Chapitre 4 Le pacte
Yvan les avait emmené boire quelque chose de chaud afin qu'ils se réchauffent. Il avait demandé au taxi de les déposer devant un café un peu plus loin et les avait laissé seuls prétextant un appel à passer à son amie pour prévenir de leur arrivée plus tardive que prévue. Ils s'installèrent dans l'endroit le plus reculé du pub, très sombre.
— Je suis désolé d'être parti hier sans te dire au revoir Maïleen.
— Je comprend Liam. Ce qu'on a vécu hier, chacun le gère comme il le peut. Je ne t'en veux pas. Au contraire, tu ne sais pas à quel point je te suis reconnaissante de m'avoir apporté ton secours, ton soutien, ton aide.
Il la regardait avec ses yeux angéliques, faisant émergé un petit sourire en coin libérant ses belles petites fossettes.
— Comment vont ta tête et ton épaule?
Le vent s'engouffra si fort qu'il fit claquer la porte vitrée du café. Ils avaient alors joints leurs mains à l'unisson. La tempête s'était engouffrée à l'intérieur du bâtiment. Elle le regardait. Il paraissait anéanti. Elle ressentait la même chose. Sa détresse était la sienne.
— Parles-moi Liam. Tu penses à quoi?
Après un petit moment d'hésitation, il se lança :
— Tu penses que nos vies vont ressembler à ça maintenant? Au moindre bruit, au moindre claquement de porte, de verre cassé, on sursautera?
— Ca prendra du temps…
Et puis dans un élan de colère, il tapa ses deux points sur la table bancale.
— Pourquoi nous? Ou plutôt pourquoi pas nous?
— Je ne sais pas Liam.
Durant un long moment, ils se turent. Puis Maïleen poursuivit après avoir éclaircit sa voix. C'est atroce et injuste. On a le droit d'être en colère, de se sentir démunis et effrayés à chaque claquement de porte! Mais s'il te plait, ne culpabilises pas d'être là maintenant avec moi. On est chanceux d'être ici, d'être en vie.
Elle décala sa chaise pour se mettre au plus près du beau brun et posa sa tête sur son épaule.
— Tu sais bien.
— Quoi?
— Tu n'es pas seul. Nous sommes deux. Et si on compte l'énergumène auquel, si tu additionnes nos âges, tu arrives au sien, ça fait même trois.
Liam avait retrouvé un semblant de sourire.
— Ma grand-mère Eliza, me dit souvent que dans les moments les plus sombres, en ressortent les meilleures créations de Dieu. Nous verrons quel programme il a pour nous!
Son dicton disait vrai. Il était tristement vrai. Liam était l'une des meilleures choses qui lui aura été donnée dans sa vie mais cela, elle le savait pas encore à l'époque.
*
Villa Magnolia
Westridge Terrace
Yvan avait bien comprit que Liam ne pouvait pas rester seul. Il l'avait donc convié, avec l'accord de son amie, dans la somptueuse villa surplombant les collines hollywoodiennes.
Lina March était une femme à l'allure d'une professionnelle des affaires. Grande aux cheveux corbeau, son embonpoint lui donnait un petit côté sympathique. Elle avait hérité de cette magnifique demeure d'un oncle éloigné qui n'était autre qu'un des premiers pionniers ayant participé à la création de la capitale mondiale du show-biz.
Maïleen faisant le tour du propriétaire, découvrit l'immense piscine à débordements. Malgré les derniers évènements, elle réalisa qu'elle était chanceuse d'être ici. Le rêve hollywoodien par excellence. Il fallait l'avouer, le cadre était idyllique : des magnolias fleurissaient en masse sur toute la propriété donnant une pointe marquée par la féminité.
— Tu t'assois avec moi?
Maïleen, surprise de ne pas être seule, hocha la tête à son nouvel ami.
Ils s'installèrent les pieds dans l'eau tiède du bassin. Il faisait très chaud. Maïleen portait une jolie robe rouge fleurie de points blancs au décolleté plus plongeant qu'elle ne l'aurait souhaité. Son chapeau de paille mettait ses jolis yeux à l'abri du soleil brulant.
— J'te remercie Maïleen.
— De quoi donc?
— De ne pas me laisser.
— Je resterais avec toi le temps qu'il faudra Liam.
— Et si…
— Oui?
— Parfois de tristes évènements nous font remettre tout en question.
— Argumentes.
— Et s'il n'y avait pas de hasard à ce qu'il vient de se produire?
— Je t'assure qu'il n'y a aucun hasard à ce qu'il vient de produire Liam! C'est le fruit des pensées destructrices de malades mentaux!
— Peut-être. Mais tu disais que dans les pires épreuves, naissent les plus belles créations de Dieu.
— Où veux-tu en venir?
— Et si nous étions fait pour nous rencontrer?
Maïleen lui répondit par un sourire compatissant et déposa sa tête sur son épaule.
— L'avenir nous le dira Liam.
Après deux jours en compagnie de leur hôte, les trois rescapés avaient resserré leurs liens. Chacun se donnait du mal pour donner le meilleur à l'autre en faisant bonne figure, autant que possible. Aussi, Maïleen découvrit le triomphant trait d'humour d'Yvan et les qualités culinaires inespérées de Liam. Ils avaient bien rit et se faisaient violence pour mettre de côté les ……..
Liam et Maïleen avaient passé beaucoup de temps ensemble. Liam avait découvert une gigantesque vidéothèque dans une des pièces de la villa. Lina l'avait invité à se servir. Ils avaient donc regardé dix productions filmographiques au cours des quarante-huit dernières heures. Ils s'étaient découverts une passion mutuelle.
La romancière avait enfin réussit à joindre son cher et tendre, à entendre les voix respectives de ses chérubins, se rassurant mutuellement. Sam s'était excusé de ne pas avoir eu l'information en temps et en heure. Il avait coupé son Smartphone durant plus de vingt-quatre heures afin de finaliser un projet professionnel ultra-important. Il jura à sa femme, que plus jamais, cela ne se reproduirait.
Yvan avait enfin triomphé, trouvant un vol de dernière minute qui les ferait rentrer à la maison mais Maïleen avait prit la décision de rester quelques jours supplémentaires à L.A. Sam lui avait pourtant demandé de rentrer en France avec insistance mais elle ne pouvait se résigner à laisser Liam, seul. Elle lui devait la vie et se sentait redevable. Il avait prit la peine de lui porter secours dans ces circonstances terribles. Il aurait pu simplement prendre la poudre s'escampette. Mais, il n'en était rien. Il était resté. Elle se devait de faire de même. En tout cas, pour le moment.
Elle parla de Liam à Sam en terme d'inconnu lui ayant porté secours. Au fond, elle ne lui mentait pas vraiment. C'était un mensonge par omission de quelques détails. Cela n'échappa pas à son agent de presse.
Liam avait proposé qu'ils s'éloignent de la ville afin de ne pas pâtir de toute la médiatisation que ce drame avait engendré. Les médias avaient eu vent, qu'il faisait parti des rescapés et son portable ne cessait de sonner. Il n'y répondait pas. Après avoir remercié vivement leur hôte et Yvan chaleureusement, ils prirent la route à bord d'un taxi.
Ils s'arrêtèrent pour faire escale dans une petite ville charmante à deux petites heures de la métropole. Ils y trouvèrent une maison d'hôte.
En entrant, ils furent accueillis par une dame d'un âge certain, de petite taille et assez corpulente, Jane. La gentillesse se portait sur son visage. Elle reconnu Liam sans difficulté et lui promit un séjour en toute discrétion. Son mari, Joseph, était tout son contraire. Il parlait d'une voix calme et apaisante. Grand et mince, c'était un homme élégant et élancé. Joseph nous accompagna silencieusement à nos chambres respectives.
— Voilà les chambres 10 et 11.Elles sont communicantes. Nous faisons le service du soir en chambre. N'hésitez pas si vous avez besoin de quoique se soit, nous sommes à votre entière disposition Jane et moi. Bonne installation à vous .
Maïleen et Liam entrèrent dans leurs chambres respectives. Après quelques minutes, Liam toqua à la porte communicante.
— Tu veux manger un bout?
— Hum.
— J'ai vu une auberge en bas de la rue.
— Okay, laisses moi un petit quart d'heure.
Une demi-heure plus tard, la jolie brune frappait à son tour à leur porte. En pénétrant dans la chambre, elle aperçût le visage de son nouvel ami, figé. Assis sur la banquette d'une alcôve, son regard se portait sur le magnifique jardin avoisinant. Il ne réagit pas à sa présence. Maïleen posa sa main sur son épaule. Il tremblait de nouveau. Peut-être n'avait-il jamais cesser de trembler?
— Liam?
Tout en continuant à fixer les espaces verdâtres, Liam s'adressa à Maïleen d'une voix totalement éteinte.
— Ecoute Maïleen, finalement, je crois que tu devrais rentrer chez toi. Je te prive de ta famille. Ca rime à rien. Ce que j'ai fais pour toi, je l'aurais fais pour un autre, ou un autre l'aurait fait pour toi. Alors rentres chez toi. C'est mieux comme ça. Je te remercie pour ta présence ces derniers jours mais il est temps qu'on reprenne nos vies. Tu ne me dois rien.
Maïleen s'était reculée de quelques centimètres comme pour que la distance physique entre eux pouvait lui faire mieux assimiler ce qu'il était en train de lui dire. Et tout ce que tu m'as dit hier soir Liam? C'était du vent?
— Liam, mais qu'est ce que tu racontes? Je… je ne partirai pas. Je reste. Ici. Avec toi. bredouilla Maïleen d'une voix vacillante.
— Et moi je te demande de me laisser seul! s'exclama t-il d'un ton sec et froid.
— Attends Liam, écoute moi s'il te plait. Tu dis qu'un autre l'aurait fait pour moi, mais t'en sais strictement rien et puis c'est toi et seulement toi qui a été là pour moi.
— Tu comprends pas. J'te demande de partir Maïleen!
Liam était vraisemblablement en colère. Maïleen, les larmes aux yeux, la gorge serrée, prit le même ton et alla s'assoir sur le lit à baldaquins.
— Très bien. Toi vas t'en! Après tout tu es chez toi ici. Retournes chez ta tante. Je n'aurais pas de vol avant plusieurs jours, autant que je reste ici et sans toi!
Il s'exécuta dans la seconde et claqua la porte. Les larmes de la belle avaient tellement couler ces dernières soixante-douze dernières heures que ses yeux étaient irrités, cela en venait à être douloureux. Ses yeux brulaient mais ce n'était rien par rapport à ce que son cœur venait d'endurer.
Elle se remémorait ce qu'alors, Liam, lui avait avoué la veille au soir. A la fin de la représentation filmographique d' Autant en emporte le vent de Victor Fleming, ce dernier s'était rapproché de son amie et lui avait fait un discours rempli d'éloquence.
— Maïleen, il faut que je t'avoue quelque chose. Aussi cliché que ça soit, j'ai la sensation de te connaitre depuis toujours. Tu fais comme partie de moi et il n'y a que lorsque tu es à mes côtés que je me sens bien. C'est assez déroutant parce qu'on ne se connait pas encore vraiment. Mais c'est comme si tu étais la part de moi qui manquait à mon être pour me sentir complet. Je ne sais pas comment va évoluer notre relation mais cette amitié aussi courte qu'elle soit pour le moment et faisant suite à de tragiques évènements ne doit pas s'arrêter là. J'appréhende beaucoup le moment où tu rentreras en France. Je sais que cela n'est pas possible mais j'aimerai tellement que tu restes près de moi pour le reste de ma vie. Dis-moi que c'est possible? Promets-le moi.
A moitié endormie, la belle romancière avait tenté d'assimiler ce que Liam lui avait avoué. Elle avait prit le temps de répondre, choisissant avec soin ses mots.
— Cela me touche Liam. Je ne sais pas où cela nous mènera et il est peut-être prématuré de parler de grande amitié sans vouloir te vexer. Nous avons vécu des évènements tragiques comme tu le disais, et sans nul doute, de les avoir partager, nous a rapproché incontestablement ces derniers jours. J'adore ta compagnie, ton humour, ta gentillesse. Tu es une personne, derrière ce genre que tu te donnes de mauvais garçon, d'attentionnée, charmante. Quand on te connait un peu, on ne peut que t'aimer. Mais, force de mon grand âge et de ta jeunesse, il faut êtes réalistes. Tu habites ici et moi en France. Tu es une grande star hollywoodienne, en tout cas c'est bien parti pour, et moi je suis une névrosée littéraire qui aura eu son petit moment de gloire, j'ai une famille et …
— Je suis tout seul!
— C'est pas ce que j'allais dire Liam. Ecoutes. Tu as tout à construire. Ta carrière. Ta vie en général, ta propre famille lorsque tu rencontras la celle qui fera valser ton cœur comme Sam a fait virevolter le mien il y a dix ans déjà. Tu connais le proverbe : Loin des yeux, loin du cœur? S'il existe, c'est que d'autres en ont fait les frais.
Liam avait la mine déconfite. Voyant le beau brun aussi attristé, Maïleen poursuivit.
— Tu sais quoi? Je vais te faire une promesse. Celle de faire en sorte que ça fonctionne autant qu'il me sera possible de le faire. Qu'en penses-tu?
— C'est un début.
Liam avait alors retrouvé un semblant de sourire. Ses fossettes embellissaient son doux visage.
*
Maïleen se sentait tout à coup très mal et s'allongea. Les mots du ténébreux résonnaient dans sa tête. Comment pouvait-il avoir ce discours aujourd'hui avec l'aveu qui lui avait fait dans la nuit. Quelques instants plus tard elle s'endormait, immensément terrassée.
Liam au dessus d'elle, portait une expression d'horreur sur le visage. Il avait prit quelques coups. Elle l'avait repoussé. Maïleen avait hurlé avec puissance sur lui. Des images abominables défilaient en boucle dans sa tête. Des visages épouvantés d'inconnus. L'angoisse montante transformait son souffle en soubresauts intermittents . Une angoisse d'attente. Celle de la mort.
Viennent les mots, puis la puissance des bras réconfortants. Ceux du bel inconnu de l'aéroport.
— Ca va allait Maï. Ca va allait... Chut… murmurait-il à son oreille.
Il déposa un doux baiser sur son front. Et lui prit ses joues rebondies de fillette dans ses mains larges et vigoureuses, pour coller l'une d'entre elle contre sa poitrine. Son menton posé sur le haut de son crâne, il l'enlaça aussi fort que possible.
Maïleen avait fait un cauchemar. Cela lui avait paru tellement réel. Elle tremblait de nouveau comme une feuille.
Peu de temps après, encore pleine de sueur et sous le choc, on toquait ardemment à la porte. Joseph avait été appelé par les voisins du dessous, qui s'étaient plaint des cris. Lorsque Liam avait ouvert la porte de la chambre, les yeux coléreux de Joseph s'étaient rapidement transformés en compassion lorsqu'il les avait déposé sur elle. Liam lui avait ensuite chuchoté quelque chose. Joseph avait comprit.
Joseph et Jane leur avaient proposé de s'installer dans une petite bicoque à quelques mètres de leur maison d'hôtes, légèrement éloignée de leur hameau de douceur afin de retrouver un peu de sérénité au milieu d'immenses hêtres.
Cela ressemblait à une maisonnette d'étudiant. Durant le court trajet, ils avaient traversé un petit parc. Jane avait accompagné Maïleen en silence, l'entourant de son bras comme pour la soutenir. Joseph et Liam étaient à quelques pas derrière, portant les bagages.
— Miss…dit-elle d'un ton grave.
— Avec Joseph, nous ne pouvons imaginer ce par quoi vous êtes passés, ce que vous avez vécu mais n'hésitez pas à nous solliciter pour quoi que ce soit. Et, rester le temps qu'il faudra.
Liam déposa leurs affaires dans le minuscule salon lorsqu'alors, Maïleen se dirigea à son tour, dans la seule et unique chambre. Un grand lit à baldaquins trônait au centre de la pièce. L'atmosphère n'était que douceur, les murs étaient peints d'un beige reposant. Des coussins déposés parterre faisaient ressortir cette empreinte cosy. Les murs étaient habillés de nombreuses photographies d'un jeune homme à la vingtaine, souriant avec un soupçon de mélancolie. Maïleen reconnut Jane et Joseph sur l'une d'elles. C'était sans doute leur fils avait-elle pensé.
Après s'être allongée sur le lit rebondi, elle s'était endormie quasi instantanément.
*
Une caresse la réveilla. Il faisait nuit.
— Maïleen. réveilles-toi. Ton téléphone ne cesse de sonner. Je pense que tu devrais regarder. Quelqu'un s'inquiète et insiste pour te parler.
Les yeux à demi-ouverts, la belle brune aux mèches décolorées se sentait fiévreuse. Yvan avait réussi à récupérer son portable au commissariat le plus proche de l'aéroport, en faisant les yeux doux au bel officier de l'accueil, lui laissant son numéro personnel au passage. Maïleen et Liam qui avaient assisté à la scène, eurent alors confirmation de l'orientation sexuelle de leur ainé.
Littéralement harassée, elle prit son téléphone tant bien que mal, déposé sur la table de chevet aux allures de Louis XV. Vingt-sept appels de Sam, six messages vocaux et une dizaines de SMS illuminaient son écran.
Elle avait rappelé son amant sans attendre, occultant les messages vocaux et écrits. Maïleen n'avait qu'une idée en tête, qu'une envie : entendre sa voix. En écoutant Sam parler, les battements de son cœur avaient ralenti et une bouffée de réconfort l'avait envahi. Il lui suffisait de fermer les yeux pour se sentir à la maison. Loin du danger. Il allégeait sa peine, aussi loin qu'il était. Il était là, avec elle.
Sam voulait la rejoindre sans attendre pour la ramener chez eux. Il avait déjà commandé son billet et Eliza était en route pour venir garder leurs bambins, mais Maïleen lui avait répondu qu'elle préférait aller un peu mieux avant de les retrouver. Elle souhaitait se retrouver seule. Bien entendu, c'était un piètre mensonge. Elle voulait rentrer, cette pensée était obsédante, mais Liam était revenu et elle comptait bien tirer au clair les conclusions de leur dispute. Elle n'avait rien à perdre et pour le coup, cette relation se terminerait aussi rapidement qu'elle avait débuté. Dans quelques semaines, il ne resterait que des souvenirs désagréables et elle ne voyait pas l'intérêt d'en parler à Sam. En tout cas dans l'immédiat.
Avant de raccrocher, Sam lui fit promettre de l'appeler au moins une fois par jour et insista pour que sa dulcinée prenne le temps qu'il faudrait pour se remettre.
*
Liam avait préparé le diner. L'odeur de pancakes se répandait partout dans le gîte.
— J'espère que tu as faim! gloussa Liam
— Je meurs de faim! Mais je ne suis pas sûre que des pancakes soient suffisants pour nous rassasier.
— J'ai fais avec ce que j'ai trouvé dans les placards de la cuisine. dit-il sur un ton dépité.
— Veux-tu que j'ailles faire deux, trois courses?
— Non, je veux que l'on reste ici. Il faut que nous discutions.
— Je sais. Mais que dis-tu de parler le ventre plein?
— Ca me va!
— Et si on regardais un film? J'ai vu une collection impressionnante de DVD dans la bibliothèque du salon. Vas-nous en choisir un et j'apporte les pancakes.
Le choix de Maïleen s'était arrêté sur un film qui lui était totalement inconnu. Little Miss Sunshine. Un film de 2006.
Engloutissant la pile de pancakes arrosés généreusement de sirop d'érable, elle avait tenté de toutes ses forces de s'intéresser au film. Liam semblait beaucoup aimé, il riait aisément. Et cela réchauffer le cœur de la romancière en herbe, de le voir quelques instants heureux. Bien loin du Liam qu'elle avait vu devant…… et il ya quelques heures dans sa chambre d'hôte. Son rire était comme une mélodie du bonheur qui faisait écho dans le cœur de Maïleen. Son pouls ralentissait étonnamment aux éclats rieurs, tout comme l'avait fait la voix de Sam au téléphone. Elle se sentait à nouveau en sécurité. Nul doute, sa place était bien là. Auprès de lui. Pour le moment.
— Je prend le canapé lui avait balancé Liam au moment du générique.
— Nous devions pas avoir une discussion Liam?
— Bien sûr. Demain? Tu es fatiguée et moi aussi d'ailleurs. Je prends le canapé!
La nuit fut mouvementée. A plusieurs reprises, Liam était venu la tirer de ses terreurs nocturnes. Il avait fini par s'installer près d'elle, et ne plus lui lâcher la main.
Le lendemain matin, au réveil, Maïleen s'était levée prendre une douche. Liam dormait encore. Un panier remplit gracieusement de nourriture avait été déposé avec un petit mot délicatement placé au dessus.
Il vous faut manger, les enfants. Reposez-vous encore aujourd'hui.
Appeler au besoin, nous répondrons présents.
J&J
— Pourquoi ce sourire de si bon matin? s'exclama Liam.
— La marmotte est réveillée?
— Hum… J'ai bien dormi. La douche est comment?
Maïleen trouva charmant qu'il l'épargne. Il avait aussi mal dormi qu'elle.
— Excellente!
Il lui avait sourit laissant ses fossettes faire leur adorable apparition.
— Qu'avons-nous de bon là dedans? dit-il en farfouillant dans le contenant en osier.
— Laisse ça tranquille! Je m'en occupe.
Maïleen l'avait orienté vers la salle de bains du bout de son menton. Elle avait trouvé un vieux bouquin de recettes de cuisine dans le placard en coin de la cuisine. Son envie se porta à la préparation de gaufres. Ce qu'elle préférait le matin après s'être préparée pour le travail, c'était l'odeur du café que lui préparait Sam. L'odeur du café frais, ce matin là, il avait une odeur de réconfort. Il lui suffisait de fermer les yeux pour penser qu'elle était à la maison. Persistante à clore ses pépites vertes, elle s'abandonnait à l'idée que le soleil se levait à peine descendant l'escalier de leur chambre. Elle verrait alors Sam préparant sa tasse pour lui servir son café noir brulant.
Son songe réveillé s'arrêta brutalement lorsque Liam arriva dans la pièce, les cheveux ébouriffés et encore mouillés. Quelques gouttes d'eau perlaient sur son front. Lorsqu'il fut assis, elle ne put s'empêcher de les lui essuyer. Il prit alors sa main.
— Maïleen, tu sais pour hier, je voudrais te dire que je suis vraiment désolé. Je sais pas à quoi je pensais en te disant tout ça alors que la veille je t'ouvrais mon cœur et te disais à quel point tu étais importante pour moi. Parfois, plutôt que d'affronter ma souffrance, je fuis et je n'épargne personne sur mon chemin. Mais là, c'est différent avec toi. Je veux que cela soit différent.
— N'en parlons plus. Nous sommes bouleversés Liam par ce que nous avons subis. Tu n'as pas à justifier ta réaction. Elle t'appartient. Il nous faut du temps pour nous remettre de tout ça. Saches que tant que tu auras besoin, je serai là pour toi.
— Alors prépares-toi pour toute une vie.
Maïleen sourit à son bel acolyte.
— Une gaufre?
— Avec plaisir.
Après quelques bouchées, Liam posa une question à son amie qui la surpris.
— Maï?
— Hum…
— Que dis-tu tout se dire et d'être honnête l'un envers l'autre?
— L'honnêteté avant tout! Tu as quelque chose d'autre à m'avouer?
— Hum… Se sont les pires gaufres que j'ai mangé de toute ma vie!
Maïleen explosa de rire.
— Ah oui, c'est vrai. Je ne cuisine jamais! Je sais pas!
Maïleen se sentait de plus en plus proche de Liam. Il fallait qu'elle se l'avoue. Aussi heureuse qu'elle était dans sa vie de maman et de femme, elle avait toujours envié les amitiés des autres auxquelles, jusqu'à lors, elle ne s'était pas autorisée. Et si l'univers avait mit Liam décemment sur sa route?
Toute la journée, ils avaient discuté et ri. Beaucoup. Cette fois, c'était elle qui avait la parole la plupart du temps. Liam lui avait posé une tonne de questions. Il semblait s'intéresser.
— Je peux te poser une question très indiscrète Maï?
— Tu peux essayer.
— Quel âge as-tu?
— Trente quatre ans.
— Ma question ne t'a pas gêné?
— Y'a pas grand-chose qui me gêne, en faite. Si tu veux vraiment savoir, je suis assez tolérante. Parfois trop d'ailleurs. Je m'adapte aux autres.
— Donc là tu t'adaptes à moi?
Elle rit encore.
— Absolument pas! Là je suis vraiment moi, enfin je veux dire… enfin je ne veux pas dire qu'avec les autres je ne suis pas moi mais je fais des efforts. Parfois de gros efforts.
— Pourquoi?
— C'est important.
— Pour qui?
— Pour eux. Pour moi.
— Pourquoi?
— Parce que! Tu sais, je crois que c'est important pour moi. Ca me fait me sentir bien. Et je dirais que c'est un petit prix à payer. Donner à l'autre pour qu'en retour sa satisfaction devienne la mienne. Tu me suis?
— Je crois.
En regardant l'horloge accrochée au dessus du téléviseur, elle s'aperçut qu'il était tard dans l'après-midi. Elle était encore fatiguée. Elle proposa à Liam de visionner à nouveau un film de son choix. Quelques minutes après le début de leur séance, ses paupières s'étaient fermées.
Vingt heures. Liam l'avait réveillé. Il faisait nuit noire dehors. Il voulait sortir prendre l'air. Il dinèrent dans une petite auberge au coin de la rue du gîte. En rentrant ils avaient fait un petit détour dans l'hôtel afin de saluer Jane et Joseph. Maïleen les avait vivement remercier pour leur hospitalité et de leur générosité.
En préparant son couchage pour la nuit, sur le sofa, Liam semblait tendu. Il fronçait les sourcils.
— Tout va bien Liam?
— Mon agent m'a laissé un message. Il faut que je le retrouve à L.A demain matin. Je dois vraiment y aller Maï.
— Tu sais Liam, il faut aussi que je reparte chez moi un jour. Tu m'emmèneras demain à L.A et j'irai voir si les vols en partance de la France sont rétablis.
La nuit fut meilleure. A son réveil, Liam était allongé près de Maïleen, sa main dans la sienne. Elle fut gênée. Après avoir dégageaient ses doigts entremêlés aux siens, elle l'observa son visage durant une bonne dizaine de minutes. Il était tellement beau. un visage parfait. Aucune imperfection. La jeunesse, l'insouciance, la vie devant soi avait-elle pensé.
Il ouvrit les yeux. Il se senti aussi gêné qu'elle. Du coup, pour comme pour justifier son attitude, la seule chose qui sortie de sa bouche fut :
— Au faite, et toi t'as quel âge? Non parce que, tout le monde le sait, que les acteurs américains se gavent au botox et toi tu ne dois pas faire exception à la règle! T'as aucune ride.
Il se mit à rire aux éclats.
— Pas de botox. C'est du cent pour cent naturel ma belle!
— Non mais sérieux Liam. T'as quel âge?
— Je viens de fêter mes vingt et un ans.
— Vingt et un ans! Mais t'es un gamin!
— Et oh! J'ai atteint ma majorité y'a déjà quelques années ma vieille!
— Oui enfin tout juste aux Etats-Unis! Et m'appelles pas ma vieille!
— Et alors, qu'est ce que ça peut bien te faire?
Il fit la moue. Mais après tout, il avait raison.
— Ecoutes, je vois bien que je t'ai vexé. Je suis désolée.
— Absolument pas. Mais j'ai un rendez-vous alors je vais me doucher.
— Hum
Elle l'avait visiblement égratigné. En toute franchise, il paraissait jeune, mais à aucun moment la question ne lui avait effleuré l'esprit.
Dans la voiture qui roulait vers L.A, Liam ne lui adressa pas la parole excepté pour lui préciser que l'aéroport avait rouvert. Il y avait un vol en partance de Paris à 19 heures 06.
— Le taxi va te déposer à l'aéroport, je descends ici.
— On se retrouve après ton rendez-vous?
— Je sais pas. Je t'appelle.
Ses mots avait semé la stupeur sur le visage de Maïleen.
— Nan mais attends Liam, tu ne vas quand même pas me dire au revoir comme ça?
— Et comment pensais-tu que ça allait se passer Maïleen?
Elle le regardait complètement désemparée. Elle ne trouvait aucune réponse à lui faire. Comment pouvait-il poser une telle question? Il était si différent maintenant. En un instant, elle retrouvait l'homme qui ne lui avait pas dit au revoir à l'hôpital, celui qui lui avait claqué la porte au nez à l'hôtel, le prétentieux qui n'avait fait que des reproches sur ses allures de romancière. La colère s'était emparée de la belle. Alors qu'il attendait inexorablement une réponse à sa question avec un pied déjà sur le trottoir, elle s'était emparée de la poignée de la porte du taxi.
— En faite, je pensais pas Liam! Excuses -moi, j'ai un avion à prendre!
La portière claqua avec une telle ardeur que le chauffeur s'était retourné en me dévisageant. Se sentant à la fois coupable et bourreau, ses yeux s'emplirent de larmes. Ce que le chauffeur ne put s'empêcher d'observer.
— Ah ces querelles d'amoureux auront un jour raison de toi, dit-il en caressant amoureusement le tableau de bord.
Retour à l'aéroport. Après un long moment, elle prit son billet de retour. Le départ était prévu à 19h06 comme Liam lui avait dit. L'aéroport était quasi désert. Mais en arrivant devant, les fleurs, les bougies, les ours en peluches et les centaines de cartes déposés à même le sol avaient fait remontés en elle tout ce qu'elle avait tenté d'oublier ces derniers temps. Maïleen était restée plus d'une heure devant les photographies de ceux qui avaient perdus la vie ici. Les clichés de douze hommes, quatre femmes ainsi qu' un petit garçon ayant à peine l'âge d'entrer à l'école avaient été scotchés sur les immenses baies vitrées. Le prénom du bambin enluminait les mémoriaux de fortune installés près des différentes entrées de l'aéroport. Joey. Un chérubin au sourire lumineux. L'écrivaine se sentie soudain submerger par un sentiment assez incompréhensif à ce moment là. La culpabilité.
Dans sa tête résonnait sans cesse une petite voix : pourquoi lui et pas moi? Pourquoi avais-je le droit de retrouver mon foyer sachant que lui, ce tendre bambin, ne reverrait jamais les siens? Les siens ne pourront plus jamais le serrer dans leurs bras, l'embrasser, le chérir. Ses parents avaient un jour, fait un choix. Ils l'ont choisi. Ils ont choisi d'avoir cet enfant. Et, aujourd'hui, d'atroces personnes leurs ont arraché cette promesse d'amour éternelle. D'autres ont déterminé pour eux leurs avenirs.
Ce sentiment de culpabilité, Maïleen l'apprit bien plus tard et portait un nom. La culpabilité du survivant.
Son vol ne décollait que dans cinq bonnes heures, elle décida d'aller déjeuner. Une fois installée, des flash-back lui revenaient violemment. Ce qu'elle avait ressenti au moment de l'attentat, refaisait surface. Combattant le mal par la mal, il fallait qu'elle refasse le trajet de l'horreur. Elle s'arrêta là où sa tête avait cogné. Le sang avait disparu. Aucune trace. Elle retrouva le cagibi qui en faite, n'en était pas mais la salle de contrôle des passagers. Sa balade la mena à la grande pièce où Liam et elle avaient patienté durant de longues heures. Là encore, le carrelage blanc scintillait de mille éclats. Plus de trace de l'abomination passée. Les gens circulaient de façon normale, et les chuchotements avaient laissé aux éclats de voix des futurs voyageurs.
Buvant un café, Maïleen feuilletait les pages d'une revue trouvée sur un de sièges de la salle d'embarquement. Elle était tombée sur un article parlant de Liam. On pouvait le voir en charmante compagnie d'une belle blonde. A en croire la presse, ils étaient plus que des amis. Maïleen avait rapidement tourné la page afin de passer à autre chose comme Liam avait fait quelques heures auparavant avec elle.
— Tu lis ces torchons?
Sans même prendre la peine de relever la tête, la belle brune mit le ton pour répondre à la star..
— Qu'est ce que tu fous là?
— Bah comme toi, je prend un café.
— Ah, et où est-il ce café?
— Bah j'espérais que tu me l'offres?
— N'as-tu pas compris toute la subtilité de mon geste lorsque je t'ai claqué la porte du taxi, au nez ?
— Euh. Si. D'ailleurs parlons-en, tu n'as pas retrouvé un bout de ma veste?
— Seulement quelques cheveux!
— En effet, j'ai perdu un morceau de ma frange qui me rend si mignon.
— Essaies de rappeler le taxi. Il pourra peut-être quelque chose pour toi.
Il avait sourit.
— Tu vas devoir me supporter encore quelques heures Maï. Je rentre à Paris.
— On est pas obligé de se mettre à côté. D'ailleurs, tu as dû prendre ton vol en première classe, ce qui n'est pas mon cas.
— On verra. Je vais chercher mon café puisque tu n'as pas l'air décidé à me l'offrir!
Lorsque Liam pénétra dans la cafétéria, Maïleen s'empressa de rassembler ses affaires avant de se précipiter au premier étage de l'aéroport afin de patienter. Seule. Elle ne voulait plus le voir ni entendre parler de lui. Après tout, elle ne lui devait rien. Enfin si, sa vie. Mais c'est son devoir de citoyen. Il a seulement fait son boulot !
Lorsqu'elle avait eu cette pensé, elle n'y avait pas vraiment cru.
— Pourquoi tu t'es enfuie comme ça!
Liam était arrivé dans la salle en courant dans les escaliers. Sa chemise blanche tachée de moka. Et à en croire l'étendu des dégâts, il y avait plus de café sur lui que dans son gobelet.
— Ecoutes Liam. Tu ne me dois rien, et moi non plus, je ne te dois rien. Alors chacun de son côté me parait être une bonne idée s'exclama la brunette visiblement très agacée.
— C'est toi qui vas m'écouter Maïleen. Laisses moi du temps. J'avoue que ces derniers jours j'ai été infernal avec toi. Un jour je te dis blanc et le lendemain, noir. J'étais contrarié par le boulot voilà tout.
— Et c'est moi qui doit en payer les frais?
Liam ne répondit pas.
— C'est pas normal ta réaction. Tu ne peux pas en vouloir au monde entier pour chacune de tes petites contrariétés du quotidien Liam.
— Tu as raison Maï. Je te promets que je me ferais pardonner. Laisses-moi un peu de temps s'il te plait.
Liam avait un air de chien battu mais l'entêtement de Maïleen était à son comble. Jamais personne auparavant ne lui avait fait autant de peine en si peu de temps. Qui plus est, un inconnu rencontré quelques jours avant. Et puis, c'était un acteur. Tout le monde sait que la parole d'un acteur ne vaut rien. Liam pourrait simplement jouer la comédie. Et Dieu sait, qu'à ce moment précis il la jouait très bien! Enfin, c'est ce que la romancière pensait.
— Je n'en ai plus à t'accorder. Je repars dans quelques heures en France.
— Laisses-moi une place, lui glissa t-il en susurrant et obligeant son interlocutrice à léguer une place plus confortable à cet entêté d'acteur. J'ai vraiment apprécié ta sollicitude vis-à-vis de moi ces derniers jours. Peu de gens dans ma vie ont porté cet intérêt à mon égard. Ce que je t'ai dit hier soir n'était pas des paroles en l'air Maïleen. Je le pensais vraiment.
— Comment te faire confiance Liam? Un jour tu es adorable et le lendemain, tu es détestable.
— Tu sais Maïleen, je vais t'avouer autre chose sur moi. Bien sûr je suis entouré par le peuple des mondanités, des acteurs et producteurs. Il y a toujours un gala de charité ou une soirée en l'honneur d'une célébrité donnés auxquels je suis invité et une multitude de personnes qui s'adresse à moi, me sourit, me complimente. Même si avouer que je n'aime pas ça, serait un mensonge, ce n'est qu'un feu d'articifice qui, sur le moment fait sensation mais devient rapidement éphémère, s'éteignant aussi rapidement qu'il a débuté. Les gens comme moi n'ont pas vraiment d'ami, de personne sur qui comptait. Je ne peux me confier à personne sans craindre que mon intimité soit percée. C'est palpitant au début mais voilà à peine deux ans que ma carrière d'acteur est vraiment lancée et je dois concéder à l'idée d'être toujours seul pour me préserver.
Il fallait le reconnaitre. Liam avait raison. Maïleen était de celles qui ressentaient de la compassion pour les autres. Parfois un peu trop. Ce que le bel acteur venait de lui avouer, l'avait touché. Derrière ses airs hautains de star capricieuse hollywoodienne se cachait un jeune homme fragile et esseulé par un monde remplit de paillettes.
— Je vois bien que tu n'es pas intéressée par mon monde, mon fric ou ma carrière, ni par ce que je représente. La personne avec qui tu as passé ces derniers jours était réelle, entière, pleine de défauts bien sûr mais qui a besoin d'une personne comme toi dans sa vie. Quelqu'un d'intègre, à qui je pourrais faire confiance.
— Et qu'est-ce que j'y gagne moi dans l'histoire à part des rejets en masse de ta part et des mots plus blessants les uns que les autres.
— Tu me gagnes moi. Tu sais, je t'ai bien observé.
— Ah oui?
— Oui, tu es aussi seule que moi.
— Absolument pas…
— Tu vas me parler de ton Sam, de tes enfants ou encore de ta grand-mère? Ou peut-être de tes collègues de boulot alors?
— Exactement. Tout ces gens là m'aiment pour qui je suis.
— Certainement. Ils aiment la personne que tu veut bien leur montrer. Tu l'as dit toi-même, tu t'adaptes aux autres, tu fais des efforts pour être bien avec eux, pour ne pas les décevoir. En réalité, ils ne te connaissaient pas vraiment.
Maïleen avait une boule nouée dans la gorge, et tenté de déglutir mais à chaque tentative, elle souffrait. Liam avait vu clair en elle.
— Je voudrais que tu te laisses aller avec moi Maïleen. J'aimerai découvrir qui se cache derrière celle que tu laisses paraitre. N'es pas peur d'avoir des défauts. Je suis certain que certains d'entre eux pourraient me faire t'apprécier encore plus. Sois-toi-même avec moi. Si tu veux continuer à mentir aux autres, ne te mens pas à toi-même lorsque tu es avec moi. Dis-toi que c'est comme une thérapie personnelle d'accomplissement de soi mais que tu payes pas cinquante euros à la fin de chaque séance!
Maïleen ne savait plus quoi répondre. Elle venait de prendre conscience qu'il avait raison. Elle n'avait jamais vu cela de cet angle. Les épaules abattues, son regard se perdait sur la moquette anthracite. Le nœud ne se dénouait pas.
— De toute manière, quelque soit ta décision, je rentre à Paris. Il restait deux places en première classe. J'ai annulé ton billet. Tu vas devoir me supporter encore un peu…
Maïleen sentit la colère montait mais ne la laissa pas s'extérioriser. Après un long soupir, elle grommela :
— Ok Liam. Mais ne décides plus jamais à ma place! Cela part sans doute d'une bonne intention de m'offrir ce billet mais si je ne te connaissais un minimum, je penserai que c'est de la manipulation.
— Tu veux que j'aille te reprendre une place en classe éco?
Maïleen sourit et prit un air désespéré.
— T'es irrécupérable Liam! Troquer un fauteuil chauffant avec coupe pétillante contre un bonhomme transpirant l'eau de Cologne de cent dix kilos durant plus de dix heures, serait de la folie. C'est la meilleure idée que t'es eu de la journée. Aller, viens. On bouge. J'ai faim. Commences par te faire pardonner en me payant un déjeuner.
Ils déjeunèrent à l'endroit même de leur toute première dispute.
— Et si nous faisions un pacte?
Maïleen recula sur son dossier pour mieux observer son ami.
— Que proposes-tu?
— Une amitié. Avec seulement deux exigences : l'honnêteté mutuelle et aucun secret. Si l'un de nous n'honore pas ce pacte, cette amitié prendra fin immédiatement et ce, sans équivoque. A l'image d'un bail renouvelable à chacune de nos rencontres, indéfiniment.
— Hum…
— Alors qu'en penses-tu?
— Honnêteté et confiance aveugle? Laisses-moi y réfléchir un peu.
— O.K. Tu devras me donner ta réponse en arrivant à Paris alors. Douze heures pour prendre un nouveau tournant dans ta vie, ça te parait raisonnable?
— D'accord.
Liam lui tendit sa main. Maïleen répondit à son appel et les deux amis s'efforcèrent à une poignée de mains digne de ce nom.
Leur voyage s'était passé dans une ambiance bon enfant. Mais au moment de débarquer, Maïleen s'était laissée immerger par une appréhension. L'angoisse montait généreusement le long du parcours qui les mènerait à leurs bagages. A la vue du portique de sécurité, elle eu l'impression d'avoir le gout du sang dans la bouche. Son cœur palpitait.
Spontanément Liam lui avait prit la main et l'avait tirait en avant d'un pas effréné. Le portique était passé, maintenant la marche ne serait plus très longue jusqu'aux bagages.
Une fois leurs valises récupérées, ils traversèrent l'aéroport pour arriver sur le parking où une voiture avec chauffeur les attendait. Liam fourra leurs affaires dans le coffre, ouvrit la portière à son amie et à son tour, s'engouffra à l'intérieur.
— Alors?
Elle souriait.
— J'accepte lui dit-elle en levant à son tour sa main dans sa direction.
Liam, la lui prit et y déposa un doux baiser.
— Je te dépose chez toi? J'ai deux heures à tuer avant de rejoindre Max.
— D'accord.
La berline s'était engouffrée tant bien que mal dans les embouteillages du périphérique. Les deux amis étaient arrivés en bas de l'immeuble de quinze étages. Liam se pencha vers la brunette. Son accolade amicale s'interrompue brusquement. Il se recula péniblement de cette étreinte fraternelle.
— Je n'ai fais confiance comme ça qu'une seule fois dans ma vie Maïleen. Ne me déçois pas.
Liam avait le regard remplit de fragilité. Il avait été meurtrit dans le passé. Maïleen prit ses mains entre les siennes.
— Je te promets de ne pas te décevoir.
Elle l'embrassa sur la joue et voulu s'extirper de la voiture mais Liam l'empoigna par le bras pour la retenir.
— La seule personne en qui j'avais une confiance aveugle c'était ma sœur, Helen.
Maïleen fronça les sourcils. Liam n'avait jamais évoqué une sœur, ni même, lorsqu'il avait partagé certains souvenirs d'enfance avec ses parents.
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