. Pour Sofia, c’était un acte de rébellion contre sa propre peur de l’échec. Et pour Julien, c’était une manière de se réinscrire dans un monde qui l’avait trop souvent ignoré.

— On devrait l’exposer, lança Clara à la blague, mais avec une pointe de sérieux dans la voix. Qui sait ? Peut-être que ça toucherait quelqu’un.

Lucas rit, mais Sofia prit la remarque au sérieux. Elle regarda leur œuvre, puis ses amis.

— Pourquoi pas ? Après tout, ce n’est pas qu’une toile, c’est un morceau de nous.

Leurs regards se croisèrent, et ils se sourirent. Pour la première fois, ils n’étaient plus simplement quatre personnes qui se croisaient dans un café. Ils étaient devenus une sorte de famille choisie, unie par des liens invisibles, mais solides.

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