Chapitre 5

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 [...] Elle fut tirée de son cauchemar par la vieille Maria.

Cette dernière était entrée après avoir frappé à de nombreuses reprises, n'ayant aucune réponse de la part de l'occupante de la caravane, elle s'était permise d'entrer à l'aide de son double. Se rappelant par ce geste, le jour où la défunte Lucia le lui avait remise "au cas où il devait arriver quelque chose à moi ou ma petite Julia", avait elle dit. Heureusement, le loquet à l'intérieur, mesure de sécurité supplémentaire bien que peu fiable, n'avait pas été enclenché. En passant le seuil de la porte, elle entra de suite dans un petit espace délimité comprenant à sa gauche le coin cuisine, avec gazinière, étagère et un petit meuble de cuisine, et à sa droite le coin à manger se devinant par la petite table en formica encadrée par deux chaises pliantes. La fenêtre au-dessus de la table laissait se déverser la lumière du jour, suffisant comme éclairage de jour.

Maria s'avança. Traversant cette première partie en deux enjambées, elle fit une pause dans une seconde pièce tout aussi restreinte, mais vide. Les seuls mobiliers étaient un vieux tapis au sol dont le passage du temps avait tant marqué qu'il était impossible d'en deviner les motifs et couleurs d'antan, et enfin, une malle tout aussi vieille, mais encore en bonne état, laissée sous la seconde fenêtre de la petite habitation. Les voiles tirés, de couleur noir, filtraient les rayons solaires donnant un éclairage particulièrement sombre et contrastant avec la partie précédente.

Face à elle, deux portes étroites. Bien qu'ayant longtemps était l'amie et la confidente de Lucia, jamais elle ne s'était même approché de son lieu de vie. Elle se dirigea d'abord vers la porte de droite, mais un gémissement rauque étouffé provenant de l'autre pièce la fit changer de direction. Lorsqu'elle poussa la fine porte elle découvrit une pièce encore plus minuscule que les précédentes. La porte avait grincé sur trois quart de sa rotation avant de cogner contre le bois brut d'un sommier. Le lit, une place et demie, prenait presque toute la place. Le reste de l'espace était réquisitionné par une vieille étagère bancale. Ces deux mobilier criaient leur fabrication faite par une main étrangère à l'artisanat du bois. Lucia avait-elle tenté de s'essayer à la menuiserie de son vivant?

Une énième plainte, suivie du froissement des draps, recentra l'attention de la vieille femme.

Sur le lit, Julia suait à grosses gouttes. Pâle comme un linge et le visage déformé dans des plaintes muettes. On ne doutait point qu'un horrible rêve la torturait.

Après avoir bataillé dans le maigre espaces d'ouverture, Maria réussit à faire passer sa carrure de femme de bûcheron. Elle s'avança jusqu'à ce qu'elle ne puisse plus et s'assit à moitié sur le lit, près des genoux de la jeune femme. Elle lui caressa d'abord le visage, l'appelant de sa voix forte mais empreinte de douceur. Puis la secouant doucement. Julia se réveilla assez vite. La bouche ouverte en un cris resté prisonnier de ses poumons.

 Encore sous le choc de son cauchemar, elle ne remarqua pas tout de suite la présence de son amie à ses côtés, dans sa caravane. Une main enserrant fermement le tissu de son tee-shirt, là où résonnaient les battements affolés de son coeur, les yeux fermés, elle s'appliqua à ralentir sa respiration en s'adonnant à des exercices de respiration. Inspire. Expire. Inspire. Expire. Elle répéta l'exercice dix fois. À son côté, Maria ne parla pas, n'esquissa aucun geste. Elle savait par expérience que la petite Julia utilisait cette exercice qu'elle lui avait appris quand elle était gamine pour se calmer lorsqu'elle était en état de choc. La petite était souvent sujette à de nombreux cauchemar que rien ne parvenait à calmer lorsqu'elle avait trois ans. Et quand elle en sortait, elle faisait des crises d'asthme. Aussi, lui avait elle fait répéter à chaque fois cette exercice de respiration. Jusqu'à ce que ça devienne un réflexe pavlovien. Et apparemment ça marchait toujours, puisque voici la jeune Julia qui se calmait à présent.

Lorsqu'elle ouvrit ses yeux et que ses orbes noirs se posairent sur Maria elle retint d'abord un crie de surprise. Ses deux mains, dans un réflexe de protection, agrippaient le tissu de son couvre lit et elle l'utilisat pour cacher son corps. Seule sa tête en dépassait. Maria lui offrit son grand sourire de travers et lui dit, la voix aux accords graves :

- Et bien ma grande, pas besoin de t'effrayer de la silhouette de cette vieille Maria.

- Ah. Ce n'est que toi. Excuse-moi, tu m'as prise au dépourvu.

- Ahah. Ce n'est rien ma grande! Mais tu dois te dépêcher de sortir tes petits os de ce lit. Le maître te veut dans son bureau.

- Que... D'accord. Attends moi dans le salon s'il-te-plait. J'arrive tout de suite.

- Fais vite, j'ai le feu au marmites et des incapables derrière mes fourneaux.

Et sans plus de cérémonie, la cuisinière fit chemin inverse, s'embêtant toujours autant pour passer les trois quarts d'ouverture de la maigre porte.

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