15 octobre, Après Göttingen
À la sortie de la ville universitaire, à l’entrée de la pleine campagne, au bout de la Basse-Saxe, un champ d’éoliennes découpe le ciel à grands coups de pales. Ce n’est pas très beau, mais j’aime ces fleurs d’acier monumentales, j’aime les regarder pendant qu’elles accomplissent un pas de danse avec le vent.
En France, un célèbre philosophe-académicien s’est récemment positionné contre les éoliennes. Le philosophe attaque les éoliennes, comme Don Quichotte les moulins à vent : en jurant qu’ils sont l’ennemi à abattre. Nous servant l’habituel argument des conservateurs, il jure que la prolifération d’éoliennes dégrade le paysage français, qu’il faut le conserver tel quel, figé dans toute sa puissance poétique. Afin de mettre un point final à sa démonstration, le philosophe affirme qu’une éolienne ne fera jamais l’objet d’un poème, au contraire de l’inspirante et glorieuse nature.
L’envie me vient de prendre au mot le philosophe, en écrivant ce poème en vers libres :
L’Homme n’est rien
Que la projection de son ombre
Il radote au milieu du vide
Et les pales de l’éolienne, au loin, tournent à l’infini
Ou encore ce quatrain, que j’applique à notre année passée sur la route :
Notre corps est alimenté par le voyage,
Ainsi que l’ampoule par une éolienne,
Et quand le vent ne souffle plus,
Nous cessons d’éclairer.
Ou bien ce modeste haïku :
Si le vent tourne,
Alors est-ce vrai
Que souffle l’éolienne ?
Tout cela ne résout rien à la question de l’énergie, mais me donne matière à tuer le temps, sur l’autoroute. Et tandis que nous sommes poussés par les vents germaniques, whouuu ! nous arrivons enfin sur le seuil de notre prochain woofing.
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