Rêveur
Plusieurs tours de fils plus tard, la jeune curiosité de l'île contemple mélancoliquement le mur d'actus, et soupire. "Qu'est-ce qui t'arrive ?" Il se retourne, et retrouve la jolie jeune fille qui lui a tenu compagnie ces derniers temps. "Ah ! salut, je...tu vas bien ?..." bredouille-t-il. Et il lui raconte ses vagues à l'âme.
- On me prend pour un rigolo, mais en vrai...je suis un rigolo. Et c'est ça mon tragique.
Elle plisse les yeux, d'un air intrigué, intéressé.
- Tu sais ce qu'ils disaient, à l'annonce publicitaire où je travaillais ?
- Ah ? Tu as travaillé dans une agence de pub ?
- Oui. Ils disaient que j'étais un gars prometteur.
- Oh ! mais c'est bien, non ?
- ...Tu ne saisis pas... Ils voulaient dire que je promettais plein de trucs et que je les faisais jamais. Je suis une espèce de rêveur. Le rythme dans les nuages n'est pas le même que sur terre.
- C'est marrant parce que tu sors parfois des phrases comme ça... C'est comme aléatoire. Tu es très étonnant.
- Bibip Bôbip !
Ils se retournent tous deux et voient un robot s'approcher et les dévisager.
- Euuuuh... Quelqu'un peut traduire ?
- Elle dit que vous lui rappelez quelqu'un.
Ils se retournent à nouveau, et Fabien songe qu'on jurerait le début du troisième volet de la Planète des singes.
- Pardon, je ne me suis pas présentée, moi c'est Gobbo, et ce robot est de mes amis.
- Bububiii Rêveur
- Le gars en question s'appelle Rêveur.
- Ah ! mais oui, je le connais ! T'as raison, on devrait lui présenter ! Très bonne idée monsieur !
- ...Euh...c'est madame. Ou mademoiselle.
- Oups ! pardon madame !
- Non mais mademoiselle ça m'aurait convenu hein... Enfin bon...
Puis le groupe s'attabla et on but cidre et autres alcools - Fabien commanda un coktail dont tout le monde ignorait l'existence.
- Vous ne pouvez vraiment pas organiser de rendez-vous ?
- Non, Rêveur, rien à faire, tu ne sais jamais s'il s'apprête à publier toute une nouvelle oeuvre ou s'il ne va plus rien créer en deux semaines. Et il est capable de faire un roman pour commenter l'oeuvre de quelqu'un. D'ailleurs je ne l'ai jamais vu que de loin.
Fabien et Camille rougirent, parce qu'ils se reconnaissaient en partie.
- Mais buvons, en attendant, pendant que le loup n'y est pas !
Mais c'est alors que le jeune homme discret attablé à l'autre table et caché derrière sa tasse de thé fit brusquement irruption en déversant sur la table une avalanche de bouquins et en se posant avec un toupet incroyable sur une place libre du banc.
- Salut les gens ! c'est moi que v'là !
On le dévisagea avec des yeux ronds, mais il fut vite reconnu par le club des quatre. Y compris Fabien.
- C'est vous qui m'avez parlé du Tao !
Mais il était soudain mystérieusement silencieux et comme ailleurs...
- Hey ho !?
- Hum ? Bonjour monsieur, bonjour monsieur, bonjour Camille, bonjour...euh...robot. Tiens ? le mot "mignon" est analogue...
- Mais ? je suis une femme !
- J'ai de quoi aider votre gars - Fabien c'est ça ? Ma plume est bénévole et me démange sans cesse. En particulier quand elle entend parler d'un manque, c'est-à-dire, d'un vide : car elle, elle n'a pas horreur du vide.
- Mons...mada...mademoiselle, vous pourriez traduire, comme vous l'avez fait pour le robot ?
- Ah ! non, c'est hors de mes capacités !
Mais c'est ainsi que Fabien put enfin réaliser ses projets sur cette île étrange, épaulé par un apprenti poète à nul autre pareil.
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