Vous vous appelez Jade. Jade Cortes. Vous êtes une jeune étudiante de dix-neuf ans ayant emménagé à Paris depuis pratiquement un an pour intégrer la prestigieuse école d’art qui vous faisait rêver depuis toute petite. Nous sommes au début du mois de Juin et vous approchez de la fin de votre première année. Globalement tout s’est à peu près bien passé, mais pour être sûre de la valider vous devez encore rendre quelques devoirs avant la fin des cours.

A côté de cela, vous tolérez la vie parisienne plus que vous ne l’appréciez. En tant qu’étudiante, vous n’avez pas beaucoup de sous et les sorties se limitent généralement à peau de chagrin. Votre famille dans le sud de la France n’est pas des plus riches et vos parents ont déjà eu la lourde charge de payer votre première année ainsi que votre loyer – indécent pour les prestations – tous les mois. Ils ne peuvent pas vraiment assumer davantage pour vous. De plus, de nature plutôt réservée, vos seuls amis se limitent à des camarades de promo que vous voyez de temps en temps après les cours, mais avec lesquels vous n’entretenait aucune réelle relation amicale. Vous vivez donc au jour le jour, à manger des pâtes et du riz, préférant souvent rester dans votre petit appartement de quinze mètre carrés les soirs et les week-end à regarder des films et des séries sur Netflix plutôt que de sortir au ciné ou ailleurs, faute d’argent.

Vous pourriez continuer à vivre ainsi jusqu’à la fin de votre master, dans l’ensemble ça vous irait bien. Malheureusement, ce n’est pas aussi simple. Votre père a perdu son emploi le mois dernier et vos parents n’auront plus suffisamment de revenus pour payer vos dépenses l’années prochaine, même avec les aides. Vous vous souvenez encore de l’appel de votre mère, en larmes, pour vous annoncer la mauvaise nouvelle : « Je suis vraiment désolée ma chérie. On t’aime et on veut que tu réussisses. On a envoyé les sous pour ta deuxième année mais là on est à sec et on ne pourra plus te payer ton loyer... Oh c’est horrible, je ne sais pas comment on va faire... ». Vous l’aviez rassurée en lui promettant ce n’était pas grave, qu’ils avaient déjà fait beaucoup pour vous et que maintenant c’était à vous de vous assumer toute seule. Après tout, vous n’êtes pas la première étudiante à devoir prendre un petit boulot à côté des cours. Si d’autres y arrivent, pourquoi pas vous ?

Vous vous êtes alors mise à la recherche d’un petit boulot étudiant... Et vous avez vite déchanté ! Vous n’avez trouvé que des offres dans des fast-food ou bien en tant que serveuse à temps partiel dans des bars. Même si ça ne vous fait pas rêver, pourquoi pas à la limite. Seul problème : ce n’est pas avec ce qu’ils vont ont proposé comme salaire que vous allez pouvoir vivre ! D’autant qu’il vous faut également penser dès maintenant à mettre des sous de côté pour votre troisième année si vous voulez continuer ces études qui vous passionnent. Vos parents ne seront peut-être pas capable de la financer l’année prochaine ! Vous avez déjà des difficulté pour vivre dignement, mais là vous risquez carrément de devoir repartir fissa chez vous la queue entre les jambes. Ou bien de rester ici, mais à la rue !

Les semaines passant, vous avez demandé à vos camarades de classes avec qui vous vous entendez le mieux comment ils faisaient, eux. Vous avez vite compris que la plupart, pour étudier dans votre école, ne venaient pas vraiment du même "monde" que vous et avaient des familles pleines aux as. Forcément, c’est plus simple...

Alors que vous commenciez sérieusement à désespérer, Laura, assise à côté de vous en amphi le vendredi après-midi, avait fini par vous donner un tuyau intéressant. C’est une jolie brune aux jambes interminables, un peu BCBG, du style à attirer les regards de tous les mecs autour d’elle. Vous la trouvez sympa, même si vous ne partagez pas vraiment les mêmes centres d’intérêt qu’elle. « Ma cousine travaille pour un magazine en vogue à Paname », vous avait-elle dit ce jour-là. « C’est un nouveau magazine de mode mais je ne peux pas te donner son nom car pour l’instant c’est tout nouveau et ça marche avec du bouche à oreille. Il paraît qu’ils recherchent des modèles d’un tout nouveau genre, je te file leur numéro si tu veux. Tu demandes à parler à Carole et tu lui dis que tu appelles de ma part. J’aurais bien postulé moi-même, mais j’ai déjà mon boulot chez Dior tu comprends... ».

Après avoir retenu un petit rire nerveux – décidemment vous n’êtes VRAIMENT pas du même monde –, vous avez malgré tout pris le numéro par politesse, mais en vous doutant bien que ça ne vous correspondrait pas. Certes vos amies vous ont toujours dit que vous étiez une fille plutôt mignonne – et vous-même ne vous considérez pas comme un laidron non plus – mais une petite blonde d’un mètre soixante-cinq, fine, des légères taches de rousseur sur les joues... Ça plaît peut-être à des garçons de la campagne, mais clairement pas à un magazine de mode ! Malgré tout ce jour-là, elle avait sans le savoir planté une graine dans votre esprit...

Ce soir, quelques jours plus tard, cette graine a poussé et plus vous y pensez, plus vous vous dites « Après-tout pourquoi pas ? ». La mode... N’avez-vous pas toujours rêvé de devenir artiste ? De concevoir de jolies choses ? Et pourquoi pas des vêtements ? Il s’agit peut-être là d’une porte d’entrée inespérée dans un monde qui vous resterait sinon probablement à jamais inaccessible... Et puis après tout, s’il faut passer par quelques photos pour se faire une place, pourquoi pas ! Qui ne tente rien n’a rien, vous pouvez toujours aller voir ce qu’il en retourne, ça ne coûte rien et ça pourrait résoudre votre problème de trésorerie ! Car, pour vous, être modèle ça doit rapporter gros. Tant que vous ne faites pas de nu, ça ira. Ce soir donc, prise d’une soudaine et inattendue envie de sortir de votre "zone de confort" et de tenter de nouvelles expériences, vous prenez votre téléphone, composez le numéro, et... vous obtenez un rendez-vous pour ce samedi à 9h30 ! Bingo !

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