Chapitre 5
Si Daphné n’avait pas posé sa main sur l’épaule de Nanoki, elle serait restée des heures, les yeux fixés sur l’écran à attendre. Attendre quoi, elle ne savait plus. A ce niveau-là, c’était surtout l’espoir qu’elle essayait de rattraper.
Elle reprit contact avec la réalité. Elle pensait que les autres la fixeraient, un sourcil haussé. Néanmoins, la moitié n’avait toujours pas levé les yeux de leur tablette. Et l’autre moitié avait la tête baissée. Sauf Soen et Eden qui fixait un des paniers de basket d’un air rêveur. Aussi, Aaron et Léo gardait la tête haute.
— Il suffit ! Nous n’allons pas rester ici à nous apitoyer sur notre sort ! Ce n’est pas comme cela que nous quitterons ces lieux.
— Bien dit, Léo. Et je propose que nous… J’ordonne que tout le monde m’écoute !
Les derniers qui étaient sur leur tablette levèrent aussitôt la tête.
— Je disais donc, nous commencerons comme je l’ai dit plus tôt par aller vérifier cette fameuse barrière.
Sans attendre de réponse, ni même observer leur réaction, Aaron monta les escaliers afin de quitter le gymnase. Léo, lui, jeta un regard méprisant à l’assemblée avant de suivre le leader.
Ils les imitèrent, non seulement parce que s’ils ne bougeaient pas, Aaron leur ordonnerait de le faire, mais surtout parce que Léo avait raison.
Nanoki n’y aurait pas penser d'elle-même. Pas aussi tôt, du moins. Juste quelques heures le temps de diriger la nouvelle et peut-être qu’elle aurait eu une idée de génie similaire à la sienne.
Bien qu’après réflexion, elle n’était pas sûre que quelques heures lui suffiraient.
Ils marchèrent hors des chemins, à travers les bois.
Nanoki apporta son poignet à son visage. Son bracelet y trônait toujours, la tablette miniature à nouveau à sa place d’origine. Comment cet objet pouvait-il la retenir prisonnière dans une forêt. Cela n’avait pas de sens.
Aaron, qui était devant, se cogna contre ce qui devait être la barrière invisible. Le leader pesta et se frotta le front.
Comme son nom l’indiquait, cette barrière était invisible. Cependant, il était facile de connaître son emplacement car, derrière, seul un épais brouillard était visible.
Cela faisait une heure qu’ils marchaient. Soen et Eden s’assirent dos à la barrière.
— On a fait tout ça pour rien ! se plaignit SOen.
— Peut-être qu’on peut appeler de l’aide, supposa Anaïs.
Afin de vérifier sa théorie, elle cria à s’en casser la voix. Cependant, à part l’écho de sa voix, il n’y eut rien d’autre. Et ils eurent beau attendre dans l’espoir que quelqu’un vînt et les découvre, en vain.
— On a vraiment fait ça pour rien, confirma Eden.
— Non, pas forcément. Cette barrière ne peut pas être parfaite, il doit y avoir des failles… Nous allons nous séparer et faire le tour en touchant la barrière. Nous finirons bien par trouver un espace que l’on pourra traverser.
Soen et Eden soupirent.
Nanoki les comprenait. Mais ils ne devaient pas abandonner si vite. Même si elle s’écroulait de fatigue à la fin, ou même avant, elle devait donner le tout pour le tout. Elle ne supporterait pas de dormir ici. De rester ici tout court.
Aaron lança un regard de reproche aux deux assis qui se levèrent aussitôt.
— Dans ce cas, débuta Léo, nous allons nous séparer en deux groupes. Un partira à gauche et l’autre à droite.
Les autres acquiescèrent. Ainsi, Soen, Eden, Timéo, Anaïs, Daphné, Nanoki, Gaël ainsi que Kaïs partirent vers la droite. Le reste partit donc à gauche.
Ce fut le commencement d’une éternelle marche qui fit regretter les escaliers à Nanoki. La main collée à la barrière, leur progression stagnait. Les plus petits, Soen et Timéo avançaient accroupis afin de toucher la partie basse de la barrière. Les plus grands, Gaël, Kaïs ainsi que Nanoki gardait la main contre la partie haute. A chaque pas qu’ils faisaient, ils sautaient le plus haut possible.
De ce fait, cela rendait pour les cinq l’avancée plus rude et plus fatigante. C’est pourquoi après un temps, ils durent faire une pause, adossés à la barrière.
— On va jamais s’en sortir… gémit KaÏs d’une voix suraigu.
— Ne dit pas ça. L’instigateur à forcément laissé une possibilité de sortie, que ce soit par erreur d’inattention ou autre, le rassura Gaël.
Il accompagna ses paroles en posant sa main sur son épaule. Mais plutôt que de le rassurer, cela le fit sursauter et il s’éloigna vivement.
— Désolé, je voulais pas te faire peur…
Après cinq minutes de pause passé dans le silence, sans compter les sanglots de Timéo ainsi que les murmures de Kaïs, ils reprirent contenance.
Au total, ils durent faire une dizaine de pauses.
Nanoki haletait, les poumons en feu alors que ses jambes supportaient son poids de justesse. Lorsqu’ils retrouvèrent l’autre groupe, la lune les éclairait de sa lumière.
Nanoki manqua de s’effondrer. Heureusement Daphné parvint à la rattraper avant que ses fesses ne rencontrèrent le sol.
— Nous n’avons… rien trouvé… et vous ? articula Aaron.
Il tentait tant bien que mal de dissimuler le fait qu’il était essoufflé, sans grand succès.
Anaïs se contenta de secoua la tête en guise de réponse.
Quinze heures de marche presque consécutives, ce n’était pas rien. Même ceux qui marchaient normalement ne demandaient qu’à s’asseoir, et pour de bon.
Au lieu d’aller au gymnase, ils allèrent devant les maisonnettes. Nanoki marchait à l’aide de Daphné, tout comme les autres qui se soutenaient.
Quand Daphné la laissa devant la porte de sa chambre, elle crut que ses jambes allaient se dérober. Ce fut un miracle qu’elle tînt encore debout. Enfin, debout, elle devait se tenir contre un mur, incapable de se soutenir seule.
Elle pénétra dans sa chambre. Elle prit à peine le temps de regarder l’intérieur. Elle récupéra seulement la clé afin de verrouiller la porte. Après cela, elle se souvint s’être laissée tomber sur son lit, puis les ténèbres l’envahirent.
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