Chapitre 23
— Ce n’est pas tout, mais j’ai une tournée à faire, dit la Befana quand sa sœur vient la détacher. Mais avant, il faut ramener ces enfants chez eux.
Épuisés et encore sous le coup de la peur, les enfants ne savent plus quoi dire.
— Laisse cette épée dans un coin mon grand, mais garde le courage dans ton cœur, poursuit Madame Sgarlatta en passant la main dans les cheveux d’Agostino. Toi, ma belle, dis au revoir à tes amis les chiens, il ne nous reste que peu de temps avant de partir. Et toi Silvio, je te promets que nous prendrons bien soin des arbres. Si un jour tu reviens ici, tu verras que ce n’est pas une parole en l’air. Allez ! Tous sur mon balai.
Dans le froid de l’hiver, trois petits Vénitiens grimpent sur un balai conduit par une sorcière bienveillante. Silvio tient Livia par la taille, il sent les mains d’Agostino sur ses épaules. Ensemble, ils parcourent le ciel étoilé et admirent une dernière fois les blanches collines aux sapins décorés de boules brillantes du pays magique.
***
— Ciao Silvio, lance Agostino à son ami alors que ce dernier pose le pied dans la rue.
— Ciao Agostino. Tu as reçu une étoile, toi aussi ?
— Ouais, répond Agostino avec un sourire ravi.
— Bonjour, les shérifs ? Prêts à faire régner l’ordre et la justice sur la ville ? demande Livia en arrivant près d’eux.
— Oui, et regarde, j’ai aussi reçu une épée, reprend Agostino
Tandis que le garçon sort une épée en plastique de son anorak, Silvio est pris de doutes, il lui semble que l’arme ne lui est pas inconnue. Ne trouvant pas d’où vient ce trouble, il secoue la tête et se concentre sur ses amis.
— J’ai eu des bonbons et un livre sur les lutins et les animaux magiques, reprend la petite fille. Et toi, Silvio ?
— L’étoile de shérif et une maquette d’avion, j’aime mieux les bateaux, mais c’est bien de voler.
— J’ai aussi eu un manuel de grammaire, je me demande bien pourquoi, termine Agostino.
Les trois enfants se promènent, machinalement, juste animés par le simple plaisir d’être ensemble. Ils profitent du soleil qui réchauffe leurs vêtements et se laissent mener vers le campo de la Celestia.
Sur la place, Silvio reconnaît les deux agents de police et s’approche d’eux.
— Bonjour Monsieur l’agent Principal, dit-il dès qu’il se retrouve en face d’eux.
— Bonjour jeune homme, je vois que tu as appris la politesse, c’est bien, répond le gardien de la paix au gros ventre.
— J’aurais voulu savoir si vous aviez des nouvelles au sujet de madame Sgarlatta.
— Nous venons de passer devant chez elle et nous l’avons vue sortir de sa maison, affaire classée !
— Merci monsieur.
Intrigués mais soulagés, les trois amis se précipitent vers la demeure de Madame Sgarlatta et constatent que les volets sont à nouveau ouverts. S’interrogeant sur l’endroit où elle a pu se rendre, ils poursuivent leur promenade vers la Calle del Strigone.
Surpris de la trouver sans difficulté, ils remarquent qu’à la place des débris calcinés se tient une jolie maison coquette et bien entretenue.
Poussés par la curiosité, ils jettent un coup d’œil par une fenêtre.
Dans un petit salon aux meubles anciens, deux vieilles dames partagent leur petit déjeuner.
Devant les sœurs Sgarlatta, un panettone posé sur la table attire le regard envieux de trois énormes chiens qui bavent d’envie.
Lorsqu’un des molosses tourne la tête vers les enfants, ceux-ci s’enfuient en courant dans la ruelle. Silvio attrape Livia et la tire en avant, tandis qu’Agostino ferme la marche pour protéger leur retraite.
Ils arrêtent leur course lorsqu’ils se pensent assez loin de la maison des deux sorcières.
Ils marchent désormais le cœur soulagé de ne pas s’être fait prendre, Livia, la main dans celle de Silvio tandis qu’Agostino tient la sienne posée sur l’épaule de son ami, en lui donnant des bourrades de camaraderie.
Sur un toit, loin au-dessus des enfants, un gros chat roux les observe en ronronnant.
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