Chapitre 21
Depuis ce jour, plus rien.
Yüna ne fit plus sonner les machines, son cœur ne leur fit plus aucune surprise non plus. Le groupe, quant à lui, continuait sa vie, enchaînant les apparitions à la télé, des concerts, etc. Tout en se relayant au chevet de la jeune femme.
L'hiver s'installa, enchaînant le mois d'octobre avec novembre et entama même décembre.
Shi Ji était de plus en plus sombre et ses chansons étaient tout aussi obscures. Il faisait bonne figure durant les interviews, mais quand on lui posait des questions sur l'état de la jeune femme, le chanteur se refermait, durcissant ses traits. Alexis volait à son secours pour intervenir à sa place et tenter d'apaiser son ami.
Les fans avaient tous tenté de trouver l'hôpital, afin d'y envoyer des cadeaux ou des mots de soutien, mais l'agence avait fait tout son possible pour tenir le lieu secret et avait demandé à recevoir le tout dans le bâtiment de ToXy Entrainement.
Ho Ly était chargé de tout apporter aux garçons qui lisaient les lettres à la jeune femme.
Ce fut vers mi-décembre que de nouveau, la jeune femme fit sonner les machines. Son cœur ne tenait plus et ses forces s'amoindrissaient, rendant Shi Ji complètement hystérique.
Ce jour-là, Shi Ji fut emmené hors de la chambre pour laisser de la place aux infirmières et aux médecins. Mais quand il aperçut le chariot avec la machine de réanimation dessus, il tomba à genoux, le visage baigné de larmes, implorant les dieux d'être cléments et de la laisser revenir vers lui.
Mais qui l'écouterait ? Probablement personne, car les médecins décidèrent de l'intuber pour la maintenir artificiellement en vie.
— Elle ne tiendra pas longtemps. annonça l'un des médecins de l'intervention.
Comment annoncer ça à quelqu'un qui était déjà au plus mal ? Cependant, le travail le plus dur du médecin n'est pas de trouver un diagnostic au patient, mais de l'annoncer aux proches et subir les foudres de ces derniers qui peuvent parfois s'avérer être très violents face à ce mur infranchissable ou au bord d'un gouffre plus sombre que les abysses.
Avaient-ils vraiment le choix ? Non. Il fallait faire ce travail jusqu'au bout.
Pour ce cas-ci, ils n'avaient pas besoin de dire quoi que ce soit, le jeune homme à genoux devant la porte savait déjà. Il avait compris que les médecins ne pouvaient rien faire pour cette femme qui semblait lui être chère.
— Elle vivra ! l'entendirent-ils s'exclamer avec force et conviction.
— J'aimerais avoir la même foi que vous.
— Elle ne peut pas partir comme ça. Elle reviendra... Elle me reviendra...
Voyait-il en l'avenir ? Lisait-il les astres ou quelque chose comme ça ? Si seulement il pouvait avoir raison.
Les jours passèrent sans qu'un seul signe positif ne soit détecté.
Hormis Shi Ji, tous perdaient peu à peu l'espoir de la revoir un jour.
[...]
Une voix chantait.
Qu'est-ce qu'elle chantait ? Jingle Bells ? Était-ce déjà Noël ? Pourtant il faisait chaud.
C'était la voix ! Oui, cette voix qu'elle coursait depuis un certain temps pour savoir qui elle était et ce qu'elle faisait là.
« Jingle Bells, Jingle Bells... »
Mais cette voix semblait triste. Pourtant, si c'était Noël, elle devrait être heureuse, non ?
Pourquoi était-elle si triste ?
Yüna s'assit sur le sol froid et regarda la lumière faible d'où provenait ce chant pour l'écouter. Captant l'émotion triste qu'elle dégageait, Yüna se mit à pleurer, laissant son cœur battre en rythme avec la chanson.
— Pourquoi es-tu triste ? Demanda-t-elle, sachant pertinemment qu'elle n'obtiendrait aucune réponse.
« Jingle Bells, Jingle Bells... I hope you can back to me... Jingle Bells... »
— Qui attends-tu ? Pourquoi espères-tu que cette personne revienne vers toi ?
« Jingle Bells... I miss you so much... Jingle Bells... Yüna... »
Un coup lui fit aussi mal qu'un poignard planté au fond de son cœur.
Qui était cette Yüna ? Était-ce elle ? Pourquoi aurait-elle quitté cette voix ?
Elle sentit quelque chose de mouillé lui glisser sur la main. Elle leva son bras pour observer la goutte qui fut suivie par une deuxième, puis d'autres encore.
Touchée, elle leva la main vers la lumière et réussit à percer la chaleur de cette dernière pour toucher une peau chaude.
— Qu'est-ce que...
Elle se leva, retira sa main et l'étudia.
— Qu'est-ce que c'était ?
« Yüna... pardon... Faut que tu reviennes. Je peux plus vivre sans te voir sourire encore et me défier ou voir tes joues devenir roses. Je veux pouvoir te serrer encore dans mes bras et t'embrasser jusqu'à ce que tu en aies marre. »
La jeune femme fronça les sourcils.
Cette Yüna l'avait-elle quitté ? Mais pourquoi ? Pour quelle raison laisserait-elle un homme aussi déchiré ?
Et comme dans un éclair de lucidité, tout lui revint d'un coup, comme une claque en plein froid mordant. Son agression, son hospitalisation, son voyage, sa rencontre avec... avec...
Shi Ji.
Son voyage au Japon, les problèmes, leur retour à Séoul, ses vacances avec... avec...
Shi Ji.
Son nouveau travail, ses créations, les joies partagées avec... avec...
Shi Ji.
La rencontre avec un homme important et sa décision de quitter... de LE quitter pour lui éviter des tas de problèmes, sa dépression et ses crises à répétition, la soirée et... son cauchemar.
SHI JI !
Ses yeux s'ouvrirent d'un coup.
Elle tâtonna pour essayer de trouver quelque chose de tangible et mit la main sur un avant-bras plié à côté d'elle. Elle s'y accrocha du mieux qu'elle le put pour s'extirper de ce cauchemar et revenir à la réalité.
Elle étouffait, il lui fallait de l'air, vite !
— Y... Yüna ? Tu... Docteur ! Vite ! Yüna, calme-toi, je suis là !
SHI JI !
Elle avait besoin de le voir, mais tout ce qu'elle pouvait apercevoir était une lumière aveuglante, puis une ombre précipitée qui s'affaira autour d'elle pour lui retirer le tube qui lui obstruait la gorge.
Après ce qui lui parut une éternité, elle fut enfin libérée de tout ces fils et tubes et on l'embarqua dans une salle d'examen, mais le cri qu'elle poussa retentit dans tout l'établissement.
— Calmez-vous, Madame ! On va d'abord vous faire passer quelques tests et nous vous ramènerons à votre conjoint. Encore un peu de patience, Madame, s'il vous plaît ! l'implora l'une des infirmières qui tentaient de la maintenir sur le lit d'hôpital.
— SHI JI !
Sa voix éraillée était méconnaissable, même pour elle, mais tout ce qu'elle pouvait dire ou crier était le nom du chanteur qui se précipita hors de la chambre.
— Attendez ! Attendez !
— Calmez-la, s'il vous plaît. Expliquez-lui que c'est pour son bien.
Shi Ji apparut enfin dans son champ de vision. Fatigué, ses beaux yeux émeraude avaient perdu de leur éclat et des cernes violets les entouraient. Ses cheveux étaient beaux, mais manquaient de quelque chose, son corps semblait être plus amaigri.
— Shi Ji...
— Je suis là, ma belle. Si tu savais combien j'ai espéré et attendu ce moment. Tu es là...
— Shi Ji...
Il n'osa pas la prendre dans ses bras. Il posa simplement sa main sur la sienne qui tremblait de peur.
— Écoute-moi, ces personnes vont juste t'ausculter, te poser des questions et une fois que ce sera fini, ils te rameneront dans ta chambre et je serai là. Sois forte, pour moi. J'ai tellement attendu...
Yüna le dévisagea, apeurée, mais hocha la tête et reçut, pour unique caresse, ses doigts posés sur sa tête qui glissèrent lentement. Ce geste furtif réussit tout de même à la rassurer.
Elle se rallongea, et se tut jusqu'à ce qu'on l'emporte dans une salle blanche qui sentait fort le désinfectant.
— Bien, Madame. Nous allons d'abord vérifier vos signes vitaux et votre pouls et ensuite, nous vous poserons quelques questions. Vous pensez pouvoir réussir à nous répondre ?
Figée par la peur et le manque de ce contact qui l'avait tenue en sursis, elle répondit à l'infirmière d'un petit hochement de tête.
— Bien, alors commençons.
***
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