Les fleurs du coeur
Depuis le début, je suis là. Dans les vibrations moites de cette ville, de ce pays de jungle et de chaleur.
Appuyée à la balustrade de son balcon, Constance rêvasse. Son esprit dit vague, quand son corps digresse. Tourmentée, elle a l'âme qui trébuche.
Pourtant, de son coeur apaisé partent des rayons de soleil et de joie, et ceux qui lui reviennent la chauffent et la brûlent. Mais que faire de tout cela ? Vers qui se tourner ? C’est l’esprit qui cherche.
Constance le sait, la bulle n'a plus de sens. Ne reste que cet appétit qui lui tient au corps.
Mords, joue, danse, rêve, fuis. Reviens, redanse, réjouis. Toi.
Elle soupire, calme au dehors et fébrile en dedans. Expire.
Charivari intime, tu t'es bien arrimée
A mes pensées, à mon sourire
Regarde comme tu me fais valser
Rugueuse douceur
Oriflamme de ta soif
Unanimes unalomes ensevelis
Sous la voûte de nos tendresses
Enamourés, et âmes heureuses
Libres, vivants
Ma joyeuse Constance, si tu savais comme je t'aime.
Incandescente à deux, à trois, à l'infini.
Comme la flamme s'éteint par manque d'oxygène, sous globe tu déclines.
Comment te garder enfermée ?
Alors vas-y.
Vis jusqu'à en perdre la raison, jusqu'à la déchirure.
Ainsi, tu sauras.
Et moi, fou parmi les fous, à tout perdre que n'ai-je pas aimé ?
Sur les lèvres chaudes de Constance, un sourire se dessine ; à l’horizon, des voiles. De pluie.
La mousson d’été est là. Humide et chaude.
Dis-moi Constance, à quoi ça tient, finalement ?
Brûler, refroidir, sentir les frissons, aller les chercher.
Prendre un coup de jus, celui qui remet un peu en place.
Espérer, tendre l’oreille et le cœur.
Tu as vu la forme de ce nuage ? Entendu la musique, là ?
Donne ta main pour voir, entremêle nos doigts. Tu sens ?
C'est doux.
Profite de ces moments, enfile-les comme des joyaux sur le fil de la mémoire.
Des souvenirs, vécus, flambés, déjà passés mais infiniment là.
Vive, hante mes vies, viens, vivante.
Dans l'ombre du rideau safran, sur le dos de Constance, naissent des fleurs de lumière. Elles s'entrelacent en silence et sillonnent sa peau, embrassent ses souvenirs, embrasent son sang, dérident les regrets, lissent les peines, effleurent les joies.
Jasmin pour les regards sous la pluie, tournesol pour l'éclatante connexion, rose pour l'amour qui court toujours, myosotis pour celui qui se cache, orchidée pour la clémence, chardon, amaryllis, coquelicot, pois de senteur, et tant d'autres : un bouquet à sécher contre soi.
La houle se lève ; Constance est déjà debout.
De loin, je la regarde descendre les marches qui mènent aux dehors inexplorés.
Fier. Heureux.
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