Chapitre 1
Un soir de décembre comme tous les autres.
Derrière le comptoir du bar à vins, je nettoyais les plateaux avant d'y déposer une série de grands verres à pied. L'ambiance était cozy. Lumière pas trop forte, reflétant les tapisseries couleur bronze. Les lambris à mi-hauteur du mur étaient faits d'une alternance de sombre et d'ivoire.
La musique, un jazz apaisant, circulait de table en table, sans écraser les conversations.
Comme tous les soirs, je resserrais le long tablier noir à ma taille, et le buste droit, terminais les commandes pour que le serveur s'en saisisse.
Un soir de décembre comme les autres, oui. Les mêmes habitués. De nouvelles têtes, attirées par une revue à la mode ou quelque curiosité. Et puis des anciens revenus depuis peu après une longue trêve dans d'autres établissements.
Des hommes, des femmes, invitées pour la plupart. Il y avait dans ce mélange cosmopolite comme une sorte d’harmonie. D'élégance. Comme un ensemble stable et mouvant à la fois. Il arrivait que quelque chose dépareille quelques fois. Une erreur de casting. Un mauvais calcul ou une bouteille de trop. Dans ces cas-là, il était de mon ressort de les amener vers la sortie le plus diplomatiquement possible.
C'était dans ma nature. Personne de peu de mots, je gardais pour moi les pensées et les réflexions que m'inspirait le monde. Et, d'une nature peu bavarde, cela m'allait bien de ne pas me mêler des affaires des autres. Lorsque, vraiment, je n'avais pas d'autre choix, c'est d'un sourire poli que je sortais les importuns dans la ruelle. Une plongée dans mes yeux clairs, doux mais décidés, les empêchait souvent de pousser plus loin le grabuge.
Éthéré. C'est ainsi que certains m'appelaient. Fantomatique aussi. Un manque de présence qui n'en était pas un. Les gens n’arrivaient pas à me saisir. À comprendre qui j'étais. Je faisais partie de leur monde et ne même temps j'en étais si loin. Cela m'allait bien. C'était une forme de liberté de ne faire partie de rien. Et en même temps une sorte de protection aussi. Que les gens n'attendent rien de moi empêchait toute désillusion. Toute blessure. Et blesser qui que ce soit aurait été la dernière de mes volontés.
Je n'en avais pas le droit. Jamais. C'est d'ailleurs pour cela que j'étais là, dans ce bar à vin, autant de soir par semaine que je le pouvais.
Je redressai le torse. C'était un choix. C'était le mien. Rien à redire là-dessus donc. Garder le cap jusqu'au bout. Je m'étais fixé une ligne de conduite, je la respecterais.
Je lui devais bien cela.
Penser à ma mère fit courir un long frisson le long de ma colonne vertébrale. Un frisson de mauvaise conscience.
Je secouai la tête. Non, je n'étais pas un mauvais fils. Non, je ne le serai pas. Jamais.
Jamais... Que de grands mots je me bombardais la tête pour ne pas penser. Pour conserver les yeux rivés sur ma décision.
Elle n'aimait pas que je travaille autant pendant mes études d’œnologie. Elle avait les moyens à présent. Elle avait toujours tout sacrifié à ma réussite. Elle aurait préféré que je rentre au chaud, en sécurité. Là où elle pensait qu'était ma place.
Sauf que... C'était pourtant bien la maison, que je fuyais ainsi. Que lui dire ?... La vérité ? Jamais. Non, elle ne devait jamais savoir.
Je poussai un soupir las qui surprit mon collègue de comptoir de ce soir. Il leva les yeux vers moi, et ouvrit la bouche comme s'il allait le demander ce qui me passait par l'esprit. Puis il se ravisa, conscient qu'il n'aurait pas de réponse. C'était comme ça avec tout le monde. Enfin, depuis quelques années, ça l'était devenu.
Le manager du bar me retint quelques instants, alors que mon manteau sur le dos je m’apprêtais à partir, mon service terminé.
- Niels, n'oublie pas ton chèque.
Je hochai la tête et fis un sourire.
- Et couvre-toi, il fait vraiment un temps glacial dehors.
En moi-même je me dis que sans doute, il préférait que je ne tombe pas malade pour éviter d'avoir à me remplacer. Ou alors était-ce de la pure bienveillance à mon égard. Qui sait. Je n'avais jamais été très bon pour lire les intentions des autres envers moi.
Je remerciai et sortis dans la nuit gelée.
En effet, il n'avait pas menti. On sentait presque la neige en suspension au-dessus de nos têtes, prête à descendre en bourrasques avec le vent givré. Je resserrai mon écharpe autour de mon cou dans un grelottement inconscient, et enfonçai mes mains au fond des poches de mon manteau.
Je longeai les rues, et atterri sur les grands boulevards. La Fayette. Haussman. Les lumières dans les vitrines m'attiraient. Comme avant. Devant ces devantures, remplies à craquer de jouets, d'automates et de paquets multicolores, j'étais un éternel enfant. Dans ma gorge, une bile acide se manifesta.
Non, je n'avais pas oublié que lorsque j'avais encore l'âge de croire au père noël, jamais je n'aurais imaginé un jour avoir la possibilité de me payer un de ces cadeaux.
Dire que nous ne roulions pas sur l'or à l'époque était un euphémisme. Même moi je le voyais bien.
Mais ma mère tenait toujours à m'offrir quelque chose à Noël. Que l'emballage soit le plus grand, le plus coloré possible. Avec des tonnes de rubans qui renvoyaient des étincelles sur les murs.
Il fallait que la normalité rentre dans notre vie, comme si nous étions des gens normaux. Elle faisait de ce moment-là une parenthèse enchantée. Elle éteignait toutes les lumières de notre petit appartement. Elle ne laissait que la lampe de chevet pour tamiser et rendre réellement magique ce moment de grâce.
Et du haut de mes quelques années, les yeux remplis de paillettes, je saisissais le papier à pleines mains pour l'arracher le plus vite possible. Des années après, seulement, me suis-je rendu compte à quel point cela avait dû être éprouvant de voir à quelle vitesse de réduisais en miette le fruit de longs mois de salaire.
Mais à l'époque rien n'existait plus en dehors du robot transformeur de seconde main, ou la panoplie de cowboy suffisamment grande pour qu'elle puisse m'aller pendant plusieurs années. Rien n'existait plus. Pas même les fenêtres calfeutrées au papier journal qui combattaient l'humidité. Aucune lézarde dans le murs, plus de compteur trafiqué dans la cage d'escalier pour tenter d'obtenir de l'eau chaude pour se laver debout dans la cuisine. Rien. Pas même le repas frugal mais servi dans des plats en carton doré pour l'occasion.
Non, Noël avait l'odeur de l'amour de ma mère. La couleur de ses yeux éblouis devant mon sourire éclatant. Et dans ces moments-là, elle réussissait à tout oublier aussi. La vétusté, les courants d'air, et la toux rauque qui ne la quittait jamais dès que l'hiver arrivait.
Noël avait la douceur de ses bras lorsque nous nous endormions ensemble dans le même lit.
Heureux d'être deux, au moins.
Dans les vitrines des Galeries Lafayette, des scènes champêtres, à grand renfort d'ours en peluche endimanchés, se disputaient le titre de plus belle installation avec une conquête spatiale en Lego technique.
Pendant des années, mon plus grand rêve avait été de me faire enfermer, une nuit, dans un de ces grands magasins. Pour pouvoir y vivre une vie de Prince, l'espace de quelques heures. Pour faire semblant de pouvoir tout posséder.
Me promener dans les épiceries fines et imaginer pouvoir choisir tout ce que je voulais. Des fruits jusque-là inconnus, venus d'îles lointaines aperçues sur les atlas de géographie. Des boites de chocolat brillants, avec des rubans plus larges que mon pouce. Faire semblant d'hésiter devant l'étalage de pièces de viande que je ne pourrais jamais finir.
Je serais monté à l'étage suivant avec mon panier plein sous le bras. Je me serai baladé au milieu des rayons d'habillage pour me faire beau, pour l'occasion.
J'aurai encore gravi quelques marches, et je serai arrivé dans la caverne d'Ali baba. J'aurais posé mon panier rempli par terre, pour un pique nique improvisé. Et j'aurai passé des heures au milieu des jouets. À tout explorer. À ouvrir délicatement chaque boite pour être sûr de bien pouvoir les refermer sans que l'on voie que je m'en étais servi.
J'aurais installé les soldats de plomb au premier rang. Les robots plus grands en deuxième ligne. Les voitures télécommandées auraient monté la garde sur les flancs, en renfort. Les escadrilles d'avion, prêtes à décoller depuis les hauteurs d'une gazinière en plastique, attendraient le signal pour se joindre à la charge de la cavalerie de petits poneys rose et turquoise.
J'aurais mis de la musique par les hauts parleurs. Pas des cantiques de noël, non. Pas des chants pour enfant. Non. Des musique de grand. L'envol des Valkyries. C'était le seul morceau que je connaissais car de temps en temps la voisine de la chambre d'à côté le mettait en boucle. Et pour moi, c'était le symbole de l'âge adulte.
Car je n'aurais pas été petit, dans cette aventure. J'aurais été un explorateur. Un milliardaire en promenade, venu en cachette savourer le plaisir solitaire de ce qui lui appartenait.
J'aurais joué des heures.
Pas pour les gloires militaires, pas pour une soif de pouvoir que je n'éprouvais pas. Non. Juste pour les millions de possibilités. Pour pouvoir toucher, courber selon mon envie toutes ces choses qui me faisaient tant rêver, que je n'avais qu'à moi l'espace de cette nuit.
Et dans mes rêves les plus fous, j'aurais terminé, fatigué mais heureux, ma nuit dans le grand magasin au dernier étage. J'aurais emmené ma mère. La tenant par la main pour qu'elle me suive comme une invitée. Comme si elle aussi, avait été une reine.
Autour de nous des dizaines de lits déjà faits nous auraient tendu les bras. Des sommiers confortables et des matelas moelleux. Sans trous, sans humidité, tout neuf, sentant bon l'odeur des tissus hors de prix que seuls, dans ma tête, les maharadjahs pouvaient se procurer. Nous grimperions dans un lit vertigineux et nous nous enfouirions dans des couettes en plumes d'une épaisseur improbable. D'une chaleur jamais connue.
Et le temps resterait là. Immobile. Pour l'éternité, nous appartiendrions à ce rêve parfait et inatteignable. Oui. J'ai longtemps pensé qu'être un jouet en plastique lisse et immobile dans ces vitrines était ce qui aurait pu me procurer le plus grand plaisir au monde.
Je souris. Avec ce que j'avais dans la poche aujourd'hui, je pouvais très bien me payer un de ces machins. Mais je n'en ferai rien. J'économisais tout. Centime après centime. Pièce après pièce.
En reprenant ma route dans la nuit glaciale, je réfléchissais à ma soif d'indépendance financière.
Oui ma mère s'était saignée pour que nous ayons l'essentiel. Un toit, même pas tout à fait étanche, au dessus de nos tête. L’électricité, même en dehors de la trêve hivernale. Et un frigo avec des trucs dedans. Jamais plein. Au cas où le courant nous lâche et qu'il faille jeter les aliments qui auraient tourné, disait-elle.
J'ai lu un jour le témoignage d'une célébrité qui racontait son enfance. Comment sa mère, discrètement, rallongeait le lait avec de l'eau, pour qu'il puisse prendre son goûter quand même, en y trempant des gâteaux gonflés et sans goût, larges comme le plat de la main. Les journalistes s'étaient offensés, pensant qu'il en rajoutait pour faire larmoyer les lecteurs. J'avais été affolé de voir à quel point les gens étaient ignorants de la réalité de beaucoup d'habitants de ce pays.
Je ne m'en était rendu compte que tard. Car toute cette réalité était ma normalité. J'allais à l'école, comme tout le monde. J'y étais plutôt bon. Discret mais studieux. J'étais habillé normalement. Sans marque, certes, mais sans trous. Rien à l'extérieur ne laissait penser que je pouvais être différent.
Certes le voisinage n'était pas de celui où les pelouses sont tondues nettes et où on pique nique dans le jardin le dimanche. Nous n'avions pas de pelouse.
Le quartier, pas forcément mal famé, était de ceux qui auraient nécessité d'être rasé pour être reconstruit à neuf. Mais visiblement la mairie avait d'autres priorités.
Nous avions droit à un deux pièces grâce à l'aide sociale. Mais comme il y avait plus de gens à caser que l'on ne disposait de place, nous partagions. Au début il y avait eu Maria. Une mauricienne qui ne quittait jamais sa tenue bariolée, avec ses deux enfants. J'aimais bien les avoir avec nous. C'était vivant et plein de bruit. Elle chantait tout le temps, tandis qu'elle préparait de grandes bassines d'huile bouillante pour faire frire le repas du soir.
Puis Maria est partie, pour une question de papiers avait dit ma mère. Il y eu ensuite Fabella, qui lisait les cartes le jour au marché aux puces, et qui se déguisait la nuit, dans un cabaret. Cela je l'ai appris par Jonathan, le voisin du palier qui était plus âgé que moi. Il avait le droit de se promener le soir, lui.
Ma mère ne voulait pas que je sorte. Pour que je ne fasse pas de mauvaise rencontre, ou que je succombe pas à je ne sais quelle tentation. Comme l'alcool sans doute. Pour que je ne ressemble pas au monsieur qui battait sa femme, juste sous notre appartement. Quand cela lui prenait, ma mère mettait la musique à fond et se lançait dans une grande lessive. Pour faire un maximum de bruit dans l'évier avec la bassine et la brosse, sans doute. Pour que l'anormalité ne rentre pas chez nous, sans doute.
Tout cela je ne l'ai compris qu'après. Cette protection dont elle m'a entouré toute ma vie, je ne l'ai vue que lorsque j'ai quitté la Tour où nous vivions, parqué comme des animaux sans avenir.
La dernière colocataire forcée fut une vieille dame. Sans ressource, comme la plupart des gens qui habitaient cet endroit. Sa santé était vacillante, et ma mère, comme toujours, ne pouvait pas rester indifférente. C'est elle qui aimait les Valkyries. En boucle et trop fort certes. Mais c'était sa lucarne de bonheur. Je n'ai jamais su ce que cela représentait pour elle. Mais je voyais bien, à la lumière qui éclairait son visage plissé dans ces moments-là, qu'elle revivait des heures insouciantes. Lisses et sans nuage.
Ma mère s'est occupé d'elle jusqu'au bout. Elle n'était pas infirmière, même si elle aurait aimé le devenir. Même pas aide soignante. Il aurait fallu un diplôme qu'elle n'avait jamais eu le loisir de passer. Mais elle touchait du doigt son rêve en faisant le ménage dans un grand hôpital de la ville.
Quand elle croisait les patients, elle s'assurait d'avoir un mot pour chacun. De la bienveillance, à ne pas faire de bruit. À ne pas déranger. Un sourire discret mais sincère sur la bouche, elle faisait ce métier dont personne ne veut. Que personne ne veut voir. Parce qu'il n'est pas beau. Parce qu'il traite de tout ce qu'il reste de notre humanité, une fois qu'on a retiré les paillettes et les faux semblants.
Mais elle le faisait avec application.
Personne n'a jamais pu réellement sonder la profondeur du cœur de ma mère à part moi. Enfin, c'était ce que je croyais. Jusqu’à ce qu'un des patients de l’hôpital ne se mette à attendre son passage, jour après jour, nuit après nuit. Inlassablement. Et qu'il en vienne à souhaiter ne jamais guérir de sa double fracture tibia-péroné.
Je n'y ai pas fait attention, du haut de mon âge. Enfant, on ne comprend pas toujours pourquoi les joues de sa mère sont plus roses, pourquoi les yeux sont plus brillants. Pourquoi les chansons fredonnées en faisant la cuisine sont nouvelles, inventées et joyeuses.
Non.
On ne s'en rend réellement compte que le jour où on quitte la Tour pour de bon. Ça comme le reste. Quand l'ombre du quartier s'estompe, laissant derrière elle les souvenirs et la normalité qui n'en était peut-être pas une, après tout.
On s'en rend compte lorsque l'on gravit les marches d'une grande maison. Comme dans les films. Une avec un jardin devant, et un mur en belles pierres qui fait tout le tour. Quand la porte s'ouvre, lourdement, dans un temps étiré, infini, pour laisser la place à cet homme au tibia réparé, un immense sourire accroché au visage.
Il avait su lire la bienveillance, le courage, l'abnégation qui m'était accordé tous les jours depuis ma naissance. Et il avait souhaité lui rendre tout cela. Le partager avec elle. Avec nous. Faire de nous tous une grande et belle famille. Sans plus aucune fissure au-dessus de nos têtes. Il avait, lui aussi, tellement de choses à donner. Un tourbillon d'amour dont il entendait bien nous recouvrir. C'était grisant. C'était si nouveau.
Ce fut la première fois où je vis ma mère pleurer. De joie. D'une espèce d'abandon où elle s'ouvrit complètement, entièrement. Sans fausse pudeur, sans retenue. La première fois de ma vie.
Qu'y pouvais-je, si je n'étais pas assez ? Qu'aurais-je pu dire, qui aurait risqué de nuire à cette explosion de joie, à cette bulle intense et jamais escomptée qui l’entourait?
Rien. Il n'y avait rien à dire. Elle voulait cela. Sur le moment, j'étais juste content pour elle. Je ne me rendais pas compte à quel point ma vie allait être différente, elle aussi, à présent.
Et à ce moment précis je me promis à moi-même de ne jamais faire quoi que ce soit pour lui enlever son bonheur.
Pleins de choses se sont précipité dans ma tête, sur le perron de cette magnifique maison, ce jour-là.
Elle était heureuse. J'allais l'être aussi. Elle n'aurait peut-être plus à assurer les services de nuit pour une poignée d'euros, à l'autre bout de la ville, mal desservis par les bus et les métros.
Cet homme avait l'air bon. L'avenir me confirma qu'il l'était. Et à cet instant présent, il rayonnait comme elle d'un amour infini.
Noyé dans ces sensations d'adultes mal adaptées à mon cerveau d'enfant, je m'écartai de ma mère pour respirer. C'est là que je me rendis compte que je n'étais pas seul, dans cet embarras.
Derrière les jambes de l'homme qui allait devenir mon père, je vis apparaître une tête brune.
Un peu plus grand que moi, et sensiblement plus âgé. Un an ou deux de plus, peut-être. De grands yeux noirs me fixaient avec intensité. Des milliers de questions fourmillaient dans les iris expressives. Intelligentes. Que vit-il en me contemplant ainsi. Je voulus pas savoir ce qu'il lisait en moi.
Un sourire, timide, monta sur ma joue. Instinctivement, j'avais eu envie que ce garçon soit mon ami. Il hésita un instant. Puis lui aussi sourit. Réflexe ou connivence, qui sait.
On nous envoya jouer ensemble. Je ne me fis pas prier. C'était la première fois que j'allais jouer chez un copain. Naturellement, avec l'insouciance des enfants de notre âge, avec ces cœurs battants à l'idée des rires et des aventures extraordinaires à venir, il attrapa ma main pour monter les escaliers jusqu'à sa chambre. La main fut étrangement chaude dans la mienne. Picotements inconnus. Ce n'était pas désagréable.
J'avais huit ans, le jour où je le rencontrai pour la première fois.
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