Mets l'ancolie à la fenêtre.
Verdun, le 13 août 1916.
Mets l'ancolie à la fenêtre
Pour me jurer que tu m'attends,
Comme un message entre amoureux,
Un indice, un code, une lettre.
Mets l'ancolie à la fenêtre,
Pour que je sache en revenant
Si tu ne m'as pas oublié,
Et que tu ne t'es pas mariée,
Abandonnant ton bien-aimé,
Pour un voleur de coeur fougueux !
Mets l'ancolie à la fenêtre !
je saurai que tu m'aimes encore,
Malgré la distance et le temps
Qui effacent les sentiments,
Les souvenirs pleins de tendresse,
De doux baisers et de caresses
Où l'on s'enlace tendrement.
Mets l'ancolie à la fenêtre
Pour que la clameur de la guerre,
Les braises du ciel, de la terre,
S'éteignent à mon oreille heurtée.
Mets l'ancolie à la fenêtre
Pour que mes pleurs restent cachés,
Que tu ne saches la laideur,
La cruauté des artilleurs.
Mets l'ancolie à la fenêtre.
Que le canon qui tonne fort
Clame la fin de la terreur
Et des tourments et des douleurs !
Mets l'ancolie à la fenêtre
Pour que l'odeur des rats, des poux,
De l'épaisse boue et des morts,
S'efface et ne me rende fou !
Mets l'ancolie à la fenêtre
Pour rendre hommage aux accusés
Qui ont refusé d'attaquer...
Jugés pour l'exemple. Fusillés !
Mets l'ancolie à la fenêtre,
Fleur qui offre l'apaisement,
Console les âmes troublées
Des soldats, aux amours blessées.
Mélancolie à la fenêtre !
Ma vue se brouille et je suis las.
Ma peau luit d'un éclat d'obus,
De ma gorge s'écoule un flux
De cendres et de sang vermeil.
Mélancolie à la fenêtre... Mon cher amour que je ne reverrai pas !
Adrien.
Une ancolie :
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