Chapitre 9

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— Regarde ce que j’ai trouvé dans un album de mes parents, commence Agostino en sortant une photo de sous son anorak.

Silvio regarde ses deux amis devant le pas de sa porte. Gêné de leur avoir ouvert en pyjama, il n’ose pas les inviter à entrer. Le souvenir de son cauchemar le hante et brouille son esprit.

Agostino lui met l’image sous les yeux.

— Tu vois là ?

— On voit des gens qui se marient, s’immisce Livia en se glissant à côté de Silvio pour regarder.

— Non, pas ça.

— Ben quoi, alors ?

Silvio recule dans l’encadrement de la porte. Il commence enfin à sortir des brumes du sommeil et l’irruption de ses amis dans son réveil l’embarrasse. Certes, il est heureux de les voir, mais souhaiterait un peu de tranquillité pour éclaircir ses idées.

— Entrez, ne laissez pas le froid envahir la maison, interpelle la maman de Silvio. Et toi, jeune homme, vas enfiler des vêtements.

Silvio file dans sa chambre puis les retrouve assis côte à côte dans la cuisine, en train de regarder la photo. Il s’installe en face d’eux. Depuis le salon, le staccato de la machine à coudre de sa maman traverse les murs de l’appartement.

— Là ? demande Livia.

— Oui ! répond Agostino.

— Vu comme ça, on pourrait dire que c’est celle-là, reprend la fillette en posant le doigt sur une autre vieille dame.

— Si vous me disiez ce que vous trafiquez, ce serait bien, les interrompt Silvio.

— En regardant les albums photo de mes parents, j’en ai trouvé une avec Madame Sgarlatta dessus.

— Oui, et ? Relance Silvio en découpant une tranche de pain.

— Ce sera pratique pour l’enquête, assure son ami.

— Quelle enquête ? l’arrête Silvio.

— Tu crois vraiment que les policiers se sont mis à la recherche de madame Sgarlatta quand on les a laissés hier ?

Silvio réfléchit, car Silvio réfléchit toujours quand on lui pose une question. Il se remémore l’entrevue avec les agents et le rêve de cette nuit. Après réflexion, il se rend à l’évidence et se sent enfin prêt à écouter ses amis.

— Comment on va s’y prendre ?

— J’ai relu tous les Dylan Dog, cette nuit, explique Agostino avec enthousiasme. Et, à chaque fois, il commence par interroger les témoins.

— Et qui est témoin d’après toi ? questionne Silvio qui n’en a pas la moindre idée.

— Déjà, on peut questionner les voisins de Madame Sgarlatta ce qu’ils savent d’elle, déclare Livia avec le même entrain qu’Agostino.

— Ensuite, on interroge les commerçants du quartier s’ils l’ont vu après sa disparition, reprend Agostino en sortant un petit carnet à spirales et un crayon. C’est pour leur montrer une image d’elle que la photo sera utile.

— Oui. Et s’ils reconnaissent tes parents sur la photo ? demande Silvio, dubitatif.

Les trois enfants s’entendent ensuite assez rapidement sur l’organisation et descendent dans la ruelle qui court depuis les quais vers l’intérieur de la ville. La neige a cessé de tomber, mais ne paraît pas décidée à fondre. Le soleil ne parvient pas à traverser l’épaisse couche de nuages qui encombre le ciel.

Il n’est que dix heures quand ils arrivent devant la maison de madame Sgarlatta. Les volets clos, l’amoncellement de neige sur le seuil et l’absence de fumée s’échappant par la cheminée leur indiquent qu’elle n’est pas rentrée chez elle. Ses voisins semblent bien être à leur domicile, si l’on en croit les lumières qui brillent aux fenêtres.

— Commençons par interroger ses voisins, propose Livia.

— Qui le fait ? sonde Agostino, moins sûr de lui.

Silvio conserve le silence. Timide, il ne sent pas le courage de sonner chez des étrangers. Ses deux camarades regardent leurs pieds et attendent sa décision en poussant de la neige du bout de leurs chaussures, jusqu’à créer de véritables petites collines.

— J’y vais, cède Silvio.

Devant la porte, il hésite encore, prend une grande inspiration puis se décide et presse la sonnette. Rien ne se passe d’abord, le garçon patiente et sent que ses amis, restés deux mètres plus loin, retiennent leur souffle.

Alors que le jeune garçon s’apprête à rebrousser chemin, la porte s’ouvre enfin devant lui.

— Que puis-je pour toi, mon garçon ? demande la vieille femme qui vient de surgir par l’ouverture.

— Euh… ne trouve qu’à répondre Silvio.

— Si c’est une blague, mon garçon, j’en parlerai à tes parents.

— Bonjour, Madame. Nous aimerions savoir si vous savez où est partie madame Sgarlatta, débite Silvio dans un souffle.

— Oui, madame Sgarlatta est partie, je pense qu’elle est partie voir sa sœur.

— Sa sœur ?

— Elle ne la voit plus beaucoup, je crois qu’elles sont un peu fâchées.

— Est-ce que vous savez où sa sœur habite ?

— Il me semble les avoir vues rentrer dans une maison, Calle Strigone. Mais cela fait très longtemps, je ne sais pas pourquoi, mais je ne passe plus par là. L’âge peut-être.

— Merci beaucoup, madame, conclut Silvio.

Derrière lui, ses deux amis n’ont pas raté une miette de la conversation. Agostino tape sur l’épaule de Silvio pour le féliciter.

— Maintenant, allons voir chez sa sœur si elle y est, dit-il en prenant la direction du canal.

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